La découverte des premières exoplanètes a révolutionné la planétologie et, naturellement, les scientifiques ont commencé dans le même temps à étudier leurs différentes conditions d’habitabilité. Concernant l’apparition de la vie sur ces exoplanètes, la zone d’habitabilité — région autour d’une étoile où la température permet l’existence d’eau liquide à la surface d’une planète — est un critère nécessaire mais pas suffisant. Une étude récente a introduit un critère supplémentaire.
En 2018, plus de 3500 exoplanètes ont été confirmées depuis les premières détections. Parmi ce catalogue, les scientifiques ont identifié des centaines de candidates qui pourraient potentiellement abriter la vie.
Mais au-delà du simple critère de la localisation dans la zone d’habitabilité, d’autres critères doivent être réunis pour concourir à l’apparition de la vie sur une exoplanète. C’est ce que suggère une nouvelle étude parue dans la revue Sciences Advances.
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Pour les auteurs, la quantité d’ultraviolets provenant de l’étoile hôte est un critère primordial dans le développement de la vie. Sur cette base, ils ont établi une liste d’exoplanètes qui pourraient développer une vie similaire à la vie terrestre. « La vie telle que nous la connaissons requiert différentes structures moléculaires impliquées dans diverses fonctions cellulaires » explique Paul Rimmer, astrophysicien à l’université de Cambridge.
« Cela inclut l’ADN, l’ARN, les protéines et les membranes cellulaires, qui sont composés d’éléments relativement simples (lipides, nucléotides et acides aminés). Pendant longtemps, l’origine de ces éléments constitutifs a été un mystère, mais récemment, d’importantes avancées sur leur apparition à la surface de la Terre primitive ont été réalisées ».
Il poursuit en indiquant que « par exemple, l’interaction entre les ultraviolets et le cyanure d’hydrogène (un composé chimique naturel) dans l’eau, combinée à un ion chargé négativement comme le bisulfite, conduit à la création de sucres simples ».
Dans les bonnes conditions, le cyanure d’hydrogène — abondant dans les disques protoplanétaires — et un ion négatif peuvent créer de grandes quantités d’éléments biochimiques nécessaires à la vie. Mais pour ce faire, une dose suffisante d’UV est nécessaire, autrement ces composés restent inertes.
Ce phénomène a été expérimentalement testé en 2015 lorsque des scientifiques ont fait interagir des UV et du cyanure d’hydrogène pour produire des lipides, des nucléotides et des acides aminés — lorsque la quantité d’UV était insuffisante, la réaction ne se produisait tout simplement pas.
Rimmer et son équipe se sont servis de ce critère pour mener leurs recherches. Ils ont comparé la quantité d’UV utilisée dans l’expérience de 2015 avec celle émise par les étoiles orbitées par plusieurs exoplanètes candidates (susceptibles d’abriter la vie).
Les chercheurs ont ensuite calculé la quantité de lumière disponible sur les orbites des planètes afin de déterminer la zone précise où ces réactions pourraient être activée — ce qu’ils ont appelé la « zone d’abiogenèse ».
Les critères généraux pour une exoplanète candidate sont qu’elle doit être rocheuse (il y a donc une contrainte sur la taille de la planète) et se trouver dans la zone d’habitabilité. Bien entendu, ces critères à eux-seuls ne peuvent suffire à spéculer sur la présence de vie ou non, mais ce sont des critères que les astrophysiciens peuvent étudier sans avoir besoin de voir directement la planète.
Les auteurs ont découvert que la zone d’habitabilité et la zone d’abiogenèse ne correspondent pas toujours nécessairement. La Terre, par exemple, se trouve exactement dans la bonne région orbitale combinant les deux zones autour du type d’étoile idéal — le type d’étoile idéal pour la vie est donc une étoile comme le Soleil, avec une température et une quantité d’UV similaires.
Les étoiles plus froides ne produisent pas suffisamment d’UV pour activer les réactions chimiques ; excepté si elles produisent régulièrement des éruptions solaires, mais ces dernières sont potentiellement dangereuses pour la vie.
De tels critères excluent donc la prometteuse Ross 128b des candidates abritant potentiellement la vie. Toutefois, à l’opposé, ils confortent l’exoplanète analogue à la Terre, Kepler 452b, qui se trouve simultanément dans les deux zones. Il est possible que la vie extraterrestre soit totalement différente de la vie terrestre, mais puisque cette dernière est le seul exemple que nous ayons, notre meilleure chance est de rechercher ce que nous connaissons.
« Je ne suis pas sûr de ce à quoi la vie extraterrestre ressemble, mais comme nous n’avons qu’un seul exemple de vie jusqu’à maintenant, il est normal de chercher des lieux qui ressemblent à notre planète » explique Rimmer.
« Il y a une importante distinction entre ce qui est nécessaire et ce qui est suffisant. Les éléments biochimiques constitutifs sont nécessaires mais peut-être pas suffisants : il est possible qu’en les mélangeant pendant des milliards d’années rien n’apparaisse. Mais il est tout de même important de chercher les lieux où ces critères nécessaires existent » conclut-il.