Une ville entière aurait disparu dans l’explosion d’une roche spatiale il y a environ 3600 ans

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Vue d'artiste de l'explosion, basée sur des preuves. | Allen West et Jennifer Rice
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Selon la Bible, Sodome et Gomorrhe — des villes mentionnées dans la Bible, localisées hypothétiquement au sud de la mer Morte, dans l’actuelle Jordanie — auraient été détruites par Dieu pour les innombrables péchés commis par leurs habitants. Une équipe d’experts prouve aujourd’hui que ce récit biblique aurait été inspiré de l’explosion d’une roche spatiale géante survenue il y a environ 3600 ans au-dessus de la ville de Tall el-Hammam.

Près de 15 ans de fouilles minutieuses sur le site archéologique de Tall el-Hammam, une ancienne ville fortifiée du sud de la vallée du Jourdain, située au nord-est de la mer Morte, auront été nécessaires pour parvenir à cette conclusion. Une couche épaisse de charbon de bois et de cendres, de même que de multiples traces de métaux et de poteries fondus, suggèrent qu’un violent incendie a détruit cette ville.

Des modélisations de scénarios d’impact cosmique ont révélé que le coupable d’une catastrophe de cette ampleur ne pouvait être qu’un astéroïde, similaire à celui qui a chuté en Russie en juin 1908 dévastant des centaines de kilomètres carrés de forêt sibérienne inhabitée autour de la rivière Tunguska. Cette roche spatiale aurait explosé à environ 4 km d’altitude au-dessus de Tall el-Hammam, dégageant une puissance 1000 fois supérieure à la bombe d’Hiroshima.

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Un astéroïde comme seule explication possible

L’explosion aurait largement augmenté la température de l’air, jusqu’à plus de 2000°C, entraînant la combustion instantanée de toute forme de vie et de tous les matériaux (bois, tissus, poteries, briques de boue, armes, etc.) ; aucun des quelque 8000 habitants, ni aucun animal n’a survécu à ce brasier. Alors que la ville de Tall el-Hammam était en feu, une onde de choc massive a déferlé sur la ville quelques secondes après l’explosion ; cette onde se déplaçant à environ 1200 km/h selon les calculs a fini de ravager la ville, détruisant les bâtiments en flammes qui tenaient encore debout.

carte site Tall el-Hammam
Aujourd’hui appelée Tall el-Hammam, la ville se trouve à environ 11 kilomètres au nord-est de la mer Morte, dans l’actuelle Jordanie. © NASA

Le choc a également anéanti les étages supérieurs du palais, dont les débris ont été soufflés jusqu’à une autre vallée proche. Environ une minute plus tard, à 22 km à l’ouest de Tall el-Hammam, les vents de l’explosion ont frappé de la même façon la ville biblique de Jéricho, qui a elle aussi fini dans les flammes.

Sur le site, les archéologues ont tout d’abord observé une couche sombre, d’environ 1,5 mètre d’épaisseur, constituée de charbon de bois, de cendres, de briques de boue et de poteries fondues. Cette couche, dénommée « couche de destruction », n’a pas pu être causée par une éruption volcanique, ni par un séisme ou une guerre ; en effet, ces événements n’auraient pas pu provoquer une telle élévation de température.

À l’aide d’un calculateur d’impact accessible en ligne — mis au point par des experts en impacts d’astéroïdes, à partir d’événements d’impact connus et de détonations nucléaires — ils ont donc modélisé plusieurs scénarios correspondant aux preuves collectées sur le site archéologique. Des dizaines de scientifiques, issus des États-Unis, du Canada et de République tchèque, se sont livrés à l’analyse des matériaux excavés, de manière à reconstituer les événements. C’est ainsi que l’hypothèse de l’astéroïde est apparue comme la plus probable.

Des températures extrêmes confirmées par une série de preuves

Le site contenait en effet énormément de quartz choqué, soit des cristaux de quartz déformés sous l’effet d’une pression particulièrement intense (de l’ordre de 5 gigapascals) liée à une onde de choc ; ces déformations se caractérisent par des glissements le long de plans parallèles, similaires à des stries. Or, on ne trouve ces quartz choqués qu’au niveau des cratères d’impact (tels que celui de Chicxulub) et sur les sites d’explosion atomique.

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Images au microscope électronique de nombreuses petites fissures dans des grains de quartz choqués trouvés sur le site de Tall el-Hammam. © Allen Ouest

La couche de destruction contient également de minuscules diamonoïdes : sous les pressions et les températures élevées générées par la boule de feu, le bois et les plantes de la région ont semble-t-il été instantanément transformés en de minuscules cristaux, aussi durs que du diamant, mesurant à peine quelques dizaines de micromètres.

Autre preuve indéniable de l’explosion d’un astéroïde : la liquéfaction des différents matériaux trouvés sur le site. Des expériences en laboratoire ont montré en effet que des températures supérieures à 1500°C étaient nécessaires pour faire fondre ainsi de la poterie et des briques de boue. Cette température élevée est confirmée par la présence de minuscules boules de matériau fondu, plus petites que les particules de poussière en suspension dans l’air, appelées sphérules ; celles-ci sont constituées de sable, de plâtre ou de fer vaporisés, qui fondent à environ 1590°C. Enfin, les scientifiques ont observé sur les restes de poterie et de verre fondus de minuscules grains métalliques, tels que de l’iridium, du platine et du silicate de zirconium, dont les points de fusion respectifs s’élèvent à 2446°C, 1768°C et 1540°C.

Reste à découvrir pourquoi la ville et plus d’une centaine de sites alentour ont été abandonnés pendant plusieurs siècles après cet événement. Les chercheurs pensent qu’il est possible que les niveaux élevés de sel déposés lors de l’explosion (par vaporisation de grosses quantités d’eau de la mer Morte) aient rendu les terres de toute la vallée impropres à la culture. Personne n’aurait pu vivre dans cette vallée, jusqu’à ce que les précipitations (généralement minimes dans ce climat désertique) soient suffisantes pour éliminer le sel des champs.

Finalement, cette étude pourrait confirmer que la ville de Sodome évoquée dans la Bible et Tall el-Hammam ne sont qu’une seule et même cité. La catastrophe aurait donc été rapportée par un témoin oculaire, puis transmis de génération en génération. Ce serait alors la toute première trace écrite d’un événement aussi dévastateur.

Source : Scientific Reports, T. E. Bunch et al.

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