De la lumière confinée dans un espace de la taille d’un atome grâce au graphène

confinement lumineux
Vue d'artiste d'un confinement de lumière. | ICPO
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La possibilité de confiner la lumière au sein de structures de très petites dimensions est extrêmement importante pour le développement de microscopies, capteurs et nano-lasers de nouvelle génération. En utilisant le graphène et le phénomène des plasmons, des physiciens sont parvenus à comprimer la lumière à l’intérieur d’un espace plus petit que la longueur d’onde de celle-ci.

Confiner la lumière à l’intérieur d’espaces extrêmement petits est la clé pour réaliser d’importantes avancées en nano-électronique, optique quantique et physique des lasers. Récemment, en utilisant les remarquables propriétés du graphène, une équipe internationale de physiciens a réussi à compacter la lumière au sein d’un espace de la taille d’un unique atome. Les résultats de la découverte ont été publiés dans la revue Science.

« Le graphène continue de nous surprendre : personne ne pensait que confiner la lumière à la taille d’un atome était possible » explique Frank Koppens, physicien à l’Institut des Sciences Photoniques (ICPO, Espagne) et auteur principal de l’étude. « Cela ouvre tout un ensemble de nouvelles applications comme des communications optiques ou des capteurs à l’échelle du nanomètre ».

graphene nanophotonique
Dispositif de confinement lumineux utilisé pour l’expérience : le graphène est encapsulé dans un isolant (h-BN) et recouvert d’un réseau de bandes en or. Le tout forme une hétérostructure. Crédits : David Alcaraz Iranzo & al

D’ordinaire, selon le principe de la limite de diffraction, la lumière ne peut être concentrée dans une zone plus petite que sa longueur d’onde. Les scientifiques ont déjà tenté de contourner cette limite en utilisant des cages nanométriques métalliques afin de guider les photons, mais un tel processus entraîne une importante perte d’énergie. Pour leur expérience, les auteurs ont construit un nouveau type de dispositif nanophotonique via une hétérostructure (jonction de différents matériaux) recouverte d’une monocouche de graphène pour d’obtenir le comportement d’un semi-métal, afin de guider la lumière sous forme de plasmons.

Introduits en 1952 par les physiciens David Bohm et David Pines, les plasmons sont des quasi-particules correspondant aux quantas d’oscillation de plasma dans un métal. Ils peuvent être décrits comme une oscillation de la densité d’électrons couplés à des photons. En se couplant avec les photons, les électrons peuvent « guider » ceux-ci à travers le métal. Dans le but de maintenir la stabilité de l’ensemble, les physiciens ont ajouté une monocouche hexagonale de nitrure de bore (hBN) servant d’isolant par dessus le graphène, ainsi qu’un réseau de tiges métalliques en or.

Comme de nombreuses découvertes scientifiques, celle-ci a été effectuée par sérendipité (par « hasard »). « Au début, nous cherchions seulement une nouvelle manière d’exciter les plasmons du graphène » explique David Alcaraz Iranzo, physicien à l’ICPO. « Au cours de l’expérience, nous avons découvert que le confinement était plus puissant qu’auparavant et les pertes d’énergie bien moins élevées. Donc nous avons décidé de pousser jusqu’à la taille d’un atome unique, avec d’étonnants résultats ».

plasmons metal
Simulations de l’amplitude des plasmons confinés entre le métal et le graphène, dans une zone de 10nm puis de 1nm. Crédits : David Alcaraz Iranzo & al

Lorsque le dispositif a été illuminé avec une lumière infrarouge, les plasmons se sont regroupés entre le métal et la couche de graphène. Les chercheurs ont continué à rétrécir cette zone de confinement jusqu’à la taille d’un atome. Ils ont découvert que dans cet espace, les plasmons continuaient à osciller et à se propager librement. Cette propagation peut être contrôlée via le passage d’une tension électrique, démontrant la possibilité de contrôler la lumière elle-même dans un espace d’une taille inférieure à sa longueur d’onde.

Pour réaliser des composants opto-électroniques nanométriques (capteurs, lasers, mémoires, etc), tous les autres constituants doivent aussi être réduits. Les applications techniques ne sont donc pas prévues à court terme. Toutefois, cette découverte montre qu’il est possible de manipuler les photons à l’échelle atomique et ouvre la voie au développement de transistors photoniques ultra-rapides. Dans le futur, les constructeurs pourront ajouter plus de transistors dans le même espace, ou implanter le même nombre de transistors dans un espace plus petit. Dans les deux cas, les performances attendues sont très prometteuses.

« Avoir atteint l’ultime limite du confinement lumineux pourrait conduire à de nouveaux appareils de très petites dimensions » conclut Andrea C. Ferrari, physicien au Graphene Flagship. Ce qui est certain, c’est que le graphène est loin d’avoir livré le secret de toutes ses incroyables propriétés qui semblent intarissables.

Source : Science

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