Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) est décrit comme un trouble du neurodéveloppement caractérisé par des problèmes de concentration et d’attention, de la difficulté dans la gestion de l’impulsivité, et une hyperactivité. Bien qu’il soit plus commun durant l’enfance, le TDAH peut également persister à l’âge adulte, où l’OMS estime qu’il touche environ 2.5% des personnes (contre 5% pour les enfants). En plus des difficultés que ce trouble occasionne quotidiennement, il peut également entraîner, chez l’adulte, de sérieuses conséquences sur l’état mental. C’est ce qu’a récemment révélé une étude canadienne de grande ampleur en montrant qu’une femme sur quatre souffrant de TDAH avait commis au moins une fois une tentative de suicide.
Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité peut avoir des conséquences négatives sur la santé mentale à l’âge adulte. Une étude canadienne représentative à l’échelle nationale a rapporté que la prévalence des tentatives de suicide était beaucoup plus élevée chez les femmes atteintes de TDAH (24%) que chez les femmes qui ne présentent pas le trouble (3%). Les hommes atteints de TDAH étaient également plus susceptibles d’avoir tenté de se suicider que les hommes sans TDAH (9% contre 2%).
« Le TDAH jette une très longue ombre. Même si nous prenons en compte les antécédents de maladie mentale, ainsi que les niveaux plus élevés de pauvreté et les difficultés précoces que les adultes atteints de TDAH connaissent souvent, les personnes atteintes de TDAH avaient toujours 56% plus de risques d’avoir tenté un suicide que leurs pairs sans TDAH », explique Esme Fuller-Thomson, professeur à la faculté de service social de l’Université de Toronto.
Tentatives de suicide : deux fois plus de risques chez les femmes
Comme le TDAH est plus fréquent chez les hommes que chez les femmes, peu de recherches ou d’études cliniques se sont concentrées sur les femmes atteintes de ce trouble. Dans cette nouvelle étude, les femmes atteintes de TDAH avaient plus de deux fois plus de risques de tenter de se suicider que les hommes atteints du même trouble.
« Notre constatation selon laquelle une Canadienne atteinte de TDAH sur quatre a tenté de se suicider met en évidence l’urgence de fournir un soutien adéquat en santé mentale tout au long de la vie à ce groupe vulnérable et négligé », déclare Lauren Carrique, également à l’Université de Toronto (MSW) et assistante sociale au Toronto General Hospital.
L’impact des expériences de violences conjugales durant l’enfance
Les adultes atteints de TDAH qui avaient été exposés à la violence conjugale chronique des parents avaient trois fois plus de risques de tenter de se suicider que leurs pairs atteints de TDAH qui n’avaient pas vécu cette épreuve pendant l’enfance. La violence conjugale parentale était définie comme « chronique » si elle s’était produite plus de 10 fois avant que le répondant n’ait 16 ans.
« La nature transversale de cette étude nous interdit de déterminer une causalité possible ; la relation entre la violence conjugale chronique des parents et les tentatives de suicide pourrait circuler dans les deux sens. Nous pensons que les conflits parentaux violents peuvent causer un stress extrême à l’enfant atteint de TDAH et prédisposer ces personnes aux troubles mentaux et aux pensées suicidaires », indique Raphaël Nahar Rivière, médecin résident en anesthésiologie à l’Université de Toronto.
Recentrer le dépistage autour des personnes les plus vulnérables
L’étude a examiné un échantillon représentatif à l’échelle nationale de 21’744 Canadiens, dont 529 ont déclaré avoir reçu un diagnostic de TDAH. Les données ont été tirées de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes. La prévalence extrêmement élevée des tentatives de suicide chez les personnes atteintes de TDAH souligne l’importance de disposer de professionnels de la santé dépistant les patients atteints de TDAH concernant les pensées suicidaires, selon Senyo Agbeyaka, assistant social.
« Le fait de savoir que les femmes atteintes de TDAH qui ont connu des difficultés pendant leur enfance et les adultes ayant des antécédents de dépendance aux substances et/ou de dépression sont particulièrement vulnérables aux tentatives de suicide aidera, espérons-le, les cliniciens à améliorer le ciblage et la sensibilisation de cette population », conclut Agbeyaka.