Le moustique, ce petit insecte buveur de sang, est malgré sa taille l’un des plus grands fléaux de l’humanité. Vecteur de nombreuses maladies dont beaucoup sont mortelles, tout dans son comportement et dans son évolution génétique fait de lui un prédateur à part entière. Pour mieux comprendre les moustiques, et peut-être mieux s’en protéger, une récente étude a révélé qu’après avoir été olfactivement stimulés, ils sont plus attirés par les couleurs à grande longueur d’onde comme le rouge, l’orange, le noir et le cyan. Ces couleurs, dont certaines sont proches de celle de la peau humaine, attireraient donc ces insectes davantage lorsque nous les portons.
Publiée dans Nature Communications et menée par l’Université de Washington, l’étude montre à quel point les méthodes de chasse des moustiques se sont perfectionnées au cours de leurs milliers d’années d’évolution. Ils possèdent de véritables radars intégrés qui détectent facilement les odeurs, les sources de chaleur, l’humidité, les formes… et qui rendent leur technique quasiment imparable.
Des recherches ont, en effet, déjà montré que l’insecte se repère facilement grâce au CO2 expiré par l’homme et les animaux à sang chaud. Grâce à ce paramètre, le moustique peut traquer sa proie même au-delà de 10 mètres de distance. Il s’intéresse aussi aux objets qui émettent de la chaleur, et détecte les zones les plus chaudes du corps. À moins de 20 centimètres, il capte la chaleur et l’humidité, et donc les meilleures zones de piqûre.
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Son arsenal de chasse et les maladies qu’il véhicule font ainsi du moustique le prédateur parfait. Il trône même au sommet de la liste des animaux les plus dangereux au monde. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, de grands carnivores comme les requins, ainsi que les serpents et araignées les plus venimeux, ne lui arrivent pas à la cheville.
Une infographie apparue sur le blog de Bill Gates indiquait qu’en une année, les moustiques pouvaient faire 830 000 victimes humaines, quand le requin, lui, n’en fait que six ! Les serpents eux, en font environ 60 000 et les scorpions 3500.
Peau humaine : elle émet une longueur d’onde particulière
Comme mentionné plus haut, les moustiques repèrent l’homme grâce à l’odeur de CO2 dans son haleine. Les chercheurs américains ont alors mené des expériences en suivant leurs réactions aux signaux olfactifs et visuels. Après avoir détecté le CO2, en effet, les yeux du moustique prennent le relais afin d’en déterminer l’origine.
Les scientifiques ont sélectionné des moustiques femelles de l’espèce commune Aedes aegypti. Ils ont ensuite observé comment les insectes réagissaient aux points de différentes couleurs au fond d’une chambre de test, avec ou sans pulvérisation de CO2.
L’équipe a alors découvert que les moustiques préféraient se diriger vers un point s’il était rouge, orange, noir ou cyan après avoir senti l’odeur du CO2. Mais sans le gaz, les insectes ont ignoré les points, quelle que soit leur couleur. Cependant, ils ne se sont pas approchés des points verts, bleus, blancs ou violets — qui sont des couleurs à courte longueur d’onde —, même après avoir été incités à chasser (en imprégnant ces points de CO2).
« Lorsqu’ils sentent des composés spécifiques, comme le CO2 de notre haleine, ce parfum stimule les yeux à rechercher des couleurs spécifiques et d’autres motifs visuels, qui sont associés à un hôte potentiel. Cela les stimule ensuite à se diriger vers eux », explique dans un communiqué Jeffrey A. Riffell, professeur de biologie à l’Université de Washington et auteur principal de l’étude.
Selon les chercheurs, les insectes préfèrent ces couleurs car la peau humaine, quelle que soit sa teinte, émet un fort signal rouge-orangé. Lors de tests de suivi, les chercheurs ont exposé à nu des mains humaines de différentes teintes, et ont constaté que les insectes ne se dirigeaient vers ces dernières que s’ils sentaient d’abord le CO2. Et au contraire, si le CO2 était senti mais que les grandes longueurs d’onde étaient filtrées, ou si la main portait un gant vert, les insectes ne s’en approchaient pas.
Par ailleurs, l’équipe de recherche a mené les mêmes expériences sur des moustiques génétiquement modifiés. Si les gènes responsables de la détection de l’odeur du CO2 ou de la vision des couleurs à grande longueur d’onde étaient modifiés, les insectes ne répondaient ni aux stimulus visuels ni à ceux olfactifs. Ce qui laisse supposer que les deux sens sont interdépendants.
À terme, ces recherches pourraient éventuellement découler sur de nouveaux moyens de contrôler les moustiques et de prévenir les piqûres. Ou suffirait-il peut-être de porter du blanc, du vert ou du violet dans les lieux particulièrement à risque ? La fabrication de pièges rouges émettant du CO2 est aussi une piste à explorer.
Dans une prochaine étape, l’étude se penchera sur d’autres pistes, telles que les sécrétions cutanées — qui pourraient attirer les moustiques vers leurs hôtes, indiquent les chercheurs. Ils tiennent également à souligner que d’autres espèces qui se nourrissent d’animaux pourraient peut-être avoir des préférences de couleur différentes.