Ce 25 avril, l’hélicoptère de la NASA a volé avec succès pour la troisième fois au-dessus de la surface martienne. À cette occasion, il a battu tous les records : il a évolué à des vitesses et sur des distances jamais atteintes auparavant, même lors des essais effectués sur Terre !
Dimanche 25 avril, l’hélicoptère a décollé à 4h31 (heure de la côte est des États-Unis), soit 12h33 heure locale de Mars, pour s’élever à 5 mètres d’altitude — soit la même hauteur que lors de son deuxième vol, qu’il a effectué le 22 avril. La NASA a déclaré qu’Ingenuity avait alors volé « plus vite et plus loin » que lors de tous ses essais sur Terre, ce qui constitue un exploit monumental.
Le petit appareil s’est en effet déplacé sur 50 mètres, soit l’équivalent d’un peu plus de la moitié d’un terrain de football, atteignant une vitesse maximale de 2 mètres par seconde (soit un peu plus de 7 km/h) ! « Avec ce vol, nous démontrons des capacités critiques qui permettront l’ajout d’une dimension aérienne aux futures missions sur Mars », a déclaré Dave Lavery, responsable du programme Ingenuity au siège de la NASA.
Une prise de vue impeccable
Hors contexte, ces chiffres sont loin d’être exceptionnels. Mais ces performances dépassent en réalité toutes les vitesses obtenues lors des tests de l’engin effectués sur Terre et des précédents vols réalisés sur Mars. C’est également la distance la plus longue que l’appareil ait jamais parcourue.
Lors du deuxième vol, le 22 avril dernier, Ingenuity avait capturé deux images en couleurs du sol martien, à environ 5 mètres d’altitude :
Pour ce troisième opus, il a cette fois-ci été question de tester la caméra de navigation embarquée, en noir et blanc, pour vérifier si l’engin était capable de capturer et de traiter les images lorsqu’il vole sur une plus longue distance. Et c’est une nouvelle réussite : l’hélicoptère a renvoyé une superbe photo de la surface martienne.
Un ensemble de données inestimable
« C’est la première fois que nous voyons l’algorithme de la caméra fonctionner sur une longue distance. Vous ne pouvez pas faire cela dans une chambre de test », souligne MiMi Aung, chef de projet de l’hélicoptère au Jet Propulsion Laboratory. En effet, les chambres à vide du JPL sont remplies d’air vaporeux, principalement de dioxyde de carbone, pour simuler la mince atmosphère martienne ; mais dans ces enceintes, l’hélicoptère ne peut se déplacer que d’environ 50 centimètres dans toutes les directions, pas plus. Par conséquent, les ingénieurs n’avaient aucun moyen de savoir si la caméra fonctionnerait comme prévu tout en se déplaçant à une vitesse plus élevée.
En outre, l’ordinateur de vol d’Ingenuity, qui fait voler l’engin de manière autonome sur la base des instructions envoyées des heures plus tôt, utilise les mêmes ressources que les caméras. Or, sur de plus grandes distances, davantage d’images sont prises. Un vol trop rapide de l’engin était donc susceptible de nuire à la prise de vue effectuée en parallèle. Mais l’engin a parfaitement relevé le défi.
Exploiter un avion de manière contrôlée sur Mars est beaucoup plus difficile que d’en piloter un sur Terre. Même si la gravité sur Mars est environ un tiers de celle de la Terre, l’hélicoptère doit s’accommoder d’une atmosphère extrêmement peu dense. De plus, pour que la caméra fonctionne, il faut non seulement que l’algorithme qui suit les caractéristiques de la surface tienne la distance, mais il faut également que les conditions d’exposition soient correctes — la poussière, par exemple, peut obscurcir les images ou interférer avec les performances de la caméra.
Loin de se reposer sur ses lauriers, la NASA prévoit déjà un quatrième vol pour Ingenuity dans les prochains jours. La NASA acquiert actuellement sa première expérience pratique d’exploitation d’un giravion à distance sur une autre planète ; chaque seconde de chaque vol fournit une abondance de données, que les ingénieurs peuvent ensuite comparer aux modélisations et simulations effectuées sur Terre. Les données recueillies sont donc inestimables pour les futures missions potentielles sur Mars, qui pourraient impliquer des hélicoptères de nouvelle génération pour ajouter une dimension aérienne à l’exploration.
Bien entendu, ce nouvel exploit a été enregistré par l’imageur Mastcam-Z du rover Perseverance, stationné à quelques mètres de là, sur la zone baptisée « Van Zyl Overlook » :
Sur cette nouvelle vidéo, nous voyons Ingenuity décoller (en bas à gauche de l’écran) pour s’élever à cinq mètres de haut, puis se déplacer rapidement vers la droite. Il se déplace si loin qu’il sort du champ d’observation du rover pendant plusieurs secondes, avant de revenir sagement à sa position initiale.
« Le vol d’aujourd’hui était ce que nous avions prévu, et pourtant c’était tout simplement incroyable ! », a déclaré Dave Lavery. Depuis, l’équipe analyse avec ferveur l’ensemble des données recueillies lors de ce troisième vol pour préparer les prochains essais. Dans les jours à venir, d’autres segments de la vidéo seront renvoyés sur Terre montrant la majeure partie de ce vol de 80 secondes de l’hélicoptère.