Origine de la vie : une étude révèle que le rayonnement gamma peut créer les éléments constitutifs de la vie (à partir de simples gaz)

Des réactions ayant probablement contribué à l’émergence de la vie.

rayons gamma molecules organiques
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Une étude révèle que les rayonnements gamma peuvent transformer le méthane largement présent dans l’espace en une gamme de molécules complexes, telles que des hydrocarbures et des acides aminés, à température ambiante. Ces réactions joueraient probablement un rôle dans la formation et la distribution des molécules organiques complexes dans l’Univers et, par extension, contribueraient à l’émergence de la vie.

Selon une hypothèse largement acceptée, la vie a émergé à partir de molécules organiques complexes provenant de l’espace. Ces molécules auraient évolué à partir de molécules simples largement présentes dans le cosmos. Les rayonnements cosmiques, tels que les rayons gamma et les rayons X, peuvent fournir l’énergie nécessaire à ce type de réactions chimiques.

« Les rayons gamma, des photons à haute énergie que l’on retrouve couramment dans les rayons cosmiques et dans la désintégration des isotopes instables, fournissent une énergie externe qui permet de déclencher des réactions chimiques de molécules simples dans les enveloppes glacées de la poussière interstellaire et des grains interstellaires glacés », explique Weixin Huang, de l’Université des sciences et technologies de Chine, au Wiley Online Library. « Cela peut donner naissance à des molécules organiques plus complexes, probablement à partir du méthane (CH4) – qui est largement présent dans tout le milieu interstellaire ».

Ces molécules organiques sont principalement constituées de carbone (C), d’hydrogène (H), d’oxygène (O) et d’azote (N), le CH4 agissant comme une source de C et de H. Des expériences ont montré que le CH4 solide produit des hydrocarbures complexes (jusqu’à 7 atomes de carbone et 16 atomes d’hydrogène) en étant exposé à des rayonnements gamma et à une température de -196 °C. Des hydrocarbures à 22 atomes de carbone peuvent aussi se former en exposant le méthane à 5 keV de rayonnements gamma à -268 °C.

Cependant, la plupart des études visant à décrypter ces processus cosmiques ont été réalisées dans des conditions simulées de vide spatial et à de très basses températures. Or, la Terre et les autres planètes situées dans la zone habitable de leur système stellaire, connaissent des conditions de pressions et de températures plus élevées et le CH4, ainsi que d’autres molécules simples, y existent sous forme de gaz et de liquide.

Huang et ses collègues estiment que les réactions se déroulant dans des conditions plus proches de la Terre et de ces zones habitables sont plus susceptibles de contribuer à la formation de molécules organiques complexes potentiellement à l’origine de la vie. « La réactivité [des molécules simples] induite par les rayons cosmiques et les particules énergétiques peut être responsable de l’évolution des molécules complexes sur ces grands corps solides et même de l’origine de la vie, mais n’a été étudiée que de manière occasionnelle », indiquent-ils dans leur étude, récemment publiée dans la revue Angewandte Chemie.

Des réactions accélérées en présence d’eau et d’oxygène

L’équipe de recherche a étudié les réactions du méthane dans les phases gazeuse et aqueuse aux rayonnements gamma à haute énergie et à température ambiante. La désintégration isotopique instable du cobalt 60 a également été utilisée en tant que source d’énergie pour convertir efficacement le CH4. Les effets de l’ajout d’autres composés, tels que l’eau et l’oxygène, ont également été évalués.

Les chercheurs ont constaté que la composition et le rendement en molécules complexes varient selon les matières premières. Le méthane pur exposé au rayonnement gamma donne un rendement très faible et ne produit que de l’éthane (C2H6), du propane (C3H8) et de l’hydrogène. En revanche, la présence de l’oxygène accélère la réaction et augmente le rendement en produisant du dioxyde de carbone (CO2) et du monoxyde de carbone (CO), ainsi que de l’éthylène (C2H4) et de l’eau. En présence d’eau et dans sa phase aqueuse, le méthane produit de l’acétone (C3H6O) et de l’alcool butylique tertiaire ((CH3)3COH), tandis qu’il donne de l’éthane et du propane en phase gazeuse.

Avec l’ajout d’ammoniac, la réaction produit des molécules encore plus complexes telles que la glycine (C2H5NO2), un acide aminé présent dans l’espace. « Sous l’effet des rayons gamma, la glycine peut être produite à partir de méthane, d’oxygène, d’eau et d’ammoniac, des molécules que l’on trouve en grande quantité dans l’espace », explique Huang. Ces résultats suggèrent que les radicaux O2 et OH jouent un rôle essentiel dans la vitesse et le rendement des réactions, et ce rôle s’exerce indépendamment de la température. Ces réactions seraient ainsi susceptibles de se produire fréquemment dans l’espace.

gamma radiation
Résumé graphique de la découverte présentée dans l’étude. © Fang et al.

Une plus grande sélectivité en présence de particules solides

Par ailleurs, la présence de particules solides composant la poussière interstellaire, telles que le dioxyde de silicium, l’oxyde de fer, le silicate de magnésium et l’oxyde de graphène, modifie la sélectivité des produits obtenus. Le dioxyde de silicium permet par exemple une conversion du méthane en acide acétique (CH3COOH) avec un taux de sélectivité de 82 %. Les experts suggèrent que la variabilité de la composition de la poussière cosmique aurait donc pu contribuer à la différence de distribution des molécules organiques complexes dans l’espace.

Ces observations apportent des éléments nouveaux quant à l’évolution des molécules organiques complexes dans l’Univers. Elles pourraient aussi ouvrir la voie à la conversion plus efficace et à moindre coût du méthane dans le milieu industriel. « Le rayonnement gamma étant une source d’énergie facilement disponible, sûre dans un contexte contrôlé et durable, il pourrait s’agir d’une nouvelle approche pour utiliser le méthane comme source de carbone pour une conversion efficace en produits à valeur ajoutée dans des conditions douces, un défi de longue date pour la chimie de synthèse industrielle », conclut Huang.

Source : Angewandte Chemie

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