Le vieillissement est un phénomène inévitable dans la vie de tout individu sur Terre. Cependant, ce processus naturel ne se déroule pas toujours au même rythme entre des individus du même âge. Une étude publiée récemment dans le British Medical Journal, suggère que « l’âge rétinien » serait déterminant pour obtenir une estimation de l’âge biologique réel. Grâce à un puissant algorithme, une analyse de la rétine (ou de « l’écart d’âge rétinien ») suffirait à déterminer si l’on risque de mourir prématurément ou non.
Le vieillissement est un processus long, complexe et irréversible, qui s’étend à travers le corps avec le temps. La rétine, la fine membrane qui tapisse l’œil et reçoit les informations lumineuses, est particulièrement sensible aux dommages causés par le vieillissement. Un vieillissement biologique différent et indépendant du vieillissement chronologique (qui correspond aux modifications inévitables liées à l’âge, contrairement au vieillissement biologique qui peut inclure l’environnement, entre autres facteurs contributifs).
D’autres indicateurs de l’âge biologique, comme la neuroimagerie, l’horloge de méthylation de l’ADN et l’horloge de vieillissement du transcriptome, existent déjà. Mais ils manquent de précision et peuvent être à la fois coûteux et longs à réaliser, tandis que la rétine peut facilement être scannée en moins de 5 minutes. Cette analyse rétinienne pourrait devenir à terme un outil fiable et indolore à la disposition de tout clinicien.
Un vieillissement biologique propre à chacun
Comme mentionné plus haut, deux personnes peuvent vieillir chronologiquement au même rythme, mais le vieillissement biologique est une toute autre histoire. Le modèle d’algorithme automatique mis au point par le groupe de chercheurs a appris à prédire la durée de vie d’une personne en observant et analysant l’état de sa rétine.
Il a notamment pu prédire avec précision l’âge biologique réel de près de 47 000 adultes anglais, d’âge moyen et âgés (dans une fourchette de 3,5 ans). Ce résultat a été confirmé après environ 11 ans, suite à l’analyse et la numérisation des rétines de ces personnes. 1871 d’entre eux étaient décédés, et ceux qui avaient des rétines d’apparence âgées avaient plus de risques de faire partie de ce groupe.
L’algorithme peut ainsi prédire que si la rétine d’une personne a un an de plus que son âge chronologique réel, son risque de décès, peu importe la cause, augmente de 2% en 11 ans. Parallèlement, le risque de mourir d’une cause autre qu’une maladie cardiovasculaire ou d’un cancer a augmenté de 3% dans l’étude. D’où l’appellation « écart d’âge rétinien ».
« Ce corpus de travaux soutient l’hypothèse selon laquelle la rétine joue un rôle important dans le processus de vieillissement et est sensible aux dommages cumulés du vieillissement qui augmentent le risque de mortalité », expliquent les auteurs de l’étude dans leur document.
La rétine, lentille de santé neurologique et cardiovasculaire
Comme le risque et la gravité des maladies dégénératives augmentent avec l’âge, l’état de la rétine peut être une véritable mine d’informations pour déterminer la durée de vie d’un patient. Et comme la rétine est très riche en nerfs et vaisseaux sanguins, plusieurs études antérieures ont déjà montré que ce réseau rétinien peut être un indicateur fiable pour la santé neurologique et cardiaque générale. Certaines recherches ont même démontré que le cerveau adaptait la vision selon le rythme cardiaque.
Les facteurs vision, circulation sanguine et fonctions neurologiques sont ainsi étroitement liés. Mais l’étude publiée dans le journal britannique est la première à présenter « l’écart d’âge rétinien » comme un puissant prédicteur de la mortalité globale, sans tenir compte des maladies sous-jacentes.
« L’association significative entre l’écart d’âge rétinien et la mortalité non cardiovasculaire/non cancéreuse, ainsi que les preuves croissantes du lien entre l’œil et le cerveau, peuvent soutenir l’idée que la rétine est la ‘fenêtre’ des maladies neurologiques », expliquent les auteurs.
Toutefois, il est à noter que les résultats de cette étude découlent uniquement d’observations, mais le processus biologique qui régit cette relation reste encore inexpliquée, selon les chercheurs. De plus, seulement 20 des personnes qui ont participé à l’étude sont décédées des suites de démence. Les auteurs n’ont alors pas pu établir un lien entre ce trouble cérébral spécifique et la santé rétinienne.
Les chercheurs ont également souligné que les décès liés aux maladies cardiovasculaires ont largement diminué ces dernières années, grâce à la progression de la médecine. Malgré ce fait, la santé rétinienne peut rester un indicateur important de la santé cardiovasculaire. Des études antérieures, par exemple, ont montré que des photographies de la rétine peuvent aider à prédire les facteurs de risque cardiovasculaire.