Le concept d’un univers simulé par une intelligence artificielle supérieure existait bien avant qu’il ne soit popularisé par la série de films à succès « Matrix » depuis 1999. En effet, cela fait désormais des décennies que même la communauté scientifique, dont des physiciens de renom, se penche sur la question suivante : « Vivons-nous dans une simulation informatique » ? Après les hypothèses farfelues d’Elon Musk et celles plus solides de Melvin Vopson, Thomas Campbell, ancien physicien de la NASA, serait lui aussi en train de réaliser des expériences visant à déterminer s’il existe un moyen de valider l’hypothèse de la simulation. En outre, divers chercheurs américains ont décidé de reproduire ces expériences de leur côté.
En 2003, Nick Bostrom, éminent philosophe de l’Université d’Oxford, a suggéré qu’il est très probable que nous vivions dans une simulation. Selon lui, « une civilisation avancée pourrait atteindre un point où sa technologie est si sophistiquée que les simulations seraient impossibles à distinguer de la réalité ». Il a ajouté à l’époque que « les participants ne seraient pas conscients d’être dans une simulation ».
En 2016, Elon Musk a avancé une hypothèse similaire, que Melvin Vopson, physicien à l’Université de Portsmouth, a poussée plus loin en s’appuyant sur l’infodynamique. Ce nouveau champ de recherche amené par Vopson réside sur la façon dont l’information est stockée et transformée. En appliquant ces principes à la physique classique, Vopson a même proposé une nouvelle loi qui remet en question, selon lui, les fondements mêmes de la compréhension de l’Univers. Il a d’ailleurs consacré un livre à ce sujet, qu’il a intitulé « Reality Reloaded ».
De son côté, Thomas Campbell, ancien physicien de la NASA, est en train de réaliser diverses expériences sur l’hypothèse de la simulation, qu’il a détaillées dans un article publié dans The international Journal of Quantum Foundations en 2017. Il a ensuite créé le Centre pour l’unification de la science et de la conscience (CUSAC), une organisation à but non lucratif visant à financer ses efforts de recherche. « Les expériences devraient fournir des preuves scientifiques solides que nous vivons dans une réalité virtuelle simulée par ordinateur », déclare le groupe.
Vers une nouvelle version de l’expérience des fentes de Young
L’expérience des fentes de Young est l’une des plus célèbres et fascinantes en physique quantique. C’est d’ailleurs pour cette raison que Campbell a décidé de la mettre en tête de liste de ses 5 expériences clés. Initialement réalisée par Thomas Young au début du XIXe siècle pour démontrer la nature ondulatoire de la lumière, elle a pris une nouvelle dimension avec les avancées de la mécanique quantique.
Le dispositif de Young est relativement simple : une source émet des particules (des photons ou des électrons) vers une barrière percée de deux fentes parallèles. Derrière cette barrière, un écran de détection enregistre l’impact des particules qui ont traversé les fentes. Lorsque les particules sont émises sans qu’aucun dispositif de mesure ne surveille leur passage à travers les fentes, l’écran de détection révèle un motif d’interférence. Ce motif, semblable à celui observé avec des ondes, suggère que chaque particule passe simultanément par les deux fentes et interfère avec elle-même. C’est ce comportement qui indique la nature ondulatoire des particules quantiques.
Cependant, en introduisant un dispositif d’observation, cela peut modifier radicalement les résultats à l’échelle quantique. Ainsi, cette expérience illustre également le concept de superposition quantique, où les particules existent dans plusieurs états simultanément, jusqu’à ce qu’une mesure soit effectuée. Cette observation force la particule à « choisir » une trajectoire qui rompt la superposition et élimine le motif d’interférence.
Campbell a imaginé une version alternative de cette expérience à double fente pour soutenir l’idée que la conscience et l’information sont fondamentales à la réalité. Il pense qu’en supprimant l’observateur, aucune information n’est réellement enregistrée. Le point de vue de Campbell va donc à l’encontre des notions actuelles en physique quantique.
Avec cette expérience, il rejoint ainsi l’hypothèse de Bostrom, qui suggère que sans « participant » (l’observateur dans l’expérience des fentes de Young), l’univers n’existerait pas. Cela prouve, selon Campbell, que « l’univers est exclusivement participatif ». Cependant, à la différence de ce que pense Bostrom, Campbell affirme que « notre conscience n’est pas un produit de la simulation, elle est fondamentale pour la réalité ».
Plus récemment, des chercheurs de l’Université d’État polytechnique de Californie (CalPoly) se sont eux aussi lancés dans la réalisation de cette première expérience de Campbell.
Vers une meilleure compréhension de la réalité ?
Pour illustrer son hypothèse, qui rappelons-le, avance que nous vivons dans une simulation informatique, Campbell a également par le passé réalisé d’autres expériences, qu’il a décrites dans son livre « My Big TOE ». L’hypothèse qui concerne l’interaction des intentions avec la réalité physique en fait partie. Cette expérience vise à montrer le rôle central de la conscience dans la simulation.
Le physicien suggère notamment que les intentions humaines affectent les résultats physiques, comme l’influence de la pensée positive sur la santé ou de la conscience sur les résultats de générateurs de nombres aléatoires. Son but ? Montrer que la conscience peut interagir avec la réalité et l’influencer. Campbell soutient également que si l’être humain est en mesure de créer des simulations informatiques complexes, cela renforce l’idée que la conscience pourrait exister dans une simulation. « Les cinq expériences pourraient remettre en question la compréhension conventionnelle de la réalité et mener à la découverte de liens profonds entre la conscience et le cosmos », avance Campbell dans l’un de ses documents d’étude.