La surface de Mars est parsemée de grandes structures ondulées dans le sable appelées mégaondulations. Ces dernières sont également présentes dans les déserts sur Terre, où elles se déplacent continuellement sous forme de vagues de sable sous l’effet des vents. Mais contrairement à notre planète, les astrophysiciens ont toujours pensé que les mégaondulations martiennes étaient immobiles, en raison de la faiblesse des vents martiens. Récemment, les planétologues ont détecté pour la première fois la migration de certaines mégaondulations sur la planète rouge, remettant en cause les modèles atmosphériques martiens actuels.
Les chercheurs ont repéré le déplacement de grandes vagues de sable martien pour la première fois. La découverte dissipe la croyance de longue date selon laquelle ces « méga-ondulations » n’ont pas bougé depuis leur formation il y a des centaines de milliers d’années. Elles sont également la preuve de vents plus forts que prévu sur la planète rouge.
C’est assez stupéfiant que les humains puissent détecter ces changements sur Mars, déclare Ralph Lorenz, planétologue au laboratoire de physique appliquée de l’Université Johns Hopkins. « Nous pouvons désormais mesurer les processus à la surface d’une autre planète qui sont juste deux fois plus rapides que la pousse de nos cheveux ».
Des mégaondulations martiennes d’apparence immobile
Les mégaondulations se trouvent dans les déserts sur Terre, souvent entre les dunes. Vagues dans le sable espacées de plusieurs dizaines de mètres, elles sont une version plus grande des ondulations qui ont lieu tous les 10 centimètres environ sur de nombreuses dunes terrestres. Mais contrairement aux dunes, les mégaondulations sont constituées de deux tailles de grains de sable.
Des grains plus gros et plus lourds recouvrent les crêtes des mégaondulations, ce qui rend plus difficile pour le vent de déplacer ces structures, explique Simone Silvestro, spécialiste des planètes à l’Institut national italien d’astrophysique. Depuis le début des années 2000, les rovers et les orbiteurs de Mars ont repéré à plusieurs reprises des mégaondulations sur la planète rouge.
Mais elles ne semblaient pas changer de manière mesurable, ce qui a conduit certains planétologues à penser qu’il s’agissait de reliques du passé de Mars, lorsque son atmosphère plus épaisse permettait des vents plus forts. En utilisant des images capturées par la sonde Mars Reconnaissance Orbiter (MRO) de la NASA, Silvestro et ses collègues ont montré que certaines mégaondulations se déplacent très lentement.
Un phénomène de migration similaire à celui des mégaondulations terriennes
Les chercheurs se sont concentrés sur deux sites proches de l’équateur de Mars. Ils ont analysé approximativement 1100 mégaondulations dans le cratère McLaughlin et 300 dans la région de Nili Fossae. Ils ont recherché des signes de mouvement en comparant des images time-lapse de chaque site — prises respectivement à 7.6 et 9.4 ans d’intervalle. Les mégaondulations des deux régions ont avancé d’environ 10 centimètres par an, rapporte l’équipe dans la revue Journal of Geophysical Research : Planets.
Il s’agit de la vitesse à laquelle les mégaondulations se déplacent dans le désert de Lut en Iran. Il y a quelques décennies à peine, il n’y avait aucune preuve que les sables sur Mars étaient mobiles, les planétologues ne pensaient pas que les vents étaient assez forts. Les vents sur Mars pourraient accélérer de petits grains de sable, suggèrent Silvestro et ses collègues.
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Une fois que ces grains commencent à rouler ou à rebondir, ils peuvent agir comme des béliers, frappant des grains plus gros et les mettant en mouvement. Ce processus, connu sous le nom de glissement induit par l’impact, a été observé sur Terre. Les dunes de sable sur Mars ont probablement fourni les grains nécessaires à la migration des mégaondulations, conclut l’équipe, car les dunes voisines se sont déplacées dans la même direction que les mégaondulations.
Une réévaluation nécessaire de l’impact des vents et des tempêtes de sable martiens
Les modèles atmosphériques de Mars suggèrent que les vents capables de déplacer le sable sont rares. Cette découverte de mégaondulations en migration forcera ces modèles à être révisés. Silvestro prévoit d’étendre sa recherche de mégaondulations migratrices à toute la planète. Il soupçonne que les plus rapides seront à proximité des dunes les plus rapides de Mars.
Les mégaondulations en mouvement pourraient à leur tour déclencher des tempêtes de poussière, suggèrent les chercheurs. La poussière en suspension dans l’air peut recouvrir les panneaux solaires, réduisant leur efficacité, et peut également enrayer les pièces mécaniques comme les engrenages. C’est une mauvaise nouvelle pour les rovers martiens et les futurs colons humains.