Les supernovas, suspectes majeures des bouleversements climatiques et extinctions de masse passés ?

Ces impacts pourraient se reproduire à l’avenir, lorsque la géante rouge Bételgeuse arrivera en fin de vie.

supernovas changement climatique terrestre
Le rémanent de supernova W49B. | Chandra X-ray Observatory Center/NASA/CXC/MIT/L.Lopez et al.
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Les supernovas proches pourraient avoir influencé significativement le climat terrestre en « soufflant » une partie de son atmosphère, selon une étude récente. Des indices isotopiques détectés dans les cernes des arbres révèlent des pics distincts de carbone radioactif sur une période de 15 000 ans, susceptibles d’avoir été causés par des supernovas. L’analyse de ces phénomènes pourrait permettre d’anticiper d’éventuels événements futurs et de s’y préparer.

La période quaternaire de la Terre, qui s’étend de 2,6 millions d’années jusqu’à aujourd’hui, se caractérise par d’importants bouleversements climatiques. Des cycles glaciaires et interglaciaires se succèdent à des intervalles réguliers, d’environ 100 000 ans, bouleversant profondément les écosystèmes. Cette ère est également marquée par une forte variabilité biologique, avec l’émergence de nouvelles espèces et des extinctions massives, parfois sélectives.

Si Homo sapiens est apparu il y a environ 300 000 ans, des traces culturelles marquées sont attestées à partir de 50 000 ans. À cette époque, le dernier maximum glaciaire s’est achevé il y a environ 15 000 ans, marquant une période de refroidissement intense : les températures moyennes annuelles étaient inférieures de 4 °C à celles d’aujourd’hui, les glaces recouvraient 25 % de la surface terrestre et le niveau de la mer se situait 122 mètres plus bas.

La période interglaciaire précédente s’est achevée il y a environ 116 000 ans. À ce moment-là, certaines régions du globe affichaient des températures supérieures de 2 à 4 °C aux moyennes actuelles, et les océans étaient de 5,5 à 9 mètres plus élevés. Depuis 50 000 ans, deux extinctions de masse se sont produites, entraînant la disparition de plusieurs clades de mammifères terrestres.

Les causes précises de ces extinctions et des basculements climatiques soudains restent débattues. « Nous avons connu des changements environnementaux brutaux au cours de l’histoire de la Terre. C’est indéniable, nous les observons », explique dans un communiqué Robert Brakenridge, chercheur principal à l’Institute of Arctic and Alpine Research (INSTAAR) de l’Université du Colorado à Boulder. « Alors, qu’est-ce qui les a provoqués ? », interroge-t-il.

Depuis les années 1980, Brakenridge et d’autres scientifiques avancent que les sursauts gamma et les supernovas proches pourraient être à l’origine de ces ruptures climatiques et des épisodes d’extinction. Jusqu’ici, cette hypothèse n’avait été envisagée que théoriquement. Dans une nouvelle étude publiée dans l’édition de juin des *Monthly Notices of the Royal Astronomical Society*, Brakenridge propose ce qui pourrait constituer une première base empirique et observationnelle.

« Lorsque des supernovae proches se produiront à l’avenir, les radiations pourraient avoir des conséquences dramatiques sur la société humaine », prévient-il. « Nous devons déterminer leur rôle exact quant à leur rôle dans les changements environnementaux passés », poursuit-il.

Une perte atmosphérique provoquant un refroidissement planétaire soudain

Les supernovas surviennent lorsqu’une étoile massive — entre 9 et 10 fois la masse du Soleil — épuise son carburant et s’effondre gravitationnellement, donnant naissance à une étoile à neutrons ou à un trou noir. Cet effondrement s’accompagne d’une explosion cataclysmique, émettant d’énormes quantités de matière et de rayonnement à haute énergie capables de traverser des galaxies entières.

Selon certaines modélisations extrêmes, si une supernova survenait à quelque 30 années-lumière de la Terre, elle pourrait souffler intégralement notre atmosphère, éradiquant ainsi toute forme de vie. À des distances de plusieurs centaines d’années-lumière, les effets seraient moins destructeurs mais demeureraient significatifs pour la composition chimique de l’atmosphère terrestre.

Pour tester cette hypothèse, Brakenridge a exploité les données récentes de supernovas collectées par un réseau de télescopes spatiaux à haute résolution. Ces observations précisent la nature des rayonnements émis et ont permis au chercheur d’élaborer un modèle simulant l’impact de ces émissions sur l’atmosphère terrestre.

Selon ces simulations, les photons à haute énergie émis par une supernova détruiraient partiellement la couche d’ozone, bouclier naturel de la planète contre les rayons ultraviolets. Ces rayonnements dégraderaient également le méthane stratosphérique, un gaz à effet de serre crucial pour la rétention de chaleur. L’effet combiné provoquerait un refroidissement planétaire soudain et accentuerait l’exposition aux UV. Pour Brakenridge, ces altérations pourraient entraîner des effets potentiels, comme des extinctions sélectives ou une hausse des incendies de forêt.

Les cernes des arbres : témoins de supernovas passées ?

Mais en l’absence actuelle de rayonnement de supernova dirigé vers la Terre, l’hypothèse de Brakenridge ne peut être vérifiée de manière directe. Il s’est donc tourné vers une archive naturelle : les cernes des arbres. Ces derniers enregistrent les variations annuelles de carbone atmosphérique, y compris celles du carbone 14, isotope radioactif dont la concentration augmente sous l’effet des rayonnements cosmiques. En analysant les cernes d’arbres couvrant les 15 000 dernières années, Brakenridge a repéré onze pics distincts de carbone 14, chacun pouvant correspondre à un événement de supernova.

Des recherches complémentaires devraient permettre d’affiner ce modèle, notamment en recoupant ces données dendrochronologiques avec celles issues des carottes glaciaires. Une meilleure compréhension de ces corrélations pourrait renforcer les capacités de prévision, alors que Bételgeuse, une supergéante rouge située à quelque 700 années-lumière, pourrait entrer en supernova d’ici 100 000 ans.

Source : Monthly Notices of the Royal Astronomical
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