Formulée au cours des années 1970, l’idée de la matière noire représente un domaine de recherche extrêmement actif. Plusieurs expériences réparties à travers le monde traquent les particules potentielles la constituant. Malgré cela, la nature de la matière noire demeure toujours un mystère. Récemment, des physiciens ont proposé une nouvelle hypothèse faisant intervenir les portails gravitationnels. Si leur étude n’a toujours pas été évaluée par les pairs, et doit donc être considérée avec précaution, elle a le mérite d’expliquer simultanément l’origine de deux phénomènes cosmiques.
Des physiciens ont une idée qui pourrait aider à résoudre deux mystères : la raison de l’abondance étrange de rayonnement de très haute énergie provenant du centre de notre galaxie et la nature de la matière noire. Et cette idée fait intervenir les portails gravitationnels. Lorsque deux particules de matière noire (quelles qu’elles soient) sont aspirées dans l’un de ces portails, elles s’annihilent l’une l’autre et émettent des rayons gamma d’une grande puissance.
Plus de 80% de la matière de notre univers est d’une forme inconnue du modèle standard de la physique des particules. Les scientifiques l’appellent « matière noire », car elle n’émet pas de lumière. Le premier indice de l’existence de la matière noire date des années 1970, lorsque l’astronome Vera Rubin a remarqué que les galaxies tournaient beaucoup trop rapidement.
Pendant des décennies, les astronomes ne savaient pas s’ils devaient changer leur compréhension de la gravité, ajouter plus de matière baryonique (mais de « nature sombre ») à l’Univers ou inclure un tout nouvel ingrédient. Mais année après année, l’observation a limité les choix. Aucune théorie de la gravité modifiée ne peut expliquer toutes les observations. Et les physiciens ont imposé des limites fermes à la quantité de matière normale dans le cosmos. Cela laisse donc l’hypothèse de la matière noire.
Une étrange abondance de rayons gamma dans les centres galactiques
Dans une étude publiée sur le serveur de préimpression arXiv, les physiciens ont proposé une nouvelle théorie pour expliquer ce qu’est la matière noire et comment elle se comporte. Mais avant de sonder leur idée, il est nécessaire d’introduire un autre élément observationnel. Cet élément se présente sous la forme d’une étrange abondance de rayons gamma émanant du centre de notre galaxie.
Les rayons gamma sont la forme de rayonnement la plus énergétique, et ils n’apparaissent généralement qu’à partir de certains événements à haute énergie, tels que les étoiles qui se transforment en supernova. Mais l’abondance du rayonnement gamma dans le centre galactique est supérieure à ce qui est attendu, étant donné la rareté de ces événements cataclysmiques. Il est donc possible, selon cette théorie, que les rayons gamma émergent comme un sous-produit d’électrons de haute énergie.
Ces électrons beaucoup plus faciles à produire que les rayons gamma directement, émanent d’une source et voyagent à travers le centre galactique. Les électrons eux-mêmes sont indétectables (ils sont très, très petits), mais lorsqu’ils inondent l’espace interstellaire, ils peuvent parfois percuter un photon passant au hasard. Ce photon entre en collision avec l’électron ; la collision augmente tellement l’énergie du photon qu’il se transforme en photon gamma, que nous pouvons observer. Ces collisions expliquent potentiellement les rayons gamma en excès, mais d’où viennent ces électrons de haute énergie ?
Portails gravitationnels : ils transformeraient la matière noire en électrons
Le lien entre ces deux observations porte un nom particulier : les portails gravitationnels leptophiles. La gravité est une interaction élémentaire encore mal comprise, toujours en attente d’une théorie de la gravité quantique pour expliquer ses effets à l’échelle microscopique. Alors peut-être que la gravité, dans des cas extrêmes, peut rassembler deux particules de matière noire et les détruire, les transformant en d’autres particules.
Et selon le modèle théorique esquissé par les chercheurs, peut-être que ces particules de matière noire peuvent se transformer en électrons (qui sont des leptons). D’où la partie « leptophile » du nom, qui signifie « attiré par les leptons ». Selon l’étude, les particules de matière noire peuvent parfois s’annihiler les unes les autres via rien de plus que des interactions gravitationnelles fortuites. Ces interactions fortuites sont connues dans le jargon de la physique sous le nom de « portails gravitationnels », car elles offrent un moyen aux particules d’interagir uniquement par la gravité.
Le produit de cette collision est un électron à haute énergie. Ces interactions seraient beaucoup plus fréquentes dans le centre galactique, où la densité de matière noire est probablement la plus élevée. Ces électrons voyageraient ensuite, frappant finalement un photon de faible énergie et se transformant en un rayon gamma, provoquant l’excès que nous observons.
Cette idée peut en effet sembler invraisemblable, mais étant donné que les physiciens sont dans l’impasse en ce qui concerne la nature de la matière noire, de nouvelles idées sont toujours les bienvenues. Et cette théorie a été spécifiquement conçue pour correspondre à l’observation des rayons gamma. Mais une fois ce mécanisme proposé, permettant aux particules de matière noire de se transformer en matière régulière (leptons, dans ce cas), un travail supplémentaire doit être fait pour voir s’il existe d’autres moyens de tester la théorie.