Alors que débute aujourd’hui à Montréal la Conférence internationale sur le sida, des chercheurs viennent d’annoncer la guérison d’un patient atteint d’un cancer du sang et du VIH. Traité pour une leucémie, il est le plus âgé des quatre personnes en rémission durable du virus du sida, après avoir reçu des cellules souches d’un donneur présentant une mutation génétique rare.
Surnommé « City of Hope » — comme le centre hospitalier californien où il a été traité —, le patient de 66 ans a vécu avec le VIH pendant plus de 31 ans, soit la période la plus longue par rapport aux trois autres patients séropositifs dont la rémission a été annoncée.
En février dernier, des chercheurs avaient signalé la guérison d’une Américaine, la seule femme dans ce cas à ce jour. En outre, l’AFP rapporte qu’un autre homme, le patient de Düsseldorf, serait également en rémission de la maladie. Pour le considérer « guéri », les médecins attendent cependant de ne déceler aucune trace de VIH pendant plusieurs années de suivi additionnelles.
Comme pour les patients avant lui, le sexagénaire a obtenu une rémission durable du virus après une greffe de moelle osseuse pour traiter un cancer du sang. Début 2019, il a reçu une greffe de cellules souches d’un donneur non apparenté pour une leucémie myélogène aiguë — une forme de leucémie plus fréquente chez les personnes séropositives plus tard dans la vie. Or, le donneur présentait la mutation homozygote CCR5 delta 32, une mutation génétique rare qui confère une résistance au VIH selon le centre City of Hope. Le virus utilise le récepteur CCR5 pour pénétrer et attaquer le système immunitaire, mais la mutation du récepteur permet de bloquer cette voie et d’empêcher la réplication du VIH.
Une lueur d’espoir pour les personnes séropositives plus âgées atteintes de cancer
En mars 2021, le patient a arrêté la prise des antirétroviraux — qui peuvent empêcher la production de nouvelles particules virales, mais sans éliminer le réservoir viral — après s’être vacciné contre la COVID-19. Depuis, il est en rémission du VIH et du cancer du sang, ce qui est porteur d’espoir pour les personnes séropositives plus âgées qui souffrent également d’un cancer, d’après la Dr Jana Dickter, spécialiste des maladies infectieuses à City of Hope.
Il faut savoir qu’avant la greffe allogénique (greffe à partir de cellules d’un donneur), un patient doit passer par au moins une chimiothérapie pour obtenir une rémission de son cancer. Ce patient plus âgé a pu recevoir un régime de chimiothérapie moins intensif avant la greffe, ce qui réduit le risque de complications liées à la transplantation, et « pourrait permettre à des patients séropositifs plus âgés atteints de cancer de bénéficier du traitement », a déclaré Dickter.
Mais il s’agit d’une procédure complexe avec des effets secondaires potentiellement graves, qui ne convient pas pour la plupart des personnes séropositives. En effet, « la première chose que l’on fait dans une greffe de moelle osseuse est de détruire temporairement le système immunitaire du receveur », explique à l’AFP Steven Deeks, spécialiste du VIH à l’Université de Californie. « Vous ne feriez jamais cela si vous n’aviez pas de cancer ».
La nouvelle recherche présentée lors de la conférence, mais pas encore relue par les pairs, devrait donner des caractéristiques biologiques intéressantes sur les cellules infectées par le VIH. « Elles peuvent proliférer mieux que la plupart des autres, sont difficiles à tuer et sont à la fois résilientes et difficiles à détecter », a déclaré M. Deeks, l’un de ses auteurs. « C’est pourquoi le VIH est une infection qui dure toute la vie ».