Selon une nouvelle étude scientifique impliquant un véritable recensement cosmique, nous avons grandement sous-estimé le nombre de trous noirs présents dans le cosmos : il y en aurait plusieurs dizaines de millions dans la Voie lactée !
Lorsque les scientifiques ont finalement détecté l’existence des ondes gravitationnelles l’année dernière, il ne s’agissait pas seulement d’un moment historique confirmant qu’Einstein avait bel et bien raison dès le départ.
Les ondes gravitationnelles, ces véritables oscillations de la courbure de l’espace-temps, proviennent de la fusion de deux trous noirs et se propagent à grande distance à travers l’espace.
Comme l’explique l’astrophysicien James Bullock de l’Université de Californie, à Irvine aux États-Unis : « la détection des ondes gravitationnelles était une affaire énorme, car c’était la confirmation d’une prédiction clé de la théorie de la relativité générale d’Einstein ».
Après la découverte historique de LIGO (le Laser Interferometer Gravitational-Wave Observatory, soit l’observatoire d’ondes gravitationnelles par interférométrie laser en français), l’équipe de Bullock a effectué des calculs théoriques durant 18 mois, sur ce que nous savons des galaxies et des étoiles, ainsi que sur les trous noirs qui se forment dans leur sillage.
« Nous avons regardé de plus près les résultats astrophysiques de la fusion de deux trous noirs de 30 fois la masse solaire. C’était tout simplement étonnant et nous nous sommes demandés : « À quel point est-ce que des trous noirs de cette taille sont-ils communs, et à quelle fréquences fusionnent-ils ? » », ajoute Bullock.
Grâce à leurs calculs les chercheurs ont pu créer une sorte d’inventaire cosmique et ils supposent que nous avons considérablement sous-estimé le nombre de trous noirs qui se cachent dans l’espace : en effet, selon leurs recherches, il y aurait probablement des dizaines de millions de trous noirs dans la Voie lactée, peut-être même encore plus. « Nous pensons que nous avons démontré qu’il pourrait y avoir jusqu’à 100 millions de trous noirs dans notre galaxie », explique Bullock.
Il faut savoir qu’il existe différents types de trous noirs. Par exemple, les trous noirs stellaires se forment à la suite de l’effondrement gravitationnel d’une étoile massive, et les scientifiques pensent que la plupart des trous noirs de ce type possèdent une masse à peu près comparable à celle du Soleil (voire quelques masses solaires).
Mais les trous noirs supermassifs qui se cachent derrière la découverte des ondes gravitationnelles par LIGO, ont une masse bien supérieure. En effet, un trou noir supermassif peut avoir une masse faisant des milliards de fois celle du Soleil… Il existerait également des trous noirs intermédiaires (situées entre ces deux échelles de masse, possédant quant à eux, quelques milliers de fois la masse du Soleil).
La différence entre ces différents types de trous noirs, s’expliquerait par la manière dont ces objets ont été formés : soit par exemple, le taux d’éléments métalliques dans les étoiles qui ont précédé leur formation. Il faut savoir que les étoiles riches en métaux, comme le Soleil, projettent de nombreux éléments lourds qu’ils contiennent au cours de leur vie, permettant de produire un trou noir de masse inférieure à la fin de leur existence. En revanche, les étoiles qui possèdent moins d’éléments lourds, libèrent moins de leur masse au cours de leur vie, ce qui leur permet de finalement produire un trou noir avec une masse bien plus grande.
C’est en calculant ce que nous savons sur l’existence et la distribution de ces étoiles à travers la galaxie, que l’équipe a pu émettre un spectre de la population de trous noirs dans la Voie lactée. Incluant les trous noirs de type binaires qui ont fusionné et qui émettent des ondes gravitationnelles. « Nous avons une très bonne compréhension de la population globale des étoiles dans l’Univers et de leur distribution de masse au fur et à mesure qu’elles évoluent, nous permettant de déterminer combien de trous noirs devraient avoir été formés avec 100 masses solaires, contre 10 masses solaires », explique Bullock. « Nous avons pu déterminer combien de gros trous noirs il devrait exister, et cela a fini par se compter en millions, soit beaucoup plus que prévu », ajoute-t-il.
Sur les 100 milliards de trous noirs estimés par les chercheurs, 10 millions d’entre eux auraient une masse de 5o fois celle du Soleil. Comme il s’agit de chiffres très élevés, les chercheurs soulignent également que les fusions de trous noirs sont un phénomène bien plus courant que ce que nous pensions auparavant, et que nous devrions pouvoir les observer plus souvent.
« À l’heure actuelle, nous savons que ces fusions de trous noirs se produisent dans une large étendue du ciel, mais pas avec beaucoup de précision », explique Bullock. « Nous espérons que nous pourrons trianguler leurs positions dans le ciel et commencer à comprendre dans quelle galaxie ils fusionnent », ajoute-t-il. Selon l’équipe de recherche, le pourcentage de fusion de ce type des trous noirs observés lors de la détection d’ondes gravitationnelles se situerait entre 0,1 % et 1 %, et permettrait l’observation des ondes gravitationnelles.
Bien que les estimations révèlent des chiffres absolument inimaginables, les chercheurs ont jugé nécessaire de souligner le fait qu’il ne faille pas s’inquiéter. « Ce n’est pas comme si nous avions bientôt besoin d’aller nous procurer une « assurance trous noirs »; ce n’est pas comme si nous étions plus en danger d’être aspirés par un trou noir maintenant, que nous l’étions auparavant. C’est tout simplement incroyable que l’Univers ait été créé à partir de ce genre d’éléments…», a conclu Bullock.