« Cerveau TikTok » : des troubles de l’attention chez les enfants et adolescents inquiètent les scientifiques

tik tok troubles attention
| Unsplash
⇧ [VIDÉO]   Vous pourriez aussi aimer ce contenu partenaire

L’incroyable popularité des plateformes de vidéos courtes telles que TikTok inquiète toujours plus les psychiatres et neuroscientifiques. Ce type de contenu induirait une recherche constante de récompense immédiate et pourrait provoquer d’importants troubles de l’attention. L’incapacité à effectuer des activités nécessitant une attention prolongée pourrait engendrer des conséquences non négligeables sur le long terme — en particulier pour les enfants et les adolescents.

Passer d’une vidéo courte à une autre pendant des heures peut avoir des effets délétères sur la santé mentale. Les plateformes de vidéos courtes utilisent des algorithmes pour connaître les préférences et recommander celles qui sont les plus susceptibles d’être visionnées. Ce système fait que ces plateformes font office de véritables « machines à dopamine », l’hormone du plaisir sécrétée par le système de récompense immédiate.

Le flux constant de dopamine renforce la recherche de plaisir et peut engendrer un comportement addictif. Lorsque les utilisateurs des plateformes de vidéos courtes tombent sur un contenu qui ne leur plaît pas, ils passent directement au suivant jusqu’à tomber sur celui provoquant la sensation familière et agréable de plaisir. Le format de ces vidéos (entre cinq et quelques dizaines de secondes pour la plupart) impose que ce soit le système de récompense immédiate qui s’active. Répétée des milliers de fois par jour, la focalisation du cerveau sur la récompense immédiate est particulièrement inquiétante pour les enfants et les adolescents.

:: LE T-SHIRT QUI SOUTIENT LA SCIENCE ! ::

Le « cerveau TikTok » : un phénomène neuropsychiatrique émergent

Bien que d’autres plateformes proposent le même format de vidéos, la notoriété de TikTok a donné naissance à un terme désormais populaire en neuropsychologie : le « TikTok brain » ou « cerveau TikTok ». Ce terme englobe les impacts neuropsychiatriques négatifs des flux de vidéos courtes, incluant la dépression et l’anxiété, les troubles alimentaires, les comportements suicidaires et addictifs, etc.

À savoir que la surutilisation des applications de vidéos courtes est plus ou moins comparable à la dépendance à internet. Cependant, il existe des points essentiels les démarquant : la condensation des contenus en un temps limité, la forte attraction pour les jeunes avec peu ou pas d’exigences en matière de savoir-faire technologique et de contenu, et la génération de courtes rafales de sensations fortes, plutôt que de plus longues (pour des contenus de longue durée). Ces particularités entraînent une différence fondamentale dans le processus d’engagement cérébral, lors de l’utilisation de ces types de plateformes.

Une étude parue en 2021 et portant sur de jeunes adultes a révélé que le visionnage successif des vidéos TikTok active le réseau cérébral du mode par défaut et la zone tegmentale ventrale (le circuit de récompense immédiate). L’activation de ces régions peut être liée à des comportements néfastes tels que le déficit de la maîtrise de soi. La nouvelle étude transnationale, récemment publiée dans la revue Computers in Human Behavior, appuie ces travaux, en mettant l’accent sur les troubles de l’attention chez les enfants et les adolescents.

Un risque de déficit de « l’attention dirigée »

La nouvelle analyse, menée par des chercheurs de l’Université des finances et d’économie du Guizhou en Chine et de l’Université Western Michigan, a été effectuée sur des étudiants (adolescents) chinois et américains présents sur TikTok. Les résultats confirment l’importante implication des rafales de sensations fortes générées par les flux de vidéos courtes, dans l’activation cyclique du système de récompense immédiate.

La recherche constante de la récompense immédiate pourrait entraîner un déficit de concentration pour les activités plus prolongées, telles que la lecture ou les études en général. Ces activités nécessitent notamment une « attention dirigée », régie par le cortex préfrontal (la région de contrôle de l’impulsivité et de la prise de décision). Cette capacité permet d’inhiber les distractions inutiles ou de s’y consacrer à de moments plus opportuns, et de maintenir l’attention de manière appropriée. Cette forme d’attention fait appel à la synergie de compétences cognitives d’ordre supérieur, comme la planification et la hiérarchisation.

Il est important de savoir que les enfants et les adolescents ne parviennent pas entièrement à maintenir une attention dirigée, car le cortex préfrontal est complètement développé à l’âge de 25 ans. Les flux de vidéos courtes ne nécessitent pas cette forme d’attention soutenue. Cependant, « si le cerveau des enfants s’habitue à des changements constants, il aura du mal à s’adapter à une activité non numérique où les choses ne bougent pas aussi vite », indique Michael Manos, directeur du Center for Attention and Learning de la Cleveland Clinic Children’s.

D’autres experts estiment que les jeunes vivent actuellement une sorte « d’endoctrinement culturel », les incitant à s’habituer voire à ne préférer que les activités hyperstimulantes et n’exigeant que très peu d’attention. De ce fait, il leur est difficile de prêter attention à celles n’offrant pas de récompense immédiate. Néanmoins, la situation n’est pas forcément irréversible, d’autant plus que le cerveau des enfants et des adolescents possède une excellente plasticité.

Source : Computers in Human Behavior

Laisser un commentaire