La dernière estimation de l’OMS porte à 257 cas confirmés et 120 cas suspects de variole du singe (ou monkeypox) à travers le monde. La flambée de cette zoonose est inédite de par sa propagation mondiale et extrêmement rapide. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) exhorte tous les pays à être vigilants et mener une campagne de surveillance drastique. Même si aucun décès n’a été constaté dans les pays non endémiques, l’OMS s’attend à une circulation soutenue du virus. Du moins, avec « les bonnes mesures », l’épidémie pourrait rester sous contrôle.
Depuis que le Royaume-Uni a signalé pour la première fois un cas confirmé de variole du singe, le 7 mai, 23 États membres ont également rapporté des cas à l’OMS. Ces pays n’ont habituellement aucun lien avec ce virus, parmi lesquels les États-Unis, l’Australie, les Émirats arabes unis et une dizaine de pays européens. En effet, la variole du singe est endémique dans onze pays d’Afrique centrale et de l’Ouest.
Des enquêtes épidémiologiques sont en cours. La grande majorité des cas signalés jusqu’à présent n’ont aucun lien établi avec des voyages dans une zone d’endémie. Ils se sont présentés par le biais de services de soins primaires ou de santé sexuelle. C’est pourquoi l’OMS considère comme atypique cette identification de ces cas confirmés et suspects de variole du singe.
Des cas toujours plus nombreux
La situation évolue rapidement, l’OMS s’attend à un nombre bien plus important de cas identifiés dans les prochains jours, à mesure que la surveillance se développe dans les pays non endémiques, ainsi que dans les pays connus pour abriter le virus.
Vendredi 27 mai, l’Agence britannique de sécurité sanitaire (UKHSA) a annoncé avoir détecté 16 cas supplémentaires en Angleterre ; amenant le total britannique à 106. Le ministère espagnol de la Santé, quant à lui, répertoriait 98 cas confirmés, et le Portugal 49. Dans ce dernier pays, tous les cas concernent des hommes, la plupart âgés de moins de 40 ans. En France, au 28 mai 2022 selon Santé Publique France, 16 cas confirmés de monkeypox ont été rapportés.
Du côté des États-Unis, seuls 14 cas sont confirmés par les scientifiques des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), tandis que les autorités argentines ont signalé vendredi un cas de monkeypox chez un homme de Buenos Aires, marquant la première infection détectée en Amérique latine.
Évolution du risque lié à la variole du singe
En règle générale, cette maladie ne conduit pas à des épidémies majeures, car on ne dénombre qu’une poignée de cas en dehors de l’Afrique chaque année, le plus souvent en lien avec des voyages. L’épidémie la plus grave aux États-Unis est survenue en 2003, impliquant des dizaines de cas. Une exposition étroite à des chiens de prairie et d’autres animaux de compagnie infectés en était la cause. Ce fut la première épidémie de variole du singe en dehors de l’Afrique, selon l’OMS.
Il faut préciser que ce virus peut se propager par les fluides corporels, le contact avec la peau et les gouttelettes respiratoires. La majorité des cas actuels concerne de jeunes hommes, dont beaucoup se sont identifiés comme ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes.
Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies souligne, dans un communiqué : « La plupart des cas présentaient des lésions sur les organes génitaux ou la région péri-génitale, indiquant que la transmission se produit probablement à l’occasion d’un contact physique étroit lors d’activités sexuelles ».
Actuellement, selon l’OMS, le risque global pour la santé publique au niveau mondial est évalué comme modéré. Cependant, il pourrait devenir élevé si ce virus exploite l’opportunité de s’établir en tant qu’agent pathogène humain et se propage aux groupes à risque plus élevé de maladies graves, tels que les jeunes enfants et les personnes immunodéprimées. Effectivement, une grande partie de la population est vulnérable au virus, car la vaccination contre la variole, qui confère une certaine protection croisée, a été interrompue depuis 1980. De plus, on estime que les vaccins développés contre la variole sont efficaces à environ 85% pour prévenir la variole du singe.
Développer et partager les vaccins
Des pays comme la Grande-Bretagne, l’Allemagne, le Canada et les États-Unis commencent à estimer la manière dont les vaccins contre la variole pourraient être utilisés pour endiguer l’épidémie. Par exemple, l’UK Health Security Agency (UKHSA) a acheté plus de 20 000 doses d’un vaccin antivariolique « sûr » appelé Imvanex (fourni par Bavarian Nordic). Il est basé sur une souche de virus de la vaccine (appelée souche nordique bavaroise de la vaccine modifiée d’Ankara, ou MVA-BN). Ainsi, il a été approuvé pour la prévention de cette maladie au Canada et aux États-Unis ; et pour la prévention de la variole dans l’Union européenne.
En conséquence, l’OMS a réuni des experts pour examiner les dernières données sur les vaccins contre la variole et leurs effets contre la variole du singe. Par suite, ils fourniront des conseils sur la manière dont les vaccins devront être utilisés et dans quelles circonstances. Actuellement, ces vaccins sont proposés aux individus ayant des contacts intimes avec des personnes infectées par la variole du singe, afin de réduire le risque d’infection symptomatique et de maladie grave.
Néanmoins, selon APNews (agence de presse mondiale), compte tenu de l’offre mondiale limitée de vaccins contre la variole, le chef des urgences de l’OMS, le Dr Mike Ryan, affirme que l’agence travaille avec ses pays membres pour éventuellement développer un stock contrôlé et centralisé, similaire à ceux formés lors d’épidémies de fièvre jaune, de méningite et de choléra dans les pays qui n’en ont pas les moyens. Il s’agirait de ce fait d’une campagne de vaccination ciblée, pour des traitements ciblés. Les volumes stockés ne seront donc pas nécessairement importants, mais chaque pays doit pouvoir accéder aux vaccins si la situation évoluait négativement.
Sans compter qu’il semblerait que certains antiviraux développés contre la variole soient efficaces, dont un, récemment approuvé par l’Agence européenne des médicaments, ont souligné les experts de l’OMS. Il s’agit du Técovirimat, dont l’utilisation est limitée à des « circonstances exceptionnelles ». En effet, son efficacité reconnue pour réduire la mortalité due à la variole, la variole du singe et la variole bovine, est uniquement établie sur des modèles animaux.
Finalement, Sylvie Briand, responsable de la prévention des épidémies et des pandémies à l’OMS, précise que les experts tentent de déterminer la cause de cette « situation inhabituelle », affirmant que les enquêtes préliminaires ne semblent pas indiquer que le virus responsable de la variole du singe ait changé ou muté. Elle estime vraisemblable l’espoir que la propagation puisse être endiguée, et conclut : « Nous avons une bonne fenêtre de tir pour arrêter la transmission maintenant. Si nous mettons en place les bonnes mesures maintenant, nous pourrons probablement contenir cela facilement ».