Un pas de géant vers la vie synthétique : des chercheurs complètent le premier génome artificiel de levure

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Récemment, des microbiologistes de l’École polytechnique fédérale de Zürich (EPFZ) ont réussi à recréer en laboratoire le processus d’endosymbiose, en introduisant une bactérie dans un champignon. Si cette avancée permet de mieux comprendre les conditions nécessaires à l’apparition de ce phénomène dans la nature, une autre prouesse scientifique vient d’être accomplie par des chercheurs en biologie synthétique australiens. Après plus de dix ans de travail, ces derniers, en collaboration avec une équipe internationale, ont achevé la création du dernier chromosome du premier génome de levure synthétique au monde. Cette avancée promet des applications en biofabrication, notamment dans les secteurs agroalimentaire, pharmaceutique et pour le développement de matériaux innovants.

Pour la première fois, un génome eucaryote a été intégralement conçu en laboratoire. Cette prouesse est le fruit du travail d’une équipe internationale dirigée par des scientifiques de l’Université Macquarie, en Australie. Elle marque l’aboutissement du projet mondial Sc2.0, entamé en 2006, qui visait à recréer un génome eucaryote synthétique, c’est-à-dire un organisme doté d’un noyau cellulaire.

Dans le cadre de cette initiative, les chercheurs ont manipulé une souche de levure boulangère, Saccharomyces cerevisiae, ainsi qu’un néochromosome – une structure génétique artificielle contenant des gènes d’ARN de transfert (ARNt).

« Il s’agit d’une avancée majeure pour la biologie synthétique », s’est félicité le professeur Sakkie Pretorius, co-auteur principal de l’étude et vice-chancelier adjoint à la recherche de l’Université Macquarie, dans un communiqué. « C’est la dernière pièce d’un puzzle qui mobilise la communauté scientifique depuis de nombreuses années », a-t-il ajouté.

Les résultats de ces travaux montrent que, bien que la fabrication de levures entièrement synthétiques ne soit pas encore une réalité, il est déjà possible de remodeler et recoder des cellules de levure vivantes.

Une avancée permise par des techniques d’édition génomique de pointe

Le chromosome conçu par l’équipe, baptisé SynXVI, constitue le seizième et dernier élément du puzzle permettant au génome eucaryote de fonctionner normalement. Dans leur étude, publiée dans la revue Nature Communications, les scientifiques détaillent leur méthodologie, qui repose sur des techniques avancées d’édition génomique, notamment le protocole CRISPR D-BUGS.

Grâce à cette approche, ils ont pu identifier les erreurs génétiques présentes sur le chromosome et entravant la croissance de la levure, notamment en compromettant sa capacité à se multiplier et à survivre dans des conditions environnementales difficiles.

Pour pallier ces défauts, l’équipe a à nouveau eu recours à CRISPR afin de corriger les anomalies détectées. Ces ajustements ont permis à la souche modifiée de se développer en utilisant le glycérol comme source d’énergie, y compris à des températures élevées. Au fil de leurs travaux, les scientifiques ont également découvert un problème lié à l’emplacement des marqueurs génétiques, ces derniers étant essentiels pour identifier et suivre l’ADN dans un génome.

Croissance chromosome SynXVI

Différentes étapes de manipulation du SynXVI pour permettre à la levure de se développer à différentes températures. © Goold et al. Nature Communications

Une plateforme d’ingénierie biologique qui pourrait à terme accélérer le développement des médicaments

Selon leurs observations, un simple mauvais positionnement de ces marqueurs pouvait induire des perturbations dans le fonctionnement cellulaire. Lorsqu’ils étaient placés à proximité de régions génétiques instables, ils interféraient avec l’activation et l’inactivation des gènes essentiels, altérant ainsi des processus fondamentaux, tels que la répartition du matériel génétique lors de la division cellulaire.

« L’une de nos principales découvertes a été de comprendre comment la position des marqueurs pouvait influer sur l’expression des gènes essentiels », explique Hugh Goold, biologiste synthétique à l’Université Macquarie et co-auteur de l’étude.

« En construisant et en déboguant ce dernier chromosome synthétique, nous avons mis au point une plateforme d’ingénierie biologique performante, qui pourrait accélérer la production de médicaments, de matériaux durables et d’autres ressources essentielles », conclut le professeur Ian Paulsen, directeur du Centre d’excellence en biologie synthétique de l’ARC et co-directeur du projet.

Source : Nature Communications

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