Première mondiale : la téléportation quantique entre processeurs distants est devenue réalité !

Le problème d’évolutivité des ordinateurs quantiques enfin résolu ?

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Des chercheurs de l’Université d’Oxford ont démontré pour la première fois la faisabilité du calcul quantique distribué en utilisant une interface de réseau photonique. Ils sont parvenus à connecter deux processeurs quantiques distincts pour les faire fonctionner comme un seul, sans en compromettre les performances. Cette prouesse technique pourrait potentiellement résoudre le problème d’évolutivité des ordinateurs quantiques pour pouvoir traiter des millions de qubits, même avec des infrastructures relativement limitées.

Les ordinateurs quantiques ont le potentiel de transformer de nombreux domaines, de la cryptographie au développement de médicaments, en passant par les modélisations climatiques. Reposant sur la superposition quantique des qubits (l’équivalent des bits en informatique classique), leur puissance de calcul permettrait à terme de réaliser en quelques heures des calculs qui prendraient des centaines d’années aux superordinateurs conventionnels.

Cependant, un ordinateur quantique suffisamment puissant pour de telles applications doit pouvoir traiter des millions de qubits. La technologie est confrontée à un important problème d’évolutivité, car il faudrait un dispositif immense pour pouvoir prendre en charge un tel volume de qubits.

D’autre part, quelle que soit la plateforme utilisée, augmenter le nombre de qubits tout en maintenant un contrôle et une interconnectivité suffisants constitue une difficulté supplémentaire. À ce jour, les plus puissants des processeurs quantiques disponibles ne peuvent traiter qu’un peu plus d’un millier de qubits.

Des architectures de calcul quantique distribué ont été proposées pour surmonter ces défis. Elles permettraient notamment d’effectuer des calculs quantiques de grande envergure en s’appuyant sur un réseau interconnecté de processeurs quantiques. Chaque processeur héberge un petit nombre de qubits et se connecte avec les autres par le biais de canaux d’information classiques et quantiques. Cela permettrait à la fois de traiter de plus grands volumes de qubits tout en préservant leur stabilité.

Les chercheurs de la nouvelle étude ont démontré la faisabilité de la téléportation quantique par le biais d’une infrastructure distribuée. Bien que la téléportation quantique ait déjà été réalisée auparavant, il s’agirait de la première démonstration de téléportation de portes logiques (les « briques » élémentaires composant un algorithme) à travers un réseau distribué.

« Les précédentes démonstrations de téléportation quantique se sont concentrées sur le transfert d’états quantiques entre des systèmes physiquement séparés. Dans notre étude, nous utilisons la téléportation quantique pour créer des interactions entre ces systèmes distants », explique dans un communiqué Dougal Main, auteur principal de l’étude, détaillée dans la revue Nature. Cette démonstration pourrait établir les bases de l’internet quantique, où les processeurs distants pourraient former un réseau ultrasécurisé et performant.

71 % d’efficacité avec deux processeurs quantiques

La nouvelle architecture de Main et ses collègues comprend des processeurs quantiques contenant chacun un petit nombre de qubits à ions piégés. Ils sont connectés entre eux à l’aide de fibres optiques (utilisant des photons pour la transmission d’information, plutôt que des signaux électriques). Les liaisons photoniques permettent d’intriquer les qubits des processeurs distincts, de sorte à exécuter les portes logiques par le biais de la téléportation quantique.

« En adaptant soigneusement ces interactions, nous pouvons réaliser des portes quantiques logiques – les opérations fondamentales de l’informatique quantique – entre des qubits hébergés dans des ordinateurs quantiques distincts. Cette avancée nous permet de connecter efficacement des processeurs quantiques distincts pour en faire un seul ordinateur quantique entièrement connecté », explique Main.

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a. Schéma d’une architecture informatique quantique distribuée (DQC) comprenant des modules interconnectés photoniquement. b. Les modules se composent d’au moins un qubit de réseau (violet) et d’au moins un qubit de circuit (orange), qui peuvent interagir directement au moyen d’opérations locales. c. Un circuit quantique distribué sur un réseau de petits modules de traitement quantique qui fonctionnent ensemble, comme un seul ordinateur quantique. © Main et al.

Le concept est en fait plus ou moins similaire aux supercalculateurs conventionnels. Ces derniers sont constitués de petits ordinateurs connectés entre eux, permettant d’exploiter en un seul dispositif leurs capacités combinées. D’après les chercheurs, il n’y aurait en théorie pas de limite au nombre de processeurs quantiques pouvant être intégrés au réseau.

La téléportation quantique permet de transférer l’état d’un qubit donné à un autre qubit récepteur. Les mesures au niveau de ce dernier peuvent être modifiées de sorte à correspondre à celles du qubit émetteur, la téléportation étant utilisée pour créer des interactions entre les systèmes distants. Lors de leurs essais, les chercheurs ont obtenu des états de spin correspondant à 86 % aux originaux.

Pour évaluer l’efficacité du nouveau dispositif en matière de calculs, les chercheurs ont exécuté l’algorithme de recherche de Grover. Il s’agit d’un test standard consistant à rechercher un élément spécifique au sein d’un grand ensemble de données non structurées et à comparer la vitesse de calcul à celle d’un ordinateur classique. L’équipe a obtenu une efficacité de 71 % avec deux processeurs quantiques espacés de 2 mètres.

Toutefois, le réseau évalué ne comporte qu’un nombre limité de processeurs quantiques. Les résultats pourraient encore être incertains avec un réseau plus large. Néanmoins, « notre expérience démontre que le traitement de l’information quantique distribuée en réseau est réalisable avec la technologie actuelle », affirme David Lucas, co-auteur de l’étude. « Le développement des ordinateurs quantiques reste un formidable défi technique qui nécessitera probablement de nouvelles connaissances en physique ainsi que des efforts d’ingénierie intensifs au cours des prochaines années », conclut-il.

Source : Nature

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