Samedi 30 mai, à 21h22 (heure française) la fusée Falcon 9 transportant le vaisseau Crew Dragon conçu par SpaceX s’est élancée depuis la base de Cap Canaveral. Tout s’est parfaitement bien déroulé pour les deux astronautes présents à son bord… et pour le petit dinosaure à paillettes qui les accompagnait !
Prévu à l’origine le 27 mai, le lancement avait dû être reporté pour cause de mauvaises conditions météorologiques. Samedi, le temps était favorable et le lancement a pu avoir lieu. De nombreux téléspectateurs étaient au rendez-vous pour partager ce moment historique : la première fois que des astronautes décollent des États-Unis depuis neuf ans…
Un indicateur d’apesanteur à paillettes
En effet, 2011 marqua la fin du programme de la navette spatiale américaine, qui en 30 ans, avait tout de même effectué un total de 135 vols. Mais les navettes de la NASA étaient vieillissantes (deux – Challenger (1988) et Columbia (2003) – ont explosé en vol, tuant leur équipage), et particulièrement coûteuses à entretenir. La navette Atlantis a donc accompli le dernier vol de la flotte en juillet 2011, pour ravitailler l’ISS. Depuis, tous les vols vers l’ISS étaient assurés par les missions Soyouz.
Le lancement du vaisseau Crew Dragon marque ainsi un tournant dans la conquête spatiale américaine, avec le retour des vols habités. Les astronautes Bob Behnken et Doug Hurley ont eu le plaisir d’inaugurer le vaisseau. Ceux qui ont suivi l’événement en direct ont peut-être remarqué la présence d’un troisième passager : un dinosaure en peluche ! Le premier dinosaure à se rendre dans l’espace… Si vous n’avez pas pu suivre l’événement en direct, voici les images filmées par la NASA :
À savoir qu’il est de tradition d’emporter un tel jouet en peluche à bord des vaisseaux spatiaux : ils servent en effet d’indicateurs de gravité zéro. Dès que les jouets se mettent à flotter, les observateurs savent que le vaisseau n’est plus soumis à l’attraction terrestre. Ainsi, une dizaine de minutes après le lancement de la fusée, la peluche est apparue à l’image diffusée en direct du Crew Dragon, où elle flottait dans la cabine. Les plus observateurs auront d’ailleurs déjà remarqué sa présence dans la cabine mercredi, lors des préparations du vol.
Ce jouet a été « élu » par les enfants des astronautes, passionnés de dinosaures, qui ont décidé d’un commun accord que cet Apatosaurus ferait partie du voyage. « C’était super pour nous d’avoir pu le faire pour nos deux fils qui, je l’espère, sont très excités de voir leur jouet flotter avec nous à bord », a déclaré Bob Behnken.
Lors du premier vol d’essai de Crew Dragon vers l’ISS en mars 2019, le seul passager à bord était également une peluche nommée Little Earth, ou Earth. L’objet, très apprécié du public, est rapidement devenu l’une des mascottes de SpaceX. A priori, le dinosaure ne suscitera pas les mêmes retombées commerciales : son concepteur, Ty, ne fabrique plus ce modèle (baptisé « Tremor ») et il est en rupture de stock chez toutes les grandes enseignes… Les heureux propriétaires de l’objet pourront sûrement le revendre à prix d’or sur le marché de l’occasion !
Un vrai tournant pour l’Agence spatiale américaine
À noter que cette tradition remonte au tout premier vol habité de l’histoire : en avril 1961, Youri Gagarine avait emporté avec lui une petite poupée à bord du vaisseau Vostok. Depuis, la tradition se perpétue au niveau international. Claudie Haigneré, première Française à bord de l’ISS, avait elle aussi emporté l’ours en peluche de sa fille, en 2001.
Bien d’autres rituels entourent les voyages dans l’espace. Dans son livre Dans les secrets du ciel: Rencontres avec des savants remarquables (éditions Grasset, 2014), Mathieu Vidard rapporte ainsi les traditions propres à Baïkonour, la base de lancement située au Kazakhstan, grâce au récit de Claudie Haigneré. Au programme : regarder un film la veille du départ (toujours le même, Le Soleil blanc du désert, un classique du cinéma soviétique), planter un arbre dans le jardin de l’hôtel où séjournent les astronautes (le premier a été planté par Gagarine), uriner non loin du pas de tir, en hommage à Gagarine qui s’était lui-même soulagé au pied du Vostok 1 (les femmes se contentent de vider une bouteille d’eau) et subir un coup de pied aux fesses avant de monter à bord de la fusée – la manière locale de souhaiter bonne chance et bon voyage…
Pour en revenir à Crew Dragon, la capsule s’est amarrée avec succès à l’ISS, 19 heures après son décollage. Bob Behnken et Doug Hurley ont donc pu pénétrer sans encombre à bord de la station, où ils ont rejoint les trois occupants actuels (l’Américain Chris Cassidy et les Russes Anatoli Ivanichine et Ivan Vagner). Les deux astronautes étaient ravis de leur voyage et ont déclaré qu’ils avaient même pu dormir près de 7 heures avant leur arrivée. Ils resteront entre un et quatre mois à bord de la Station spatiale internationale, avant de revenir sur Terre dans leur capsule Crew Dragon. Ils devraient amerrir dans l’Atlantique, au large de la Floride, ralentis par quatre grands parachutes.
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Si l’objectif de la mission peut paraître relativement modeste, la NASA la considère comme une « révolution ». L’Agence compte en effet sur SpaceX pour permettre aux États-Unis d’accéder à l’espace à moindres frais, car le vaisseau est conçu pour être réutilisé. « Elon Musk a apporté au programme spatial américain la vision et l’inspiration qui nous manquaient depuis neuf ans, depuis la fin des navettes spatiales. Il est brillant. », a déclaré le patron de la Nasa, Jim Bridenstine. Du côté de l’Agence spatiale russe, Roscosmos, il y a moins d’enthousiasme à l’idée de perdre le monopole des trajets vers l’ISS : « Nous ne comprenons pas vraiment l’hystérie déclenchée par le lancement réussi de la capsule Crew Dragon », a déclaré sur Twitter Vladimir Oustimenko, porte-parole de l’agence russe.