Le déclin du quotient intellectuel (QI) à l’échelle mondiale est une réalité désormais bien documentée par de nombreuses études. Ce phénomène retient de plus en plus l’attention des chercheurs. Récemment, de nouvelles analyses comparatives menées auprès des adolescents et des jeunes adultes ont mis en évidence une tendance alarmante : une capacité d’attention en recul et une diminution de l’esprit critique.
Devenons-nous réellement moins intelligents, ou cette évolution est-elle le reflet d’autres facteurs ? La question hante les chercheurs depuis des décennies. En 2018, les économistes norvégiens Bernt Bratsberg et Ole Rogeberg ont mis en évidence une baisse progressive du QI en analysant 730 000 tests réalisés en Norvège. Leur étude, publiée dans la revue PNAS, révélait un déclin annuel de 0,33 point.
Plus récemment, en 2023, une méta-analyse portant sur les scores de QI de 300 000 individus issus de 72 pays entre 1948 et 2020 a apporté une nouvelle vue globale sur cette évolution. Entre 1948 et 1985, le quotient intellectuel augmentait en moyenne de 2,4 points par décennie. Mais la tendance s’est inversée à partir de 1986, avec une baisse estimée à 1,8 point par décennie.
Le paysage musical semble également refléter cette évolution. Une étude autrichienne publiée en avril 2024 a montré que les paroles des chansons sont devenues plus simples et répétitives. L’analyse de près de 12 000 morceaux, issus de divers genres musicaux et publiés entre 1980 et 2020, met en évidence un appauvrissement du vocabulaire et des structures textuelles.
Une génération particulièrement affectée
Les dernières données relayées par le Financial Times confirment que les jeunes générations sont en première ligne face à cette tendance. L’étude « Monitoring the Future » de l’Université du Michigan a documenté les difficultés de concentration des jeunes Américains de 18 ans, tandis que le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) a évalué la baisse des compétences d’apprentissage des adolescents de 15 ans à travers le monde.
Les résultats indiquent une baisse de l’attention et une diminution de l’esprit critique chez la génération actuelle. La pandémie de COVID-19, en perturbant les systèmes éducatifs, a exacerbé le phénomène, mais les chercheurs rappellent que ces signes avant-coureurs étaient déjà visibles dès le milieu des années 2010.
Au-delà de la pandémie, d’autres causes identifiées
Si la crise sanitaire a joué un rôle aggravant, elle n’est pas l’unique responsable de cette évolution. La diminution du temps consacré à la lecture est également un facteur clé. En 2022, le National Endowment for the Arts rapportait que seulement 37,6 % des Américains avaient lu un roman ou une nouvelle au cours de l’année écoulée, contre 41,5 % en 2017. Une tendance à la baisse qui se confirme sur le long terme, ce chiffre étant de 45,2 % en 2012.
L’omniprésence des écrans et la transformation des modes d’accès à l’information figurent aussi parmi les explications avancées par les chercheurs. De nombreuses études ont déjà démontré que le temps d’exposition aux écrans nuit au développement du langage chez les enfants et altère les capacités de concentration et de mémorisation chez les jeunes adultes. À cela s’ajoute l’essor de l’intelligence artificielle, qui, en automatisant de plus en plus de tâches cognitives, favorise un phénomène préoccupant : la paresse intellectuelle.
Si la communauté scientifique s’accorde sur le constat d’une baisse du QI mondial, elle souligne également la complexité des causes sous-jacentes. Le Financial Times rappelle qu’il n’existe aucune preuve d’un « dommage irréversible » infligé à l’intelligence humaine. Mais cette tendance soulève des interrogations sur l’évolution des capacités cognitives des générations futures.