En seulement 40 ans, la mégafaune mondiale d’eau douce a décliné de 88%

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Bien qu’une grande partie de la faune aquatique évolue dans les mers et océans, de nombreux écosystèmes existent également dans les eaux douces tels que les lacs et rivières. Et, au même titre que leurs homologues marins, les mégafaunes d’eau douce font aujourd’hui face à une crise démographique sans précédent : en l’espace de 40 ans, la population des grandes espèces d’eau douce a diminué de 88%. Les chercheurs appellent donc urgemment à améliorer les actions de conservation pour ces espèces hautement menacées.

Les rivières et les lacs couvrent à peu près 1% de la surface de la Terre, mais abritent un tiers des espèces de vertébrés dans le monde. Toutefois, la vie des écosystèmes en eau douce est fortement menacée. Des scientifiques de l’Institut Leibniz d’écologie des eaux douces et des pêches dans les eaux intérieures (IGB) et des collègues internationaux ont quantifié le déclin mondial des grands animaux d’eau douce. Les résultats ont été publiés dans la revue Global Change Biology.

Entre 1970 et 2012, les populations mondiales de mégafaune d’eau douce ont diminué de 88%, soit deux fois plus que les populations de vertébrés sur terre ou dans l’océan. Les grandes espèces de poissons sont particulièrement touchées. Et pourtant, il reste de grandes lacunes dans les mesures de surveillance et de conservation de la mégafaune d’eau douce, en particulier dans les zones à forte biodiversité.

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Une diminution alarmante principalement due aux activités humaines

La mégafaune d’eau douce comprend tous les animaux d’eau douce pesant 30 kg ou plus, tels que les espèces de dauphins des rivières, les castors, les crocodiles, les tortues géantes et les esturgeons. Les chercheurs ont compilé les données chronologiques disponibles sur 126 espèces de mégafaunes d’eau douce dans le monde, ainsi que les données historiques et contemporaines sur la répartition géographique de 44 espèces en Europe et aux États-Unis.

« Les résultats sont alarmants et confirment les craintes des scientifiques impliqués dans l’étude sur la protection de la biodiversité des eaux douces » déclare Sonja Jähnig, auteure principale de l’étude et experte des effets du changement global sur les écosystèmes fluviaux à l’IGB. De 1970 à 2012, les populations mondiales de mégafaune d’eau douce ont diminué de 88%.

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Graphe montrant le déclin de la mégafaune d’eau douce (haut), notamment concernant les poissons (bas), entre 1970 et 2012. Crédits : Nature

Notamment dans les régions de l’Indomalaya (99%) et du Paléarctique (97%), la première couvrant l’Asie du Sud et du Sud-Est et la Chine méridionale, la seconde couvrant l’Europe, l’Afrique du Nord et la plupart des pays d’Asie. Les espèces de poissons de grande taille telles que les esturgeons, les salmonidés et les poissons-chats géants sont particulièrement menacées : avec un déclin de 94%, suivies des reptiles avec 72%.

La surexploitation est la principale menace pour la mégafaune d’eau douce, car elle est souvent ciblée pour la viande, la peau et les œufs. « En outre, le déclin des grandes espèces de poissons est également attribué à la perte de rivières à écoulement libre car l’accès aux frayères et aux aires d’alimentation est souvent bloqué par des barrages. Bien que les grandes rivières du monde aient déjà été très fragmentées, 3700 autres grands barrages sont prévus » explique Fengzhi He, biologiste marin à l’IGB.

Des actions de conservation efficaces pour certaines espèces

Grâce à des actions de conservation ciblées, les populations de 13 espèces de mégafaunes, dont l’esturgeon vert (Acipenser medirostris) et le castor d’Amérique (Castor canadensis), sont restées stables voire en augmentation aux États-Unis. En Asie, la population de dauphins du fleuve Irrawaddy (Orcaella brevirostris) dans le bassin du Mékong a augmenté pour la première fois en vingt ans. En Europe, les stratégies de conservation efficaces et à grande échelle semblent plus difficiles à mettre en œuvre, probablement en raison de frontières internes et de différences dans la prise de conscience environnementale des pays.

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Des plans de conservations ont permis de sauver certaines espèces menacées d’extinction, comme les dauphins de la rivière Irrawaddy. Crédits : Roland Seltre

Néanmoins, le castor d’Eurasie (Castor fiber), par exemple, a maintenant été réintroduit dans de nombreuses régions où il a disparu. En Allemagne, l’IGB collabore avec des partenaires internationaux pour réintroduire deux espèces d’esturgeons indigènes, l’esturgeon européen (Acipenser sturio) et l’esturgeon noir (Acipenser oxyrinchus) dans les eaux européennes.

Un plan de conservation encore largement inadéquat

Bien que la mégafaune d’eau douce soit très menacée, les mesures de conservation actuelles sont inadéquates pour de nombreuses espèces. « Selon la liste rouge des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature, plus de la moitié des espèces de mégafaune d’eau douce évaluées sont considérées comme menacées d’extinction. Néanmoins, elles font l’objet de moins de recherche et d’attention en matière de conservation que les mégafaunes dans les écosystèmes terrestres ou marins » rappelle Jähnig.

Le déclin mondial, maintenant quantifié, de la mégafaune d’eau douce, souligne le besoin urgent d’actions de conservation pour cette biodiversité. Il est important d’améliorer le suivi des tendances démographiques et de la répartition des espèces d’eau douce dans des régions telles que l’Asie du Sud-Est, l’Afrique et l’Amérique du Sud.

Sources : Global Change

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