Des scientifiques de l’Université de Pékin (Beida) annoncent avoir mis au point un médicament qui pourrait non seulement accélérer la guérison des patients infectés par le COVID-19, mais également entraîner une immunité à court terme.
Selon Sunney Xie, directeur du Centre d’innovation avancée en génomique de Beida, ce traitement a déjà été testé avec succès sur des souris. Cinq jours après l’injection du médicament, la charge virale des animaux aurait été réduite d’un facteur 2400 ! Ce médicament pourrait donc être un remède particulièrement efficace contre le COVID-19.
Un remède à base d’anticorps neutralisants
Pour mettre au point ce traitement potentiel, Xie et son équipe, en collaboration avec des chercheurs de l’hôpital Youan de Pékin, ont isolé plusieurs anticorps neutralisants très puissants, à partir du sang prélevé sur une soixantaine de patients guéris de l’infection ; ces anticorps ont été produits naturellement par le système immunitaire de ces individus et empêchent le virus d’infecter les cellules. Leur expertise en génomique unicellulaire a permis aux scientifiques d’identifier rapidement les anticorps adéquats ; ils ont ainsi pu lancer une première phase de tests sur des animaux.
Au total, 14 anticorps ont été sélectionnés parmi les 8558 spécimens capables de se lier à l’antigène. Le plus puissant, dénommé BD-368-2, affichait une IC50 (une concentration inhibitrice médiane, qui exprime le pouvoir inhibiteur d’un composé) de 1,2 ng/mL et 15 ng/mL respectivement contre le SARS-CoV-2 pseudotypé (cela signifie que ses protéines d’enveloppe ont été modifiées) et le virus authentique. Cette mesure quantitative indique quelle quantité du médicament est nécessaire pour inhiber de moitié l’action du virus.
Les résultats, qui viennent de faire l’objet d’une publication dans la revue Cell, dépassent toutes les espérances : non seulement le traitement diminue considérablement la charge virale, réduisant ainsi le temps de récupération de l’organisme, mais il semble générer une immunité puisque les souris ayant reçu le traitement préventif, avant d’être mises en contact avec le virus, n’ont affiché aucune charge virale !
Xie a bon espoir que son médicament deviendra LE remède qui fera cesser la pandémie. Une bonne nouvelle, car bien que plus d’une centaine de laboratoires dans le monde se soient lancés dans la recherche d’un vaccin – dont cinq sont déjà au stade des essais sur l’Homme, en Chine – la production effective d’un vaccin prendrait au minimum 12 à 18 mois.
Les experts soulignent qu’une autre piste prometteuse est la plasmathérapie ; en Chine, plus de 700 patients ont ainsi reçu des injections de plasma sanguin provenant d’individus guéris du COVID-19. Ce plasma, qui contient les anticorps fabriqués par l’organisme, a montré de très bons effets thérapeutiques selon les autorités sanitaires. Mais Xie explique que ce plasma est malheureusement une ressource limitée. En revanche, le médicament formulé par son équipe pourrait être plus rapidement produit en masse.
Un médicament qui pourrait remplacer le vaccin
Les chercheurs ont également démontré que les anticorps neutralisants du SARS-CoV-2 forment un complexe avec la protéine de pointe, qui empêche celle-ci de se lier au récepteur ACE2 des cellules humaines. Ainsi, il pourrait être possible de sélectionner les anticorps neutralisants efficaces directement, en se basant sur les modélisations du complexe que chacun est susceptible de former avec la protéine de surface du virus.
L’usage d’anticorps pour la mise au point de médicaments est une pratique relativement courante. La technique a notamment déjà été utilisée pour la fabrication de traitements contre le VIH, Ebola ou le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS). Xie et son équipe ont donc disposé d’une solide base de travail pour leurs recherches.
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À l’instar du Remdesivir, ce nouveau médicament réduit largement le temps de récupération chez certains patients. Toutefois, dans le cas du Remdesivir, la baisse du taux de mortalité n’était pas significative. L’étude de Xie et ses collègues a en revanche révélé une immunité induite par leur médicament. Si la durée de la protection n’a pas été établie précisément, les chercheurs estiment que leur traitement pourrait offrir une protection temporaire au personnel médical pendant quelques semaines, voire plusieurs mois. Les étapes de validation d’un vaccin étant un processus particulièrement long et laborieux, ce médicament pourrait être un moyen plus rapide et efficace de stopper la propagation du SARS-CoV-2.
La planification des essais cliniques est en cours. Selon Xie, le médicament devrait être disponible avant la fin de l’année et à temps pour toute potentielle épidémie hivernale du virus, car n’oublions pas que c’est au mois de décembre que la maladie a commencé à se propager. Les essais sur l’Homme seront menés en Australie et dans d’autres pays où le nombre de cas s’avère encore suffisant (la Chine ne disposant plus de suffisamment de porteurs du virus pour mener à bien les tests…).