Les éléments chimiques sont aujourd’hui organisés selon le tableau périodique mis au point par Mendeleïev à la fin des années 1860. Bien que cette classification soit universellement utilisée, elle ne représente peut-être pas la plus optimisée des organisations. C’est pourquoi une équipe de chercheurs a proposé une autre forme de classification, à l’aide d’un hypergraphe, organisant ainsi les éléments chimiques selon les liaisons qu’ils établissent et leurs interactions.
Des mathématiciens de l’Institut Max Planck ont développé des méthodes mathématiques détaillées pour cataloguer les éléments, créant ainsi une série d’hypergraphes complexes, plutôt que le tableau périodique plus élémentaire actuellement utilisé. De cette façon, le tableau périodique peut être adapté de différentes manières, en fournissant de nombreuses interprétations différentes de la classification élémentaire en fonction de la manière dont elles sont ordonnées.
Le tableau périodique a été conçu en 1869 par le chimiste russe Dmitri Mendeleïev. Il a organisé les 63 éléments connus à l’époque en fonction de leur poids atomique. Aujourd’hui, ils sont classés par numéro atomique, c’est-à-dire par le nombre de protons à l’intérieur du noyau, de 1 pour l’hydrogène à 118 pour l’oganesson.
L’hypergraphe : une organisation plus flexible que le tableau périodique
Sont également inclus le poids atomique de l’élément, son symbole atomique et une couleur qui symbolise le groupe ayant des propriétés chimiques et physiques particulières communes à un élément. Et les éléments d’une même colonne ont tendance à avoir le même nombre d’électrons dans leur enveloppe extérieure. Mais la réalité ne rentre pas toujours dans de belles boîtes bien rangées. Par exemple, l’équipe note que les scientifiques ne se mettent pas toujours d’accord sur la classification du lanthane et de l’actinium.
Mais la solution hypergraphe, détaillée dans la revue Proceedings of the Royal Society A: Mathematical, Physical and Engineering Sciences, permet des configurations plus flexibles. Selon l’équipe, même organisés par numéro atomique, les éléments peuvent être regroupés de différentes manières dans un hypergraphe organisé — leur solubilité dans l’eau, par exemple, ou les types de gisements géologiques dans lesquels ils se trouvent.
Le mathématicien Guillermo Restrepo a comparé la solution de l’équipe à une sculpture. L’ombre qu’elle projette dépend de l’origine de la lumière. « Les différentes ombres projetées par la figure sont des tableaux périodiques. C’est pourquoi il y a tant de façons de créer ces tableaux » déclare-t-il.
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Les trois conditions définies pour l’établissement d’un tableau périodique sont les suivantes : il faut l’organiser, c’est-à-dire cataloguer des éléments ; il doit être organisé selon une propriété particulière, telle que le numéro atomique ou la masse atomique ; et être groupé selon un critère, tel que la similarité chimique. « Si ces trois conditions sont remplies, des tableaux périodiques peuvent également être créés pour d’autres objets chimiques et même pour des objets en dehors de la chimie » explique Restrepo.
Une nouvelle classification basée sur les liaisons chimiques
« Nous avons étudié près de 5000 substances composées de deux éléments dans des proportions différentes. Nous avons ensuite recherché des similitudes dans ces données. Par exemple, le sodium et le lithium sont similaires car ils se combinent avec les mêmes éléments dans les mêmes proportions (par exemple avec de l’oxygène ou du chlore, brome et iode). Nous avons donc trouvé des modèles que nous pouvons utiliser pour classifier les éléments ».
Ce système, basé sur des liaisons chimiques, réorganise les éléments d’une manière nouvelle. Certains éléments restent regroupés, tels que les halogènes, car ils se lient de la même manière. D’autres sont séparés, comme le silicium et le carbone, qui lorsqu’ils sont liés, forment des composés très différents. Les chercheurs ont déclaré que c’était un système flexible qui pouvait être adapté à de multiples disciplines — pas seulement la chimie, mais également l’ingénierie, les sciences de l’environnement et l’hydrologie, par exemple.
« Nos résultats contribuent à la généralisation en cours de la théorie des réseaux aux hypergraphes, où la description de réseau traditionnelle sous forme de graphique est en train de se résumer à celle d’hypergraphes comme moyen de modéliser des relations complexes entre plusieurs entités. Nous montrons que les hypergraphes peuvent être organisés et que la structure résultante est au cœur de la chimie depuis plus de 150 ans » concluent les chercheurs.