L’essor de l’informatique quantique a poussé les scientifiques à développer de nouveaux moyens de manipuler les interactions lumineuses afin d’obtenir une vitesse de traitement de l’information toujours plus élevée à l’échelle nanométrique. Une nouvelle technologie holographique basée sur des interactions électrons-photons devrait permettre aux chercheurs d’avancer sur de nouvelles pistes concernant le développement d’ordinateurs quantiques.
La photographie mesure la quantité de lumière de couleur différente frappant le film photographique. Cependant, la lumière est aussi une onde et est donc caractérisée par une phase. La phase spécifie la position d’un point dans le cycle de l’onde et est corrélée à la profondeur de l’information, ce qui signifie que l’enregistrement de la phase de la lumière diffusée par un objet peut reconstituer sa forme 3D complète, ce qui ne peut pas être obtenu avec une simple photo.
C’est la base de l’holographie optique. Mais le problème est que la résolution spatiale de la photo/hologramme est limitée par la longueur d’onde de la lumière, autour ou juste au-dessous de 1 µm (0.001 mm). C’est une résolution suffisante pour les objets macroscopiques, mais elle montre vite ses limites dans le domaine de la nanotechnologie.
Une technique holographique basée sur les interactions électrons-photons
Des chercheurs du laboratoire de Fabrizio Carbone à l’EPFL, en Suisse, ont mis au point une méthode permettant de voir comment la lumière se comporte à la plus petite échelle, bien au-delà des limites de longueur d’onde. Les chercheurs ont utilisé le support photographique le plus inhabituel : les électrons à propagation libre. La recherche a été publiée dans la revue Science Advances.
Cette vidéo présente les résultats et enjeux de l’étude :
Utilisé via leur microscope électronique ultrarapide, le procédé peut coder des informations quantiques dans un motif lumineux holographique piégé dans une nanostructure, et repose sur un aspect exotique d’interaction électron-lumière. Les scientifiques ont utilisé la nature quantique de l’interaction électron-lumière pour séparer les faisceaux d’électrons de référence et d’imagerie électroniques en énergie, plutôt qu’en espace.
Cela permet désormais d’utiliser des impulsions lumineuses pour chiffrer des informations sur la fonction d’onde électronique, qui peuvent être cartographiées avec une microscopie électronique à transmission ultra-rapide. La nouvelle méthode peut apporter deux avantages importants : premièrement, les informations sur la lumière elle-même, ce qui en fait un outil puissant pour l’imagerie de champs électromagnétiques, avec une précision attoseconde et nanométrique dans le temps et dans l’espace.
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Deuxièmement, le procédé peut être utilisé dans des applications d’informatique quantique pour manipuler les propriétés quantiques d’électrons libres.
Manipuler la lumière à l’échelle nanométrique : une voie vers l’informatique quantique
« L’holographie conventionnelle peut extraire des informations 3D en mesurant la différence de distance parcourue par la lumière de différentes parties de l’objet » explique Fabrizio Carbone. « Mais cela nécessite un faisceau de référence supplémentaire provenant d’une direction différente pour mesurer l’interférence entre les deux. Le concept est identique à celui des électrons, mais nous pouvons maintenant obtenir une résolution spatiale plus élevée en raison de leur longueur d’onde beaucoup plus courte ».
« Par exemple, nous avons pu enregistrer des films holographiques d’objets en mouvement rapide en utilisant des impulsions électroniques ultra-courtes pour former les hologrammes » ajoute-t-il. Au-delà des calculs quantiques, la technique présente la résolution spatiale la plus élevée par rapport aux solutions alternatives et pourrait changer la façon dont nous envisageons la lumière dans la vie quotidienne.
« Jusqu’à présent, la science et la technologie se limitaient aux photons à propagation libre, utilisés dans les dispositifs optiques macroscopiques. Notre nouvelle technique nous permet de voir ce qui se passe avec la lumière à l’échelle nanométrique, première étape de la miniaturisation et de l’intégration de dispositifs de lumière sur des circuits intégrés » conclut Carbone.