Cette image, et d’autres similaires, sont rapidement devenues virales sur les réseaux sociaux ces derniers jours. Pourquoi ? Car ce que l’on croirait être une photo en couleur est en réalité en noir et blanc. Les seules couleurs apparentes sont celles d’un quadrillage placé sur l’image de base, dont les traits sont colorés sélectivement pour créer l’illusion de colorisation globale.
La première image en question a été créée par Øyvind Kolås en tant qu’expérience visuelle. La technique développée par Kolås, artiste multimédia et développeur de logiciels, a été nommée par ce dernier « illusion de grille d’assimilation de couleurs ». Il s’agit de créer un effet de colorisation simplement en plaçant une grille composée de lignes sélectivement colorées sur une image en noir et blanc.
À la différence d’une colorisation numérique standard, le quadrillage agit ici tout autrement pour donner une illusion des couleurs naturelles. Si vous regardez de près, les couleurs des traits sont très saturées et grossières, elles ne correspondent pas à la couleur que vous percevez de façon globale lorsque vous vous éloignez.
Il s’agit d’un effet d’optique basé sur des traits aux couleurs saturées, de sorte à créer une illusion (et donc à berner votre cerveau). À la limite entre colorisation numérique et coloriage. Ce qui est impressionnant ici, c’est à quel point l’artiste a réussi à créer un effet de colorisation globale à l’aspect naturel tout en espaçant au maximum les traits du quadrillage.
« Une grille colorée sursaturée superposée sur une image en niveaux de gris fait que les cellules en niveaux de gris sont perçues comme ayant une couleur », a déclaré Kolås sur sa page Patreon.
Un effet d’optique basé sur le « filtre passe-bas » de notre système de perception des couleurs
Selon Bart Anderson, scientifique en vision de l’Université de Sydney, l’effet que nous voyons dans cette illusion n’est pas particulièrement surprenant.
« Selon les scientifiques de la vision, notre système de vision des couleurs fonctionne comme s’il était équipé d’un filtre « passe-bas ». C’est-à-dire qu’étant donné que de nombreux champs réceptifs codant la couleur sont assez volumineux, ils doivent être « lissés » et « généralisés » », a déclaré Anderson à ScienceAlert. « Les grilles sont donc ici « moyennées » avec le fond achromatique, et les couleurs sont ensuite attribuées aux parties correspondantes de l’image ». Ceci crée alors une illusion de colorisation globale et presque naturelle.
En d’autres termes, notre cerveau « compresse » et simplifie les informations visuelles lorsque nous observons une scène, nous donnant une impression générale de ce qu’elles contiennent, si nous ne prenons pas le temps d’examiner de près les objets.
Bien que selon Kolås, les grilles offrent le meilleur effet, il s’est également amusé à réaliser l’illusion d’optique en utilisant des géométries alternatives comme des points et des lignes.
« Le nuage de points apporte une belle analogie à la technique du demi-ton, utilisée en imprimerie, dans laquelle l’assimilation des couleurs aide le mélange optique des couleurs, qui se produit déjà avant que notre système visuel ne soit impliqué » explique Kolås.
Le demi-ton (halftone en anglais), est une technique utilisée en imprimerie qui permet de donner l’illusion de plusieurs niveaux de gris ou de couleurs. Les imprimantes ne pouvant imprimer que des points d’encre, elles les arrangent de telle sorte que l’œil ne distingue plus ces derniers, mais les intègre pour donner une illusion de plusieurs niveaux de gris (ou de couleurs pour l’impression couleur).
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Un exemple d’utilisation de lignes diagonales pour créer le même effet :
Une autre image, cette fois-ci avec des lignes horizontales. On peut voir que les couleurs nous apparaissent tout aussi bien que dans les trois premiers cas.
Another one, with horizontal lines instead of a grid. pic.twitter.com/sNKSBBkkqT
— ̐🐿ṕ̒ͪͬͯ̐̐̐̐̐̚ȉ̓̈̅̄̓̀p͒̍̚p̏͗̊̔͒̐̐í͆͆̓ͮ̔ͮ͆n̒͐̀͆ (@hodefoting) July 25, 2019
Mais cet effet ne s’arrête pas qu’aux images statiques, il peut aussi être appliqué à des vidéos. Comme le montre Kolås dans la séquence ci-dessous, une scène en mouvement avec la superposition de grille est en mesure de tromper le cerveau en lui faisant croire qu’il s’agit d’images en couleur :