Ce gel tapissé de cellules cardiaques change de couleur à chaque battement

papillon couleurs
| Fanfan Fu & al/ Science
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Dans le but d’étudier le cœur, certains scientifiques s’éloignent des sentiers battus de la technologie médicale conventionnelle et vont même jusqu’à puiser leur inspiration dans le règne animal. En copiant la capacité de certains animaux à changer de couleur selon les conditions environnementales, des chercheurs ont mis au point un gel dont les couleurs se modifient à chaque contraction des cellules cardiaques qui le composent.

Quelques-uns des phénomènes colorés les plus spectaculaires du monde naturel, tel que la queue irisée d’un paon ou les ailes chatoyantes du papillon Morpho, ne sont pas dus à la présence de pigments mais à la structure microscopique des plumes, des écailles et de la peau. En s’inspirant des couleurs structurelles produites par le caméléon, des bio-ingénieurs du Laboratoire de Bioélectronique de l’université de Nanjing (Chine) ont créé un gel « vivant » utilisant le battement de cellules cardiaques pour changer de couleurs. Les résultats ont été publiés dans la revue Science Robotics.

La peau d’un caméléon contient des micro-cristaux qui absorbent et réfléchissent certaines longueurs d’onde lumineuses ; pour changer ses couleurs, l’animal modifie la distance entre ces cristaux afin de sélectionner les longueurs d’onde qui seront réfléchies ou absorbées. Dans le but de reproduire ce mécanisme, les chercheurs chinois ont créé un hydrogel particulier (hydrogel opalin inverse) sur lequel ils ont versé des amas compacts de nanoparticules ; ensuite, le gel a été durci puis poncé pour laisser place à un réseau de pores microscopiques. Certaines longueurs d’onde s’engouffraient dans ces pores, tandis que d’autres étaient réfléchies.

hydrogel
Un hydrogel est un gel dans lequel l’agent gonflant est l’eau. À gauche, deux morceaux d’hydrogel. À droite, un hydrogel poreux comme celui utilisé par les les bio-ingénieurs de l’université de Nanjing. Crédits : ExtremTech/ Jianyu Li & al/ Nature

Pour finir, les bio-ingénieurs ont cultivé des cellules cardiaques de rats sur l’hydrogel afin que celui-ci soit tapissé d’un assemblage solidaire de cardiomyocytes (les cellules contractiles du muscle cardiaque). Le battement synchronisé de l’ensemble des cellules provoquant la courbure du gel et donc la modification de l’organisation de sa microstructure (redistribution des nanoparticules), les couleurs de ce dernier se sont mises à changer en fonction des contractions cellulaires.

Dans l’optique d’approfondir leurs tests, les auteurs ont utilisé l’hydrogel biohybride pour créer un papillon en 3D également recouvert de cardiomyocytes. Au cours des contractions cellulaires, le papillon synthétique bat des ailes d’avant en arrière, produisant un magnifique éventail de couleurs. Cette nouvelle technique pourrait aider à développer des récepteurs-inducteurs aux couleurs très performants, pour de futurs biorobots.

Cette vidéo de l’université de Nanjing montre la façon dont les couleurs de l’hydrogel, puis celles du papillon synthétique, changent en fonction des contractions cellulaires :


En combinant l’hydrogel biohybride à des microfluides, les chercheurs ont également développé une structure cardiaque synthétique afin de tester l‘effet des drogues sur le cœur. En ajoutant de l’isoprénaline (composé chimique chronotrope positif utilisé en cas d’arrêt cardiaque) dont l’effet est d’augmenter significativement la fréquence cardiaque, les contractions des cardiomycytes se sont accentuées et les couleurs du gel ont changé plus rapidement et intensément. Cela pourrait être d’une grande aide dans la confection de nouveaux médicaments en permettant aux médecins de visualiser l’effet des drogues sur le cœur, simplement à l’œil nu.

Source : Science Robotics

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