La « tombe » radioactive de l’île Runit, remplie de déchets nucléaires, commence à se fissurer

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Le dôme de Runit contient des déchets radioactifs issus d'essais nucléaires effectués entre 1946 et 1958. | Greg Nelson
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Aux Îles Marshall, sur l’île Runit, un grand dôme en béton a été construit pour contenir les déchets radioactifs issus de tests nucléaires. La fosse scellée contient plus de 87’800 mètres cubes de matière, que des militaires ont enterrés dans le cadre d’efforts visant à nettoyer les débris dangereux laissés par l’armée américaine entre 1946 et 1958.

Entre 1977 et 1980, environ 4000 militaires américains ont été chargés de nettoyer l’ancien site d’essais nucléaires de l’atoll d’Enewetak. Ils ont notamment prélevé le sol contaminé ainsi que d’autres déchets radioactifs tels que du matériel militaire, du béton et de la ferraille.

Tout a ensuite été confiné dans le dôme de Runit, que les travailleurs ont ensuite recouvert de béton. Au total, le cratère contient suffisamment de déchets radioactifs pour remplir 35 piscines olympiques. La plupart de ces sols irradiés contiennent du plutonium, un isotope capable de provoquer un cancer du poumon par simple inhalation.

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Mais à mesure que le niveau de la mer montait dans la région (augmentation d’environ 7 millimètres par an depuis 1993), l’eau a commencé à s’infiltrer dans le sol, sous le dôme.

Contrairement au sommet de la structure, qui est scellé, le fond de la fosse n’a jamais été revêtu de béton. Une grave erreur… De ce fait, les marées montantes pourraient amener l’eau à s’infiltrer dans le sarcophage, ce qui pourrait provoquer sa destruction.

Détection de fissures

Avant les essais nucléaires dans les années 1940 et 1950, les habitants de l’atoll d’Enewetak ont été exilés et transférés sur des îles voisines. Aujourd’hui, seules trois des 40 îles de l’atoll ont été qualifiées de sûres pour l’habitation humaine. Elles hébergent actuellement environ 650 résidents. L’île sur laquelle se situe le dôme, Runit, reste bien entendu inoccupée.

En 2013, l’US Department of Energy a signalé que des matières radioactives pourraient fuir du dôme dans le milieu marin, mais a déclaré qu’un tel événement « ne conduirait pas nécessairement à un changement significatif de la dose de rayonnement délivrée à la population résidente locale ».

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Illustration montrant la structure interne du dôme de confinement.

Mais le niveau de la mer autour des îles Marshall augmente à vue d’oeil. D’ici 2030, le niveau pourrait être entre 3 et 16 centimètres plus élevé qu’aujourd’hui, ce qui entraînerait d’ailleurs davantage d’ondes de tempête et d’inondations côtières. D’ici 2100, le dôme pourrait être entièrement submergé.

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De ce fait, les habitants craignent que des dommages croissants à la structure ne présentent de nouveaux risques pour la santé. « Cerise sur le sarcophage » : le dôme a récemment commencé à se fissurer et à se désagréger, augmentant les risques que de fortes vagues puissent détruire la structure. Une telle catastrophe enverrait encore plus de déchets radioactifs dans l’océan ou le lagon, ce qui pourrait même forcer la population locale à quitter l’atoll une nouvelle fois.

« Si cela se produit, la plupart des gens ici partiront à jamais », a déclaré Christina Aningi à l’Australian Broadcasting Corporation, enseignante à l’atoll d’Enewetak. « C’est comme un cimetière pour nous, en attendant que cela se produise ».

Niveaux de radiation du dôme : les scientifiques ne savent pas s’ils sont dangereux

Ken Buesseler, un radiochimiste de la marine qui prévoit d’échantillonner le sol près du dôme, a récemment déclaré que la préoccupation concernant les niveaux de rayonnement pourrait être exagérée. « Il y a du césium dans tout ce que vous mangez, du plutonium dans tout ce que vous mangez et buvez », a-t-il dit.

Selon lui, les résidents de l’atoll d’Enewetak devraient directement inhaler le plutonium qui a fui ou être exposés à de l’eau contaminée par une abrasion pour subir des conséquences néfastes pour la santé. Cependant, les scientifiques étudient toujours les effets de l’exposition aux rayonnements sur l’ensemble des îles.

« Vous ne pouvez ni le goûter, ni le sentir, ni le toucher », a déclaré Buesseler. « Alors c’est un peu comme une arme invisible qui nous veut du mal, et personne ne veut ça ».

Le Lawrence Livermore Laboratory, basé en Californie, a effectué des tests de surveillance des eaux souterraines à Enewetak et, au cours des dernières années, a installé un certain nombre de dispositifs de surveillance, mais aucune mesure n’a été prise pour renforcer le dôme. Selon les estimations, de tels travaux pourraient coûter des centaines de millions de dollars.

Le gouvernement des Îles Marshall aimerait (et c’est tout à fait justifié) que les États-Unis assument maintenant leur responsabilité. En 1986 cependant, le gouvernement américain avait déjà conclu un accord avec les Îles Marshall, acceptant que l’atoll prenne en charge la gestion de leurs déchets.

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