Les «gameuses» préfèrent incarner des personnages féminins hypersexualisés malgré leur aversion pour la sexualisation, selon une étude

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La représentation des personnages féminins dans le monde des jeux vidéo constitue depuis longtemps un sujet de controverses intenses. Les critiques pointent fréquemment du doigt les développeurs pour leur tendance à favoriser un design sexualisé, renforçant ainsi certains stéréotypes. Une équipe de chercheurs a tenté de déterminer si ces personnages féminins sexualisés peuvent avoir une quelconque influence positive sur la perception des joueurs. Les résultats de l’étude ont révélé entre autres et de façon étonnante que bien que les joueuses ressentent une aversion pour la sexualisation des personnages féminins, elles choisissent néanmoins de les incarner lorsqu’elles en ont la possibilité dans un contexte de jeu interactif.

Malgré les critiques et analyses récurrentes concernant les personnages féminins dans les jeux vidéo, les créateurs ont fait des efforts pour introduire plus de diversité. Pourtant, la majorité de ces personnages restent sexualisés. En 2014, une étude menée par Martey R.M. et Stromer-Galley J visait à comprendre le changement de sexe et de comportement des joueurs dans les jeux en ligne. Les résultats ont montré que 80 % des joueurs de MMOG (Massively Multiplayer Online Game), dont 75 % étaient des hommes, avaient déjà incarné un avatar du sexe opposé. Cela signifie que la plupart des joueurs ne ressentent ni gêne ni sentiment négatif vis-à-vis du design de ces personnages.

Pour les joueuses, l’avis diffère sensiblement. En effet, des recherches menées en 2021 par une équipe sous la direction de Marika Skowronski ont mis en lumière que la sexualisation des personnages féminins engendrait chez elles un sentiment d’auto-objectification. Dans une nouvelle étude, des chercheurs de l’Université d’État de l’Ohio ont tenté d’analyser si la perception des joueuses peut évoluer dans le cas où ces personnages allient force et compétence.

« Il est important de comprendre comment la socialisation genrée et les préjugés tels que le sexisme influencent le développement des jeux vidéo et l’expérience des joueurs », a déclaré Teresa Lynch, professeure adjointe en technologie de la communication à l’Université d’État de l’Ohio et directrice du Chronos Laboratory. Pour cette recherche, l’équipe a conduit deux expériences contrôlées basées sur les conceptions de personnages du jeu SOULCALIBUR VI.

Une perception différenciée des personnages

Lors de la première phase de l’expérience, 239 participants âgés de 18 à 51 ans, dont une majorité de femmes, ont été recrutés. Les chercheurs ont conçu quatre types de personnages féminins, variant en matière de force et de sexualisation, par le biais du jeu SOULCALIBUR VI. Ils ont ajusté des caractéristiques telles que les proportions corporelles, la taille des armes et les vêtements afin de créer différents niveaux (faibles à élevés) de sexualisation et de force. Les participants ont visionné quatre clips de combat préenregistrés, chacun mettant en scène un personnage différent. Après le visionnage, ils ont été invités à évaluer ces personnages selon divers critères, notamment la sexualisation perçue, la féminité, la force et la sympathie, avant de désigner celui qu’ils préféraient.

D’après les résultats, publiés dans la revue Communication Research, les personnages avec un indice de sexualisation élevé étaient considérés comme plus féminins, mais étaient moins appréciés des participantes. Les personnages dotés d’une force accrue, en revanche, étaient perçus comme redoutables. Cependant, la combinaison d’une force élevée avec une forte sexualisation n’a pas amélioré le score de sympathie. Selon les chercheurs, cela suggère que la sexualisation continue d’avoir un impact plus marqué.

La première expérience a également révélé une différence entre les genres notable dans les choix. Les hommes préféraient les personnages forts et moins sexualisés, tandis que les femmes avaient tendance à privilégier les personnages féminins sexualisés, malgré des sentiments mitigés. « Je n’ai pas été surprise que les participantes à nos études aient déclaré ne pas aimer les personnages féminins sexualisés », a déclaré Lynch. Elle a ajouté : « Cela dit, j’ai été surprise de constater que dans notre première étude, les femmes choisissaient toujours le personnage le plus sexualisé lorsqu’on leur demandait quel personnage elles choisiraient d’incarner ».

L’impact du contrôle du gameplay

La seconde phase de l’expérience a été menée auprès de 438 nouveaux participants. L’approche était similaire à la première, mais au lieu de visionner des clips de combat préenregistrés, les participants prenaient le contrôle direct de l’un des quatre types de personnages. Ils ont ensuite participé à une session de combat simulée pendant 10 minutes.

Les résultats de cette seconde expérience ont révélé que l’appropriation d’un personnage influençait les impressions des participants. L’équipe a constaté que la perception de la force et d’autres attributs du personnage était directement affectée. Les personnages avec un indice de force élevé étaient également perçus comme plus compétents. De plus, le gameplay interactif influençait plus profondément la manière dont le joueur s’identifiait au personnage.

« Nos résultats suggèrent que les gens accordent plus d’attention à la puissance des personnages féminins qu’ils peuvent incarner, alors que ce facteur n’était pas si important lorsqu’ils regardaient simplement la vidéo du jeu », a déclaré Lynch. « Le fait de pouvoir traduire ces caractéristiques de la représentation visuelle en actions que le joueur effectuait réellement a façonné l’expérience », ajoute-t-elle. L’équipe envisage de poursuivre ses recherches pour comprendre comment les interactions prolongées avec ces personnages féminins dans divers jeux influencent les attitudes et l’expérience des joueurs.

Source : Communication Research

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