Ce qui pourrait sembler comme être une vision futuriste de ville flottante pour milliardaires où la technologie et l’architecture règnent en maîtres, pourrait prochainement être une solution concrète à plusieurs des défis les plus pressants au monde à l’heure actuelle.
Mercredi dernier, lors d’une réunion des Nations Unies, un groupe de constructeurs, d’ingénieurs et d’architectes a présenté le concept d’une ville flottante dite abordable. Contrairement à certains cas précédents où ces conceptions futuristes avaient suscité le scepticisme dès la première heure, Maimunah Mohd Sharif, directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), a déclaré que l’ONU soutiendrait ce projet à terme.
« Tous les membres de l’équipe veulent réellement construire ces bâtiments », a déclaré Marc Collins, directeur d’Oceanix, une société qui construit des structures flottantes.
L’entreprise en question estime que le projet serait en mesure de prévenir plusieurs menaces, notamment celle provenant de l’élévation du niveau de la mer. À savoir que les structures elles-mêmes seraient conçues de manière à résister à toutes sortes de catastrophes naturelles, y compris des inondations, des tsunamis et des ouragans de catégorie 5.
Voici à quoi pourrait ressembler cette ville, si le projet venait effectivement à voir le jour :
Le concept, connu sous le nom d’Oceanix City, a été réalisé par le célèbre architecte Bjarke Ingels, en collaboration avec Oceanix. Bien que ce projet ait encore besoin de financement, il s’agit en gros d’une véritable « boîte à outils » pour les investisseurs.
La ville serait essentiellement composée d’une véritable collection de plates-formes hexagonales, dont chacune peut contenir environ 300 habitants. À savoir que les hexagones sont largement considérés comme l’une des formes architecturales les plus efficaces (s’inspirant notamment des ruches d’abeilles). De plus, en concevant chaque plate-forme comme un hexagone, les constructeurs espèrent minimiser leur utilisation de matériaux.
Les concepteurs considèrent un groupe de six plates-formes comme un « village », et la ville dans sa totalité contiendrait six villages, pour un total d’environ 10’000 habitants.
L’architecte Ingels est surtout connu pour des projets individuels tels que le parc public Superkilen à Copenhague, ou une paire de tours sinueuses à New York. Mais ce dernier a déclaré que la conception d’une ville entière lui donnait la possibilité d’étendre sa vision : « À l’échelle d’une ville, vous pouvez faire bien plus ! ».
Il faut également savoir que ces villages n’autoriseraient ni voitures, ni camions (ou tout autre véhicule) à haute énergie. La ville ne contiendrait aucun camion à ordures non plus. Au lieu de cela, des tubes pneumatiques permettraient le transport des déchets vers une station de tri, où ils pourraient être identifiés, recyclés et/ou réutilisés. « Cela ne ressemblerait pas à Manhattan. Il n’y a pas de voitures », a déclaré Collins.
Cependant, la conception pourrait autoriser des véhicules sans conducteur et la ville pourrait expérimenter de nouvelles technologies telles que les livraisons effectuées par le biais de drones.
Le concept appelle également à une sorte « d’agriculture marine », ce qui impliquerait une culture sous la surface de l’eau. Les systèmes aquaponiques utiliseraient les déchets pour fertiliser les plantes, tandis que les fermes situées techniquement sous l’eau généreraient des produits alimentaires tout au long de l’année. Ces deux technologies pourraient ainsi contribuer à maintenir l’autonomie de la ville lors d’un ouragan ou d’une autre catastrophe naturelle. Dans l’ensemble, l’objectif est de réduire les déchets et de produire toute la nourriture nécessaire pour nourrir tous les habitants de la ville.
Bien qu’on parle de « ville flottante », la communauté serait en réalité amarrée au fond de l’océan. En effet, Oceanix envisage que les villages seraient situés à environ un kilomètre et demi des principales villes côtières. Les plates-formes pourraient également être remorquées vers des endroits plus sûrs en cas de catastrophe.
Les plate-formes seraient soutenues par du Biorock, un matériau créé en exposant les minéraux sous-marins à un courant électrique : cela conduit notamment à la formation d’un revêtement de calcaire qui est plus dur que le béton, mais qui peut tout de même encore flotter. Cette matière devient plus résistante et peut même être réparée tant qu’elle est toujours exposée au courant. Cela lui permet notamment de résister aux intempéries.
La ville pourrait également contenir un système aquifère qui pourrait extraire de l’eau propre à partir de l’air. En cas de catastrophe, les générateurs de machines pourraient extraire l’air de l’atmosphère, le condenser en eau et le filtrer pour détecter les impuretés telles que le métal ou les bactéries.
Il est également à savoir que la ville ne contiendrait aucun gratte-ciel ou construction très haute : le but est de garder un centre de gravité bas. En effet, les bâtiments auraient au maximum entre quatre et sept étages.
En plus des maisons, il y aurait également un centre spirituel, un centre culturel ainsi qu’une bibliothèque communale dans la ville. Les résidents pourraient également louer des ordinateurs et des vélos, ainsi que des livres.
Tous les bâtiments présents seraient construits avec des matériaux durables (comme le bois et le bambou par exemple). De plus, ces derniers sont conçus spécialement pour pouvoir être désassemblés afin que les générations futures d’architectes puissent reconfigurer le concept.
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Ingels a qualifié sa vision de la ville de « pragmatisme utopique » : l’idée que nous pouvons accomplir de grands exploits de conception de manière concrète et pratique.
Bien entendu, un tel style de vie (sur l’eau) ne serait pas adapté à toutes et à tous, et tout le monde n’aurait pas forcément les moyens d’aller y habiter, mais ce type d’habitation qui permettrait de survivre à de nombreux types de catastrophes naturelles est un concept précieux pour le bien de l’humanité.
Bien qu’il soit extrêmement difficile de mettre en place un tel projet de ville flottante sur l’eau, celui-ci est pourtant à portée de main (concrètement). « Je le vois, à bien des égards, comme notre répétition générale d’Apollo 10 », a déclaré Victor Kisob, directeur exécutif adjoint d’ONU-Habitat.
À savoir que de nombreux concepteurs du projet partagent cette vision, y compris Ingels : « Il s’agit d’exploration. Ce sera une incroyable expérience prototype pour certains des défis auxquels nous devrons faire face sur Mars », a-t-il déclaré.