Des physiciens du MIT ont développé une architecture de graphène rhomboédrique dans laquelle les électrons peuvent se déplacer sur cinq voies distinctes, améliorant ainsi nettement la conductivité du matériau. Cette réalisation a pour principal avantage de permettre une telle conductivité au sein du graphène rhomboédrique sans nécessiter l’induction d’un champ magnétique.
Il y a deux ans, une équipe du MIT a mis au point un nouveau matériau appelé « graphène rhomboédrique à couches multiples ». Ce dernier (un type particulier de graphite, le matériau composant les mines de crayon) est composé de plusieurs couches de graphène empilées. Ces mêmes chercheurs ont continué d’étudier le matériau et affirment que chaque nouvelle expérience et analyse révèle de nouvelles propriétés et possibilités d’application.
Dans une précédente étude, ils ont découvert que le graphène rhomboédrique présente des propriétés topologiques faisant que les électrons peuvent se déplacer librement autour des bords du matériau, mais pas au centre. Ce comportement permet ainsi une circulation très efficace le long de certaines « voies ». C’est ce qui les a poussés à développer leur « autoroute pour électrons ».
Dans cette précédente étude, il avait cependant été nécessaire d’appliquer un champ magnétique extrêmement puissant pour orienter et maintenir le mouvement des particules. En revanche, dans une nouvelle expérience détaillée dans la revue Science, les chercheurs sont parvenus à reproduire ce comportement de conductivité accrue sans l’application d’un champ magnétique. Cela signifie que le matériau est désormais plus viable, car son application est beaucoup moins complexe et les coûts en sont donc réduits. En effet, selon les chercheurs, il devrait être envisageable de l’intégrer dans certains dispositifs électroniques ultra-efficaces, tels que des capteurs ou des dispositifs portables, où l’efficacité énergétique est essentielle.
L’ajout de disulfure de tungstène
L’élément clé de cette avancée réside sans doute dans l’ajout de disulfure de tungstène (WS2), un composé aux propriétés semi-conductrices. Les chercheurs ont travaillé avec du graphène rhomboédrique à cinq couches, d’une épaisseur de quelques nanomètres.
L’interaction entre le graphème et le WS2 a permis de modifier la façon dont les électrons se déplacent, permettant un flux plus efficace et contrôlé. À savoir que cette architecture est réalisable avec d’autres matériaux, mais selon les chercheurs, il serait difficile d’y inclure plus d’une voie électronique. « Les autres matériaux ne peuvent supporter qu’une seule voie de circulation en bordure du matériau, et nous l’avons soudainement augmenté à cinq avec ce type de graphène », explique l’auteur principal de l’étude dans un communiqué du MIT.
Pour mener leur expérience, les chercheurs se sont servis d’un microscope spécialisé conçu au MIT afin d’isoler et étudier le graphène rhomboédrique. Cet appareil les aide à caractériser rapidement et à moindre coût les propriétés des matériaux au niveau nanométrique.
Un défi de taille pour améliorer les conditions d’apparition de l’effet Hall
Le phénomène obtenu au sein du graphène rhomboédrique est appelé effet Hall quantique anormal, dans lequel les électrons se déplacent sur les bords du matériau sans résistance (c’est-à-dire sans perte d’énergie) et sans besoin de l’application d’un champ magnétique externe. Pour l’obtenir, les températures doivent être très basses, d’environ 2 Kelvins (-271,5 °C), soit à peine en dessus du zéro absolu. Pourtant, cette condition thermique représente un défi de taille pour les chercheurs. En effet, il sera nécessaire d’obtenir ce phénomène au sein des matériaux avec des températures bien plus élevées pour des applications pratiques.