L’origine de l’intolérance au gluten enfin identifiée : une piste prometteuse pour traiter la maladie

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Une nouvelle étude révèle que les cellules épithéliales tapissant la paroi interne de l’intestin jouent un rôle clé dans l’activation de la réponse immunitaire dans l’intolérance au gluten (ou maladie cœliaque). En effet, on pensait jusqu’à présent que cette réponse impliquait uniquement les cellules immunitaires. Les cellules épithéliales déclenchent en outre une plus forte signalisation lorsque la réaction au gluten s’accompagne de la présence d’agents pathogènes.

Affectant environ 2 % de la population en Europe, la maladie cœliaque est caractérisée par une intolérance marquée pour tout aliment contenant du gluten (ceux à base de blé, de seigle ou d’orge). Elle se manifeste par d’intenses douleurs intestinales, des ballonnements, de la diarrhée et parfois même des reflux gastriques ou des vomissements. Ces symptômes entravent l’absorption des nutriments et peuvent sur le long terme provoquer d’autres problèmes de santé graves, tels que l’ostéoporose, la stérilité et divers cancers du tube digestif.

Bien qu’elle ait été initialement considérée comme un trouble d’hypersensibilité alimentaire, elle est désormais davantage considérée comme une maladie auto-immune en raison de nombreuses similitudes avec celles spécifiques aux tissus (comme le diabète de type 1 et la polyarthrite rhumatoïde). Ces maladies sont généralement associées au complexe majeur d’histocompatibilité humain (HLA), facilitant la reconnaissance d’antigènes par les lymphocytes T. En outre, environ 90 % des patients diagnostiqués avec la maladie cœliaque sont porteurs de gènes codant pour la protéine HLA-DQ2.5, tandis que les 10 % restants portent un gène codant pour la HLA-DQ8.

Cependant, les mécanismes sous-tendant ces associations ne sont pas clairs, car les personnes exprimant les gènes HLA ne développent pas nécessairement une intolérance au gluten et peuvent plutôt souffrir d’autres maladies auto-immunes. D’un autre côté, la maladie est également caractérisée par des lésions au niveau du tissu épithélial de la paroi intestinale. Toutefois, on ne sait pas exactement de quelle manière ces lésions sont impliquées dans les réponses immunitaires caractéristiques de la maladie.

Ce manque de compréhension entrave considérablement le développement de traitements. En conséquence, « la seule façon de traiter la maladie cœliaque aujourd’hui est d’éliminer complètement le gluten de l’alimentation », explique dans un communiqué de l’Université McMaster (à Hamilton, au Canada) la coauteure de la nouvelle étude, Elena Verdu, du Farncombe Family Digestive Health Research Institute.

Or, « c’est difficile à réaliser et les experts s’accordent à dire qu’un régime sans gluten est insuffisant », ajoute l’experte. Afin d’étudier des pistes potentielles pour le développement de nouveaux traitements, Verdu et ses collègues ont exploré plus avant l’implication des cellules épithéliales intestinales dans la réaction immunitaire au gluten. Les résultats de l’étude sont détaillés dans la revue Gastroenterology.

Une réponse immunitaire accentuée en présence d’agents pathogènes

L’équipe de la nouvelle étude a étudié les interactions entre les cellules épithéliales, le gluten et les lymphocytes T dans des monocouches d’organoïdes exprimant la HLA-DQ2.5. Cela permet notamment d’analyser de manière isolée les différentes interactions moléculaires au niveau des cellules épithéliales, ce qui serait impossible in vivo étant donné la complexité de l’environnement intestinal naturel.

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Résumé graphique de l’étude. © Sara Rahmani et al.

Pour créer les organoïdes, ils ont cultivé des cellules épithéliales de souris génétiquement modifiées pour exprimer la protéine HLA-DQ2.5. Les réponses immunitaires ont été analysées en les exposant à des cytokines inflammatoires et à du gluten prédigéré ou non. « Cela nous a permis de déterminer précisément la cause et l’effet et de prouver exactement si et comment la réaction a lieu », explique Tohid Didar de l’École de génie biomédical de l’Université McMaster, auteur correspondant de l’étude.

Les chercheurs ont constaté que bien que non incluses dans la catégorie des cellules immunitaires, les cellules épithéliales jouent un rôle essentiel dans l’activation de la réponse immunitaire dans la maladie coeliaque, notamment la prolifération de cellules T et la sécrétion de cytokines inflammatoires.

Fait étonnant, le gluten métabolisé par Pseudomonas aeruginosa (une bactérie opportuniste pouvant provoquer divers types d’infections) a augmenté la prolifération et l’activation des cellules T. Les experts en ont déduit que l’activation immunitaire par les cellules épithéliales est plus élevée en présence d’agents pathogènes. Cela signifie qu’il pourrait être possible de détecter l’agent pathogène chez une personne à risque de développer la maladie et d’inhiber ses interactions avec le gluten et l’épithélium intestinal pour prévenir la maladie.

Selon les experts, ces résultats suggèrent que les cellules épithéliales pourraient être des cibles prometteuses pour le traitement de la maladie. Cela permettrait par exemple de moduler à la fois l’immunité adaptative (impliquant les lymphocytes T et B) et innée (qui ne nécessite pas de présentation d’antigène et implique les macrophages et les cellules neutrophiles) chez les patients souffrant de la maladie. « Localiser précisément l’étincelle de la réponse immunitaire pourrait stimuler la recherche sur l’administration de médicaments pour inhiber ce rôle nouvellement connu de l’épithélium, en utilisant des médicaments déjà en phase d’essais cliniques », conclut Verdu.

Source : Gastroenterology

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