Le Japon prévoit de lancer une centrale solaire en orbite terrestre basse pour transmettre de l’énergie vers la Terre d’ici 2025. Le premier prototype de démonstration pèsera environ 180 kg et transmettra environ 1 kilowatt de puissance énergétique, soit de quoi alimenter un appareil électroménager. Il s’agit d’une première étape vers une production à plus grande échelle visant à réduire considérablement la dépendance aux énergies fossiles.
Bien que l’énergie solaire soit utilisée depuis les années 1970, son adoption généralisée reste limitée en raison de défis techniques et logistiques. Les difficultés incluent par exemple le manque d’emplacement approprié pour l’installation des panneaux photovoltaïques, la dégradation des installations avec le temps et la dépendance aux conditions météorologiques et du cycle jour-nuit. Afin de combler les déficits de production, les utilisateurs sont tout de même obligés de se tourner vers les énergies fossiles.
Proposée pour la première fois par Peter Glaser, un ancien ingénieur des missions Apollo, la production spatiale d’énergie solaire pourrait aider à surmonter ces limitations. Contrairement à la plupart des technologies énergétiques vertes terrestres, les centrales solaires spatiales pourraient produire de l’énergie en permanence, car elles ne dépendraient pas des conditions météorologiques et seraient moins esclaves du cycle jour/nuit (selon le type de placement orbital).
Cependant, la production d’énergie solaire depuis l’espace est généralement considérée comme peu pratique et beaucoup trop coûteuse. En effet, elle nécessite l’installation en orbite d’énormes infrastructures, ce qui nécessiterait des dizaines de fusées pour les transporter. Toutefois, les chercheurs du Japan Space Systems estiment que les récentes avancées en matière d’ingénierie spatiale et de technologies solaires pourraient changer la donne, sans compter le besoin urgent de décarboner l’industrie énergétique mondiale.
Un rapport coût/rentabilité qui fait débat
Conçu dans le cadre du projet Ohisama, le dispositif du Japan Space Systems consiste en un petit satellite de 180 kilogrammes qui orbitera à 400 kilomètres d’altitude. Il sera équipé d’un panneau photovoltaïque de 2 mètres carrés qui chargera une batterie intégrée. L’énergie accumulée sera ensuite convertie en micro-ondes puis envoyée vers une antenne de réception sur Terre. Étant donné que le satellite se déplacera à grande vitesse (28 000 km/h), les éléments de l’antenne de réception seront répartis sur une distance de 40 kilomètres et espacés de 5 kilomètres.
Cependant, il est important de noter qu’il ne s’agit que d’un prototype de démonstration, qui ne permettra d’envoyer qu’un kilowatt de puissance énergétique, soit de quoi alimenter un petit lave-vaisselle ou une bouilloire pendant une heure. En outre, « la transmission ne prendra que quelques minutes, mais une fois la batterie vide, il faudra plusieurs jours pour la recharger », a précisé Koichi Ijichi, conseiller au Japan Space Systems, lors de la présentation de la feuille de route du projet à la Conférence internationale sur l’énergie spatiale à Londres.
D’autre part, les chercheurs ont déjà réalisé une première démonstration de la transmission sans fil d’énergie solaire à partir d’une source stationnaire placée au sol. Et en décembre de cette année, ils prévoient d’effectuer la transmission depuis un avion, en y installant un panneau solaire identique à celui qui équipera le satellite. L’avion transmettra de l’énergie sur une distance de 5 à 7 kilomètres, par rapport à l’antenne de réception au sol.
Par ailleurs, selon les administrateurs, les avancées en matière de cellules photovoltaïques (telles que les cellules solaires flexibles) permettraient d’étendre ce type de technologie à des échelles commercialement viables. Dans cette vision, un projet gouvernemental connexe prévoit de lancer des satellites équipés de panneaux solaires géants de 2 kilomètres carrés qui pourraient générer jusqu’à 10 fois plus d’énergie que les panneaux au sol. Chaque satellite pourrait ainsi produire mensuellement l’équivalent de la production quotidienne d’une centrale nucléaire. La mise à disposition future de la fusée Starship de SpaceX pourrait en outre faciliter les installations.
Toutefois, le véritable potentiel de l’énergie solaire spatiale fait débat. D’après un récent rapport de la NASA, les investissements nécessaires à la construction et au lancement des centrales spatiales seraient trop élevés par rapport à la quantité d’énergie produite, ce qui remet en question leur rentabilité. En vue des capitaux engagés, l’énergie produite pourrait coûter environ 0,61 dollar le kilowattheure, contre 0,5 dollar pour l’énergie solaire terrestre. D’un autre côté, les émissions carbone générées par les fusées nécessaires à leur lancement les rendent beaucoup moins respectueuses de l’environnement qu’on pourrait le penser. En effet, 68 vaisseaux seraient nécessaires pour mettre en orbite une centrale pouvant produire un gigawattheure d’électricité.
Néanmoins, d’autres centres de recherche et agences spatiales telles que l’Agence spatiale européenne (ESA) et l’US Air Force travaillent actuellement sur différentes stratégies pour la faisabilité des centrales solaires spatiales.