4 phénomènes physiques qui semblent dépasser la vitesse de la lumière

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Lorsqu’Albert Einstein démontra que la vitesse de la lumière dans le vide était identique dans tous les référentiels, faisant de celle-ci une constante universelle, il détermina également une limite à cette vitesse. Aujourd’hui, l’affirmation « rien ne peut aller plus vite que la lumière » a pratiquement valeur de proverbe. Toutefois, certains phénomènes physiques semblent parfois donner l’impression, à tort ou à raison, que cette limite fondamentale n’est pas si infranchissable.

En 1905, le physicien allemand Albert Einstein publie ses travaux sur la relativité restreinte. Dans ces derniers, il détermine une vitesse limite, notée « c » (pour célérité), à laquelle toute particule de masse nulle se déplace et impossible à atteindre pour tout objet massif. Plus précisément, il s’agit de la vitesse maximale à laquelle l’information peut voyager dans le vide. Il s’avère que cette vitesse limite coïncide donc avec la vitesse de la lumière dans le vide, fixée à 299’792’458 m/s.

La théorie de la relativité restreinte a également apporté l’une des formules les plus emblématiques de la physique : E = mc², traduisant l’équivalence masse-énergie. Cette équivalence montre que plus un objet massif est accéléré à des vitesses relativistes, plus l’énergie nécessaire pour fournir cette accélération est élevée ; pour atteindre la vitesse limite, il faudrait donc fournir une énergie infinie car la masse de l’objet tendrait elle-même vers l’infini.

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Actuellement, il n’y a qu’à l’aide du LHC que les physiciens sont parvenus à s’approcher de la limite fondamentale fixée par la relativité. En effet, à l’intérieur de l’accélérateur de particules, des protons sont accélérés à 99,9999991% de la vitesse de la lumière dans le vide. Mais comme le rappelle le prix Nobel de physique David Gross, les particules n’atteindront jamais cette dernière. Malgré cela, quelques phénomènes physiques peu communs donnent l’étonnante impression de dépasser « c ».

1. L’effet Vavilov-Tcherenkov : quand une particule dépasse le « mur de la lumière »

Quand un objet atteint la vitesse du son dans l’air (soit 1224 km/h), une onde de choc est produite sous forme de bang supersonique ; c’est le mur du son. L’on pourrait donc s’attendre, en théorie, à observer le même phénomène concernant la vitesse de la lumière, une sorte de « mur de la lumière ». Ce phénomène lumineux porte le nom d’effet Vavilov-Tcherenkov.

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Effet Vavilov-Tcherenkov au sein de l’Advanced Test Reactor. Crédits : Argone National Laboratory

Observée et étudiée en 1934 par les physiciens russes Segueï Vavilov et Pavel Tcherenkov, la radiation Tcherenkov (même si les deux physiciens sont à l’origine de la découverte, seul le nom de Tcherenkov apparaît dans la publication, celui-ci obtiendra également le prix Nobel de physique en 1958) est un flash lumineux produit lorsqu’une particule chargée se déplace plus vite que la lumière dans un milieu diélectrique.

Dans un milieu matériel d’indice de réfraction « n », la lumière se déplace à une vitesse c1 = c/n. Dans l’eau, la lumière se déplace à 75% de sa vitesse dans le vide. Donc d’autres particules peuvent se déplacer à une vitesse supérieure à celle de la lumière dans l’eau. C’est notamment ce qu’il se passe au sein des réacteurs nucléaires refroidis par un bassin d’eau ; les électrons de hautes énergies issus des réactions nucléaires se propagent plus vite que les photons dans le bassin, produisant un flash lumineux bleuté.

Sur sa trajectoire, la particule chargée modifie la polarisation électronique des atomes rencontrés. Ces derniers émettent un rayonnement dont l’interférence des ondes émises est constructive, créant de ce fait un cône de lumière. La fréquence de cette lumière dépend du milieu considéré. Dans le cas de l’eau, le flash prend une couleur bleu/violet.

2. L’expansion de l’univers : l’espace plus rapide que la lumière ?

En 1980, les physiciens Alain Guth et Andreï Linde proposent le modèle inflationnaire. À l’issue du Big Bang, l’univers aurait subi une phase d’expansion brève et violente, augmentant sa taille d’au moins un facteur 1030. Pour qu’une telle dilatation dans un intervalle de temps aussi court soit possible, celle-ci a dû se dérouler à une vitesse extrêmement rapide. Plus rapide que la vitesse de la lumière dans le vide.

Néanmoins, la vitesse limite définie par Einstein ne s’applique qu’aux objets massifs ou transportant de l’information. Qu’en est-il alors de l’espace-temps seul, comme ce fut le cas lors de l’inflation ? « Puisque la trame de l’espace-temps peut être réduite à de l’espace vide, elle peut se dilater plus rapidement que la vitesse de la lumière, car aucun objet matériel n’intervient dans le processus » explique le célèbre physicien Michio Kaku. « Dès lors, l’espace peut très certainement s’étendre plus vite que la lumière ».

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Le phénomène d’expansion de l’univers peut être vu comme un ballon sur lequel sont collés des pastilles : c’est l’espace entre les pastilles qui augmente, les pastilles, elles, ne se déplacent pas. Crédits : TAKE 27 LTD/ SPL

C’est également ce qu’il se passe sur les grandes échelles dans le phénomène d’accélération de l’expansion de l’univers. Sur de telles distances, l’expansion de l’univers est plus rapide que « c ». Cela ne pose cependant aucun problème au regard de la relativité restreinte, et ce, pour deux raisons. La première est que seul l’espace se dilate, et l’espace en lui-même n’est composé d’aucune information, énergie ou masse ; les objets massifs, quant à eux, ne se déplacent pas, ils sont simplement entraînés par l’expansion. La seconde est que l’expansion n’est pas techniquement caractérisée par une vitesse mais par un taux (le taux d’expansion), il ne peut donc être directement comparé à « c ».

3. L’intrication quantique : un transfert instantané ?

La mécanique quantique a apporté son lot de phénomènes étranges parmi lesquels l’intrication quantique. Lorsque deux systèmes quantiques (par exemple des particules) sont intriquées, elles ne forment alors plus qu’un seul système cohérent, unique et solidaire ; l’on ne peut plus décrire chacune des particules séparément car leurs deux fonctions d’onde initiale se fondent en une seule. La mesure physique d’une particule entraîne instantanément, indifféremment de la distance les séparant, la mesure de l’autre.

Lorsque deux particules A et B sont intriquées, elles ne forment plus qu’un seul système unique, partageant un même espace mathématique commun. Crédits : Macmillan Publishers Limited

Cette mesure instantanée donne souvent l’impression d’un processus se déroulant bien plus vite que la lumière. Cependant, il s’agit ici d’une erreur d’interprétation mathématique. En effet, dans l’intrication, aucune information n’est transférée ou échangée entre les deux particules.

L’instantanéité de la mesure résulte simplement de l’unicité de la fonction d’onde ; puisque les deux particules partagent la même fonction d’onde, tout ce qui affecte cette dernière affecte donc simultanément les deux particules. En d’autres mots, les particules partagent un espace mathématique commun et quand une mesure est effectuée dans cet espace, elle touche simultanément les deux particules.

En outre, l’intrication quantique ne se soustrait pas au problème de la mesure. C’est-à-dire qu’il est impossible de déterminer l’état dans lequel se trouveront chacune des particules après la mesure. Il est donc impossible d’utiliser l’intrication pour développer un système de communication instantané. Pour finir, comme nous l’avons vu, l’instantanéité n’est qu’un processus mathématique qui ne peut pas être assimilé à une véritable vitesse, et ne peut donc pas être comparé à la vitesse de la lumière dans le vide.

4. Les trous de ver : un voyage supraluminique ?

En 1915, Albert Einstein publie sa théorie de la relativité générale dans laquelle l’espace et le temps sont intimement mêlés et deviennent une entité dynamique. Suite à ces travaux, nombre de physiciens se sont évertués à rechercher les différentes solutions aux équations du champ gravitationnel. Ces solutions, encore appelées « métriques », permettent de décrire diverses configurations de l’espace-temps.

Parmi ces différentes métriques l’on trouve la métrique de Schwarzschild (décrivant un trou noir statique), la métrique de Kerr (décrivant un trou noir en rotation), ou encore la métrique FLRW (univers homogène et isotrope en expansion). Si ces solutions sont bien décrites et mathématiquement cohérentes, d’autres, moins bien comprises, ont également vu le jour. C’est notamment le cas du trou de ver, qui décrit une configuration particulière dans laquelle une zone de l’espace-temps est repliée sur elle-même, formant un « tunnel ».

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Un trou de ver est une zone de l’espace-temps repliée sur elle-même, formant un raccourci entre deux points de l’univers. Crédits : Edobric/ Shutterstock

Replier ainsi une partie de l’espace-temps sur elle-même permettrait de joindre deux bouts d’univers normalement distants de plusieurs milliers, si ce n’est plusieurs millions ou milliards, d’années-lumière et, théoriquement, d’emprunter ce « raccourci » pour parcourir de très grandes distances en très peu de temps. Voyager sur de si grandes distances en un temps si bref est parfois perçu comme un voyage supraluminique.

Néanmoins, il est là aussi nécessaire de repréciser le contexte d’un tel phénomène. Dans le cas d’un voyageur qui emprunterait le tunnel d’un trou de ver, il s’agirait simplement d’un raccourci spatio-temporel, et non d’un voyage à une vitesse supérieure à celle de la lumière dans le vide. En effet, dans le trou de ver, le voyageur conserve sa vitesse de croisière. Il n’y a donc aucun voyage supraluminique.

Même si le physicien Kip Thorne, en 1988, publiait des travaux affirmant la possibilité de maintenir stable l’ouverture d’un trou de ver de manière à s’en servir pour se déplacer, une telle stabilité nécessiterait l’apport de matière exotique. La matière exotique représente une forme de matière non-baryonique hypothétique potentiellement présente dans notre univers.

Depuis ces travaux, plusieurs physiciens ont tenté d’améliorer les modèles théoriques des trous de ver. « Cela a déclenché de nombreuses recherches par de nombreux physiciens ; mais aujourd’hui, pratiquement 30 ans après, aucune réponse satisfaisante n’a encore été trouvée » conclut Thorne.

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