Des physiciens déterminent quels sont les objets les « plus quantiques »

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| Mark Garlick/Getty
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Qu’ils soient des objets microscopiques ou macroscopiques, tous les systèmes physiques présentent des caractéristiques quantiques. Cependant, tous n’ont pas le même aspect quantique. On pourrait ainsi dire que certains objets sont « plus quantiques » que d’autres. Des physiciens théoriciens canadiens ont donc cherché à développer un moyen de déterminer la « quanticité » d’un objet (son degré quantique en quelque sorte), afin de les organiser du moins quantique au plus quantique. Au-delà de l’aspect purement mathématique, ces résultats pourraient déboucher sur de véritables applications en termes de métrologie quantique et de détection ultra-précise.

Pour la première fois, des physiciens ont trouvé un moyen de définir mathématiquement le degré quantique que tout système physique — que ce soit une particule, un atome, une molécule ou même une planète. Le résultat suggère un moyen de quantifier la « quanticité » (quantumness, en anglais) et d’identifier « les états les plus quantiques » d’un système, que l’équipe appelle les « rois et reines de la quanticité ». En plus d’approfondir notre compréhension de l’Univers, les travaux pourraient trouver des applications dans les technologies quantiques telles que les détecteurs d’ondes gravitationnelles et les appareils de mesure ultra-précis.

Du classique au quantique : un continuum mesurable

Au cœur du monde microscopique, les objets quantiques peuvent montrer des comportements étranges. Par exemple, lorsqu’une particule est dans un état de superposition, elle possède simultanément une infinité d’états quantiques tant qu’elle n’a pas été mesurée. De la même manière, en vertu des probabilités contenues dans sa fonction d’onde, une particule peut spontanément traverser une barrière d’énergie normalement insurmontable (effet tunnel quantique).

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Les objets macroscopiques, par contre, suivent les règles de la physique classique. Les chercheurs réfléchissent depuis longtemps à cet étrange état des choses, où certaines entités du cosmos peuvent être définies de manière classique, tandis que d’autres sont soumises à des lois quantiques probabilistes.

Mais « selon la mécanique quantique, tout est de la mécanique quantique. Ce n’est pas parce que vous ne voyez pas ces choses étranges tous les jours qu’elles ne sont pas présentes », déclare Aaron Goldberg, physicien à l’Université de Toronto. Ce que Goldberg implique, c’est que les objets classiques comme les boules de billard sont également des systèmes quantiques. Il existe donc une probabilité infiniment faible qu’elles puissent, par exemple, traverser le côté d’une table de billard. Cela suggère qu’il existe un continuum, avec « classicisme » à une extrémité et « quanticité » de l’autre.

Quantifier la « quanticité » des objets : un exercice difficile

Les tentatives précédentes de quantification de la quanticité ont toujours porté sur des systèmes quantiques spécifiques, comme ceux contenant des particules de lumière, et donc les résultats ne pouvaient pas nécessairement être appliqués à d’autres systèmes qui comprenaient différentes particules comme les atomes. Goldberg, Luiz Sanchez-Soto et leur équipe ont plutôt cherché une manière généralisée de définir les extrêmes dans les états quantiques.

« Nous pouvons appliquer cela à n’importe quel système quantique — atomes, molécules, lumière ou même une combinaison de ces éléments — en utilisant les mêmes principes directeurs », indique Goldberg. L’équipe a découvert que ces extrêmes quantiques pouvaient se présenter sous au moins deux types différents.

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Graphique montrant les « rois et reines de la quanticité » en fonction de la valeur de la dimension S, de l’entropie de Werhl (une mesure spécifique de l’entropie pour les états quantique) et du moment M. Ces formes ne représentent pas des objets en tant que tels, mais des configurations d’états quantiques pouvant se référer à certains objets. Crédits : Aaron Z. Goldberg et al. 2020

Alors qu’est-ce que cela signifie exactement pour un objet d’être « le plus quantique » ? C’est là que le travail devient délicat, car il est très mathématique et difficile à visualiser. Mais Pieter Kok, physicien à l’Université de Sheffield en Angleterre, qui n’a pas participé à la rédaction du nouveau document, a suggéré un moyen de le comprendre : l’un des systèmes physiques les plus élémentaires est un simple oscillateur harmonique — c’est-à-dire une boule à l’extrémité d’un ressort qui va et vient : une particule quantique serait à l’extrême classique si elle se comportait comme ce système à billes et à ressorts, observé à des moments spécifiques en fonction de l’élan initial reçu. Mais si la particule devait être étalée mécaniquement de manière à ne pas avoir de position bien définie et à être trouvée tout au long du trajet du ressort et de la bille, elle serait dans l’un de ces états quantiques extrêmes.

Des applications en métrologie quantique et pour la détection ultra-précise

Malgré leur particularité, Kok considère que les résultats sont très utiles et espère qu’ils trouveront une large application. Savoir qu’il existe une limite fondamentale où un système agit de la manière la plus quantique possible, c’est comme savoir que la vitesse de la lumière existe. Cela impose des contraintes sur des choses compliquées à analyser, explique Kok.

Goldberg ajoute que les applications les plus évidentes devraient provenir de la métrologie quantique, où les ingénieurs tentent de mesurer des constantes physiques et d’autres propriétés avec une extrême précision. Les détecteurs d’ondes gravitationnelles, par exemple, doivent pouvoir mesurer la distance entre deux miroirs avec une précision supérieure à 1/10’000e de la taille d’un noyau atomique. En utilisant les principes de l’équipe, les physiciens pourraient être en mesure d’améliorer cet exploit. Mais les résultats pourraient également aider les chercheurs dans des domaines tels que les communications par fibre optique, le traitement de l’information et l’informatique quantique.

Sources : AVS Quantum Science

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