Quelles sont les chances que d’autres espèces intelligentes existent dans l’Univers ?

probabilité intelligence artificielle
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En octobre 1995, une équipe d’astrophysiciens de l’Observatoire de Haute-Provence a découvert la première exoplanète en orbite autour d’une étoile similaire au Soleil : 51 Pegasi b. Depuis, plus de 4500 exoplanètes ont été confirmées, dans près de 3400 systèmes planétaires différents ; plusieurs milliers de planètes candidates sont également en attente de confirmation. Parmi ces autres mondes, plusieurs sont rocheux, comme la Terre, et situés en zone dite habitable. Il est donc légitime de se demander s’il existe d’autres espèces intelligentes dans l’Univers ou si nous sommes définitivement seuls.

Alors que l’humanité observe les étoiles depuis des siècles, la question de savoir si nous sommes seuls dans l’immensité de l’Univers subsiste. L’idée a d’ailleurs largement inspiré (et continue d’inspirer) la littérature et le cinéma de science-fiction. La plupart des gens (notamment plus d’un tiers des Américains) croient aux extraterrestres, et un sondage Ipsos a révélé que 20% de la population mondiale pense que des « aliens » vivent parmi nous sur Terre, déguisés en humains !

Les chances de trouver une vie ailleurs restent inconnues à ce jour, mais on peut tout de même affirmer que ces « chances » augmentent. Depuis la découverte des premières exoplanètes, les scientifiques n’ont de cesse de déterminer quels sont les mondes les plus susceptibles d’héberger une forme de vie. Par exemple, la vie telle que nous la connaissons nécessite de l’eau liquide, donc une exoplanète trop proche ou trop éloignée de son étoile hôte est moins à même d’abriter des organismes vivants.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Une probabilité qui repose sur la détection de biosignatures dans les atmosphères d’exoplanètes

Nos meilleures chances se trouvent donc du côté des planètes situées en zone habitable. Mais à ce jour, les scientifiques n’ont détecté aucune preuve convaincante d’une éventuelle technologie extraterrestre de pointe, ni avec les télescopes spatiaux, ni via les observatoires terrestres — même si Avi Loeb est persuadé du contraire depuis que l’objet « Oumuama » a frôlé la Terre en 2017. De même, nous n’avons pas décelé la moindre trace de vie, ne serait-ce qu’une minuscule bactérie (en même temps, nous ne disposons pas d’une définition « universelle » de la vie, qui pourrait dès lors prendre une forme inimaginable). Quelles sont réellement nos chances de découvrir un jour une intelligence extraterrestre (ETI) ?

Pour répondre à cette question, Frank Drake — astronome américain et fondateur du projet SETI — a proposé en 1961 une formule permettant d’estimer le nombre potentiel de civilisations extraterrestres dans notre galaxie avec lesquelles nous pourrions entrer en contact. Ce nombre est égal au produit de sept paramètres, parmi lesquels : le nombre d’étoiles qui se forment chaque année dans notre galaxie, la part d’étoiles entourées de planètes, l’espérance du nombre de planètes potentiellement propices à la vie par étoile, la durée pendant laquelle les civilisations extraterrestres avancées émettraient des signaux radio dans l’espace, etc. À partir des données connues à l’époque, Drake et ses collaborateurs estimaient à 10 le nombre de civilisations en mesure de communiquer dans la Voie lactée.

Il est toutefois particulièrement difficile d’estimer avec certitude chacun de ces paramètres, et même aujourd’hui, les scientifiques ne parviennent pas à s’accorder sur les valeurs à utiliser. En 2013, Sara Seager, astronome et planétologue au MIT, a proposé une version modifiée de l’équation de Drake, réduite à six facteurs, se focalisant sur la présence d’une quelconque vie extraterrestre (et non pas sur la capacité de ces formes de vie à communiquer via des signaux radio) ; cette version inclut notamment la fraction d’étoiles dites « silencieuses » et la fraction de planètes sur lesquelles la vie produit des signatures gazeuses détectables.

équation sara seager
La formule proposée par Sara Seager pour estimer les chances qu’il existe une autre vie extraterrestre intelligente dans l’Univers (ici, avec les valeurs les plus optimistes). À la différence de Frank Drake, elle s’appuie en partie sur la probabilité de détecter des biosignatures gazeuses. © Information Is Beautiful/Facebook

En se concentrant sur les étoiles de type M, telles que les naines rouges — qui sont les étoiles les plus nombreuses de l’Univers, mais qui sont plus petites et moins lumineuses que le Soleil — Seager a estimé des valeurs pour chaque terme de sa formule, dont le résultat suggérait finalement que deux planètes « habitées » par une quelconque forme de vie pourraient raisonnablement être découvertes au cours de la prochaine décennie. Mais cette estimation date de 2013 et nous approchons doucement de la fin de la « décennie » évoquée par la planétologue…

Le télescope spatial James Webb, qui devrait être lancé le 22 décembre prochain, pourrait néanmoins détecter de tels biomarqueurs dans les atmosphères d’exoplanètes de la taille de la Terre. Les astronomes ont découvert que 6% de toutes les étoiles naines rouges ont une planète de la taille de la Terre située en zone habitable. Webb et d’autres futurs télescopes pourraient détecter des signes d’une atmosphère comme la nôtre (composée d’oxygène, de dioxyde de carbone, de méthane), ou bien détecter des signes de photosynthèse ou même toute autre molécule suggérant la présence d’une vie animale.

Une vie « intelligente » et avancée technologiquement pourrait, quant à elle, créer une pollution atmosphérique — comme sur notre planète — qui pourrait elle aussi être détectée par les futurs instruments d’observation. En résumé, un instrument suffisamment puissant pourrait nous permettre de déterminer si nous avons affaire à une vie avancée ou à une forme de vie beaucoup plus simple.

Une vie intelligente potentiellement menacée par l’auto-annihilation

Des scientifiques du Caltech se sont eux aussi livrés à une estimation statistique de l’occurrence d’une ETI dans notre galaxie. Leurs travaux ont été publiés au début de l’année dans la revue Galaxies. Ils ont notamment déterminé où et quand la vie est la plus susceptible de se produire dans la Voie lactée et ont identifié le facteur le plus important affectant sa prévalence : la tendance des créatures intelligentes à s’autodétruire. Des études antérieures montrent en effet que les progrès technologiques d’une civilisation conduisent inévitablement à une destruction complète et à une dégénérescence biologique.

Ils ont découvert que la probabilité d’émergence de la vie, sur la base de facteurs connus, culminait dans une région annulaire située à environ 13 000 années-lumière du centre galactique et 8 milliards d’années après la formation de la galaxie — la vie complexe diminuant temporellement et spatialement à partir de ce pic ; elle serait donc trop jeune pour que l’on puisse l’observer. La Terre, en comparaison, est à environ 25 000 années-lumière du centre galactique, et la civilisation humaine est apparue à la surface de la planète environ 13,5 milliards d’années après la formation de la Voie lactée. « Nos résultats peuvent impliquer que la vie intelligente peut être courante dans la galaxie, mais qu’elle est encore jeune […]. [Ils] suggèrent également que notre emplacement sur Terre ne se trouve pas dans la région où la plupart des vies intelligentes sont installées, et que les pratiques SETI doivent être plus proches de la galaxie intérieure, de préférence dans l’anneau situé à 13 000 années-lumière du centre galactique », écrivent les chercheurs.

pic émergence vie
Selon des chercheurs du Caltech, le point culminant de l’émergence de la vie se situe à environ 13 000 années-lumière du centre galactique et 8 milliards d’années après la formation de notre galaxie. © X. Cai et al.

Plusieurs experts s’accordent à dire que nos chances de trouver des formes de vie extraterrestres microbiennes sont bien supérieures à celles de détecter une ETI. Et si les recherches se focalisent sur les mondes rocheux similaires à la Terre, des chercheurs ont récemment identifié une nouvelle classe de mondes extraterrestres, qui s’avèrent particulièrement propices au développement d’une vie microbienne : les planètes dites « hycéennes », qui sont jusqu’à 2,5 fois plus grandes que la Terre et recouvertes d’immenses océans d’eau liquide sous une atmosphère épaisse et riche en hydrogène. Ces planètes semblent incroyablement abondantes dans toute la galaxie et pourraient héberger une vie similaire aux organismes « extrêmophiles » qui prospèrent dans certains des environnements les plus difficiles de la Terre, ont déclaré les membres de l’équipe.

Un nouveau cadre pour rapporter les résultats

Aussi infimes que soient nos chances d’entrer en contact avec une forme de vie extraterrestre, intelligente ou non, il est cependant essentiel d’anticiper la façon dont cette potentielle rencontre sera rapportée au public. Parmi ceux qui croient fermement à l’existence d’une ETI, beaucoup s’imaginent que ces êtres évoluent dans des sociétés utopiques, exemptes de guerre, de maladies et de mort (ou tout autre problème auquel est confronté notre monde) et seraient potentiellement capables d’éradiquer ces problèmes sur notre planète. Ces personnes risquent d’être véritablement frustrées si elles apprennent un jour que la vie extraterrestre tant fantasmée n’est autre qu’une sorte d’amibe…

Dans un récent article publié dans Nature, une équipe de la NASA a ainsi appelé la communauté scientifique à établir un nouveau cadre pour la recherche de vie extraterrestre, affirmant que « notre génération pourrait de manière réaliste être celle qui découvrira des preuves de la vie au-delà de la Terre ». Les auteurs, dont Jim Green, le scientifique en chef de l’agence, proposent de créer une échelle pour contextualiser l’importance des nouveaux résultats liés à cette recherche — une manière d’éviter que les petits pas réalisés n’apparaissent comme des pas de géant aux yeux du public.

échelle confiance recherche vie extraterrestre
L’« échelle de confiance » suggérée par les scientifiques de la NASA pour rendre compte des découvertes réalisées dans le cadre de la recherche d’une vie extraterrestre. © J. Green et al.

« Nous avons besoin d’un meilleur moyen de partager l’enthousiasme de nos découvertes et de démontrer comment chaque découverte s’appuie sur la suivante, afin que nous puissions amener le public et d’autres scientifiques dans le voyage », explique Mary Voytek, responsable du programme d’astrobiologie de la NASA et co-auteure de l’étude.

Chaque niveau de cette échelle correspondrait à un niveau de confiance, le niveau 7 étant le maximum, attestant que les scientifiques sont certains d’avoir détecté de la vie. Atteindrons-nous un jour ce niveau 7 ? Pour le Dr Ravi Kopparapu, qui étudie l’habitabilité et le potentiel de vie sur les exoplanètes au Goddard Space Flight Center, c’est une évidence : « Ce n’est pas une question de ‘si’, c’est une question de ‘quand’ nous trouverons la vie sur d’autres planètes. Je suis sûr que de mon vivant, de notre vivant, nous saurons s’il y a de la vie sur d’autres mondes », a-t-il affirmé.

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