À l’échelle mondiale, l’obésité frappe environ 16 % de la population. En France, ce fléau touche près de 17 % des adultes selon les chiffres de 2020, une prévalence en constante augmentation, laissant présager des conséquences préoccupantes si la tendance se poursuit. Face à ce défi de santé publique, les stratégies thérapeutiques se diversifient. Outre les recommandations hygiéno-diététiques et les interventions chirurgicales comme la chirurgie bariatrique, de nouveaux traitements pharmacologiques, tels que les agonistes du GLP-1 — notamment Wegovy et Ozempic —, se sont imposés dans l’arsenal médical. Au-delà de ces solutions bien établies, la recherche explore de nouvelles voies. Parmi elles, les nanoparticules d’or (AuNPs) suscitent un intérêt croissant.
Une étude récente menée par des chercheurs égyptiens met en lumière le potentiel de ces nanoparticules : administrées à raison de doses hebdomadaires, elles induiraient une perte de poids significative tout en préservant la masse musculaire, un enjeu important dans la gestion équilibrée de l’obésité.
Longtemps cantonnées à des applications industrielles et technologiques, voire climatologiques, les nanoparticules d’or s’invitent désormais dans le champ de la biomédecine. Leur atout ? Une capacité remarquable à cibler spécifiquement les adipocytes, ces cellules spécialisées dans le stockage des graisses. Elles peuvent acheminer des agents actifs directement dans les tissus adipeux, favorisant ainsi la dégradation des lipides.
Nanoparticules d’or : des alliées inattendues dans le métabolisme lipidique
Les travaux d’Adah Almutairi, experte en nanomédecine à l’Université de Californie à San Diego, s’inscrivent dans cette dynamique. En juin 2024, la scientifique et son équipe ont mis au point une technique de liposuccion innovante : avant l’aspiration des graisses, des nanoparticules d’or sont utilisées pour liquéfier les tissus adipeux. Bien que des essais précliniques sur des modèles animaux soient encore en cours, ces résultats suggèrent des applications médicales prometteuses.
Plus récemment, des chercheurs de l’Université d’Alexandrie, en Égypte, ont apporté de nouveaux éléments de preuve du potentiel des AuNPs dans la régulation du poids corporel. Leur étude, menée sur des rats de laboratoire pendant neuf semaines, visait à évaluer l’impact de différentes doses de nanoparticules d’or sur la composition corporelle et le métabolisme.
L’expérience a porté sur 48 rats mâles adultes, âgés d’environ deux mois, répartis en six groupes de huit sujets chacun. Le premier, désigné comme groupe témoin négatif, a reçu une alimentation standard. Les 40 autres animaux ont été soumis à un régime riche en graisses afin d’induire un état d’obésité, avant d’être subdivisés en cinq groupes distincts :
- Le groupe témoin positif n’a bénéficié d’aucun traitement ;
- Le second a reçu une injection intrapéritonéale quotidienne de nanoparticules d’or à raison de 7,48 µg/kg ;
- Le troisième s’est vu administrer une dose hebdomadaire plus élevée, de 52,33 µg/kg ;
- Le quatrième groupe a reçu une faible dose hebdomadaire (5,23 µg/kg) ;
- Enfin, le dernier groupe a été traité par orlistat (12 mg/kg), un médicament anti-obésité bien connu, commercialisé sous le nom de Xenical.
Au fil de l’étude, les chercheurs ont scruté divers paramètres : composition corporelle, santé des organes, marqueurs métaboliques. Les résultats, publiés dans la revue Scientific Reports, sont significatifs : l’administration hebdomadaire de nanoparticules d’or a permis de réduire significativement la masse grasse, tout en préservant, voire en augmentant, la masse musculaire. De surcroît, des améliorations notables des marqueurs métaboliques ont été observées chez les sujets obèses.
Des résultats prometteurs, mais des incertitudes subsistent
Par le biais de l’analyse d’impédance bioélectrique (BIA), une méthode non invasive permettant de mesurer la répartition de la masse grasse, de la masse maigre et de l’eau corporelle, les scientifiques ont constaté des effets marqués : après neuf semaines de traitement, la perte de poids atteignait 36 % chez les rats ayant reçu des doses hebdomadaires de nanoparticules, contre 33 % pour ceux traités quotidiennement et seulement 18 % pour le groupe sous orlistat.
Ces résultats confirment les observations d’études antérieures, mettant en avant des bénéfices additionnels tels qu’une amélioration de la régulation glycémique, une diminution de l’inflammation et une réduction du stress oxydatif.
« Les analyses de la composition corporelle, par BIA et par dissection, ont démontré que des doses élevées de nanoparticules d’or réduisent significativement la masse grasse tout en optimisant la masse maigre, ce qui pourrait constituer une alternative thérapeutique aux traitements anti-obésité existants », précisent les auteurs de l’étude. Avant d’ajouter : « Alors que l’orlistat se contente de freiner la prise de poids liée à l’obésité, les nanoparticules d’or s’avèrent plus efficaces, du moins chez des modèles animaux, grâce à leurs propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes, ainsi qu’à leur capacité à cibler spécifiquement les tissus adipeux ».
Si ces découvertes montrent des pistes intéressantes, la prudence reste de mise. Les essais cliniques sur l’homme seront déterminants pour évaluer l’efficacité et la sécurité de cette approche novatrice, dont les mécanismes d’action restent encore partiellement élucidés et les potentiels effets secondaires à long terme peu explorés.