La Chine détecte des preuves d’eau liquide « récente » sur Mars

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Le rover Zhurong observe son atterrisseur tout en offrant une vue sur le site d’atterrissage. | CNSA
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Le rover chinois Zhurong et l’orbiteur Tianwen-1 qui l’accompagne ont récemment collecté des données qui soutiennent l’hypothèse selon laquelle de l’eau liquide était autrefois présente sur la surface martienne. Des minéraux hydratés trouvés dans la croûte dure de la planète constituent de nouvelles preuves de quantités substantielles d’eau liquide ayant existé lors de la période géologique la plus récente de Mars.

Le rover chinois s’est posé sur Mars en mai 2021, dans la région d’Utopia Planitia, après s’être séparé de l’orbiteur Tianwen-1. Il embarque six instruments scientifiques lui permettant d’effectuer diverses analyses (deux caméras, un spectroscope, une station météo, un détecteur de champ magnétique et un radar pénétrant). Bien qu’il n’y ait pas d’eau liquide à la surface de Mars aujourd’hui, les scientifiques du monde entier supposent depuis longtemps que de l’eau a autrefois coulé sur Mars ; de nombreuses missions, à l’instar de Tianwen-1, ont été envoyées pour rechercher des preuves permettant d’étayer cette hypothèse.

Certaines données récentes suggèrent que de l’eau a pu persister en surface bien plus longtemps que ne le pensaient les experts jusqu’alors. L’an dernier, le Mars Reconnaissance Orbiter (MRO) de la NASA a en effet trouvé des preuves d’un écoulement d’eau beaucoup plus récent, datant d’il y a peut-être deux ou 2,5 milliards d’années — tandis que les précédentes études estimaient que l’eau martienne avait disparu il y a environ trois milliards d’années, soit au tout début de l’Amazonien. Les dernières données de la mission chinoise semblent quant à elles indiquer que de l’eau liquide existait encore il y a environ un milliard d’années.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Un cycle de l’eau particulièrement actif

Selon l’Administration spatiale nationale chinoise, à la date du 15 septembre, la sonde martienne Tianwen-1 était en orbite depuis plus de 780 jours ; le rover Zhurong avait quant à lui parcouru un total de 1921 mètres et accumulé 1480 gigaoctets de données scientifiques brutes. Ses principaux objectifs sont d’étudier la morphologie, la minéralogie, l’environnement spatial, la structure du sous-sol et la distribution eau/glace du sud d’Utopia Planitia.

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Contexte des observations spectrales et images agrandies des roches analysées, qui ont révélé la présence de minéraux hydratés. © Y. Liu et al.

Ce sont les données spectrales infrarouges du détecteur de composition de surface (MarSCoDe) qui ont permis d’identifier des matériaux sulfatés et siliceux hydratés sur le terrain du site d’atterrissage, datant de l’Amazonien. Ces minéraux hydratés sont associés à des roches de couleur claire, interprétées comme étant des duricrusts — de fines couches qui se forment lorsque l’eau souterraine s’évapore et laisse derrière elle des composés salins qui cimentent à leur tour le régolithe de Mars. « Les duricrusts lithifiées suggèrent que leur formation avec de l’eau liquide substantielle provient soit de la remontée des eaux souterraines, soit de la fonte de la glace de subsurface », précise l’équipe chinoise dans Science Advances.

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Modèle schématique du processus de formation de la croûte dure sur le site d’atterrissage de Zhurong. © Y. Liu et al.

La découverte de cette couche de croûte dure — qui s’avère plus épaisse que la croûte dure trouvée sur d’autres sites d’atterrissage martiens, qui elle, a probablement été formée par la vapeur d’eau atmosphérique — suggère qu’Utopia Planitia avait un cycle de l’eau encore actif (et particulièrement intense) il y a quelques centaines de millions d’années de cela.

Ce n’est pas vraiment une surprise (la présence d’eau sur Mars ayant été dévoilée il y a longtemps par l’observation de canaux fluviaux et de deltas à sa surface), mais c’est beaucoup plus récent que ce qu’avaient prédit les scientifiques ! « Nous avons beaucoup de preuves d’eau liquide sur Mars avant l’Amazonien, mais depuis environ 3 milliards d’années, les preuves d’eau liquide à la surface de Mars sont, au mieux, rares », a souligné Alberto Fairén, astrobiologiste au Centre d’Astrobiologie de Madrid, qui n’était pas impliqué dans cette étude.

Une possible vie martienne au cours du dernier milliard d’années

Ces données s’ajoutent aux preuves de plus en plus nombreuses indiquant que la planète rouge a traversé plusieurs cycles d’humidité et de chaleur, et de sécheresse et de froid, et non un unique changement climatique durable et dramatique. « Ces flux et reflux climatiques peuvent avoir été le résultat de volcans actifs ou d’impacts d’autres objets célestes », a déclaré Yang Liu, scientifique planétaire et membre de l’équipe Tianwen-1 au Centre national des sciences spatiales de l’Académie chinoise des sciences, et premier auteur de l’article relatant la découverte.

Utopia Planitia est une vaste plaine de la planète Mars s’étendant dans l’hémisphère nord ; ce fut également le lieu d’atterrissage de la sonde Viking 2, en 1976. Certains scientifiques pensent que la région abritait un océan il y a des centaines de millions d’années. Les minéraux hydratés n’avaient pas été détectés par les précédents orbiteurs ; les données relayées par Zhurong sont donc très importantes.

Les données spectrales ont révélé une absorption à des longueurs d’onde de 1,5 à 2,2 micromètres, caractéristique de minéraux comme l’olivine, le pyroxène et le feldspath ayant été altérés lorsqu’ils ont incorporé de l’eau dans leurs structures chimiques. « Comme l’activité de l’eau liquide a été découverte, nous pensons qu’il peut y avoir eu des conditions climatiques appropriées pour l’origine de la vie ou l’existence de telles conditions au cours du dernier milliard d’années sur Mars », a déclaré Liu Yang au Global Times.

Non seulement la découverte de minéraux hydratés apporte des informations cruciales sur l’histoire géologique et hydrique de la région et l’évolution climatique de Mars, mais les résultats suggèrent également qu’il pourrait y avoir des stocks considérables d’eau dans ces minéraux hydratés. Or, cette eau pourrait être très utile aux futurs explorateurs humains qui se rendront peut-être un jour sur Mars.

L’orbiteur Tianwen-1 continue actuellement son travail d’exploration à distance. L’équipe chinoise espère que le rover fournira lui aussi d’autres données permettant d’éclairer davantage l’histoire hydrique de cette région martienne. Mais l’hémisphère nord de Mars est actuellement plongé dans la saison hivernale ; le rover Zhurong est donc actuellement en hibernation et ne sera réveillé qu’à la fin de l’année, lorsque les conditions climatiques seront plus clémentes.

Source : Y. Liu et al., Science Advances

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