Le gluten engendre une inflammation cérébrale chez la souris

inflammation cerveau gluten
| Pixabay
⇧ [VIDÉO]   Vous pourriez aussi aimer ce contenu partenaire

En vue de leurs effets supposés bénéfiques, les régimes sans gluten gagnent toujours plus en popularité. Cependant, ces avantages manquent de preuves scientifiques. Pour la première fois, des chercheurs révèlent les effets directs du gluten sur le cerveau. Que ce soit dans le cadre d’un régime alimentaire normal ou riche en graisses, le composé provoque une inflammation de l’hypothalamus chez la souris — un effet probablement transposable à l’Homme.

Le gluten se trouve en grande quantité dans les céréales telles que le blé, le seigle et l’orge — omniprésents dans notre alimentation. Pour le blé tendre (Triticum aestivum), qui est couramment utilisé dans les produits boulangers et la viennoiserie par exemple, le gluten englobe 75% des protéines totales.

On estime que les troubles liés à sa consommation touchent environ 5% de la population mondiale et incluent principalement la maladie cœliaque, la sensibilité au gluten (ou maladie non cœliaque), la dermatite herpétiforme, l’ataxie et l’allergie. Ces troubles sont principalement associés à la présence de protéines à forte teneur en proline et en glutamine. Ces protéines résistent notamment à la dégradation par nos enzymes digestives et peuvent s’accumuler au niveau de l’intestin grêle.

Les personnes souffrant d’une maladie cœliaque sont génétiquement prédisposées à une réaction auto-immune, suite à l’ingestion de gluten. Cependant, chez les personnes saines, ses effets délétères sur le système immunitaire font encore objet de débats auprès des scientifiques. Des recherches ont également évoqué des troubles métaboliques associés à l’obésité, des impacts sur le microbiote intestinal ainsi qu’une inflammation du système nerveux entérique et du tractus gastro-intestinal. Mais les preuves corroborant ces hypothèses sont rares.

Ce manque de preuves est probablement dû à la difficulté des expérimentations sur le gluten chez l’Homme. En effet, les études en double aveugle contrôlées par placebo peuvent être compromises par l’effet nocebo (conséquences néfastes purement d’origine principalement psychosomatiques, suite à la prise d’une substance inerte servant de contrôle). Sans compter que la plupart des produits sans gluten ont une texture différente, que la majorité des participants parviennent à reconnaître facilement — ce qui peut fausser les résultats.

La nouvelle étude, menée par une équipe de l’Université d’Otago (en Nouvelle-Zélande), a exploré les effets directs du gluten sur le cerveau des mammifères. Pour ce faire, les chercheurs ont choisi de mener leurs expériences sur des souris. Bien qu’à l’instar des humains, elles peuvent avoir des comportements de discrimination alimentaire, les évaluations seraient moins biaisées par des effets indésirables « anticipés » — que pourraient présenter des participants humains suivant un régime avec gluten.

En outre, « les souris sont un excellent modèle pour étudier la physiologie humaine. Il est donc tout à fait possible que l’inflammation que nous avons trouvée puisse se produire chez l’homme », explique le coauteur de l’étude, Alexandre Tups, de l’école des sciences biomédicales de l’Université d’Otago.

Une réaction inflammatoire quel que soit la nature du régime

D’après le rapport publié dans le Journal of Neuroendocrinology, les chercheurs ont évalué les effets d’un régime standard pauvre ou riche en graisses, enrichi de 4,5% de gluten (l’équivalent de notre consommation moyenne quotidienne). Les expériences ont été effectuées sur des souris mâles âgées de 10 semaines environ et placées dans des cages individuelles à cycle de luminosité et de température normales (environ 12 heures de lumière et d’obscurité à 21 °C). Ces conditions sont importantes dans la mesure où le stress environnemental peut influencer le métabolisme du gluten.

Comme on pouvait s’y attendre, le régime riche en graisses a modifié le poids corporel des souris. Cependant, des marqueurs métaboliques inflammatoires ont également été détectés. Chez les souris nourries avec un régime pauvre en graisses, la présence du gluten a induit une augmentation du niveau de protéines C-réactives circulantes. De manière étonnante, en examinant le cerveau des souris, les chercheurs ont constaté une forte augmentation du taux d’astrocytes et de microglies (les équivalents des macrophages au niveau du cerveau), quelle que soit la nature du régime avec gluten. Toutefois, en étant ajouté au régime riche en graisses, le gluten a provoqué une augmentation encore plus élevée des cellules immunoréactives.

Des risques de lésions cérébrales

La migration de ces cellules immunitaires s’accompagnait d’une inflammation généralisée de la région hypothalamique, pouvant entraîner des lésions cérébrales. Cette région est fortement impliquée dans le contrôle de fonctions métaboliques de base telles que la régulation du poids corporel et de la glycémie. « Si ces effets deviennent persistants, ils peuvent exacerber les risques pour la santé », indique Tups. L’altération de la régulation glycémique peut par exemple perturber les fonctions de mémorisation. Bien que les mécanismes ne soient pas entièrement compris, les chercheurs estiment que cette réaction est induite par les composés dérivés du gluten résistants à la digestion (glutamine, proline), tel qu’observé chez les patients cœliaques.

Toutefois, cette découverte ne signifie nullement que le gluten est à bannir de notre alimentation. « Nous ne disons pas que le gluten est mauvais pour tout le monde. Pour les personnes tolérantes au gluten, le fait de se passer entièrement de gluten peut avoir des conséquences néfastes sur la santé qui peuvent l’emporter sur les avantages potentiels », précise Tups. Il est d’ailleurs important de savoir que les aliments sans gluten sont hautement transformés et sont souvent pauvres en nutriments essentiels tels que la vitamine B, le fer et les fibres. En revanche, ils sont particulièrement riches en sucre — ce qui n’est pas idéal pour la santé.

Source : Journal of Neuroendocrinology

Laisser un commentaire