Au début du XXème siècle, le physicien allemand Max Planck devient l’un des fondateurs de la mécanique quantique. Ses travaux permettront de conceptualiser une période cosmologique du début de l’univers lors de laquelle les interactions fondamentales sont unifiées : l’ère de Planck.
L’ère de Planck est une époque de l’univers prenant place aussitôt après le Big Bang. Les équations d’Einstein, dans le cadre de la relativité générale, aboutissent à une singularité gravitationnelle initiale lorsqu’il s’agit de considérer le commencement de l’univers. Dans ce cadre, l’ère de Planck désigne la période apparaissant juste après la naissance de l’univers à partir de cette singularité. Elle est nommée en l’honneur de Max Planck, dont les travaux en mécanique quantique ont contribué à la formulation théorique de cette période.
Selon les modèles théoriques, au cours de cette époque, les trois interactions fondamentales du Modèle Standard – électromagnétisme, interactions nucléaires faible et forte – et la gravité, sont unifiées. Les effets gravitationnels quantiques sont dominants durant l’ère de Planck, c’est pourquoi le modèle du Big Bang doit être étendu ou modifié. En effet, le Big Bang est construit sur la théorie de la relativité générale, qui ne décrit l’univers qu’à l’échelle macroscopique, sans prendre en compte les phénomènes quantiques. Une théorie de la gravité quantique est donc nécessaire pour unifier relativité générale et mécanique quantique, ainsi qu’une « théorie du tout » pour décrire l’unification des quatre interactions fondamentales.
Il est communément admis que la durée de l’ère de Planck est égale au temps de Planck, soit 10-43 seconde. Cependant, l’enchaînement des événements cosmologiques ayant lieu dans ce laps de temps est extrêmement complexe à déterminer, car les notions de temps et d’espace perdent leurs sens physiques classiques. La géométrie de l’univers est encore en cours de « construction » et celle-ci est décrite différemment selon les théories actuelles. En théorie des supercordes, durant cette période, les dimensions sont prisonnières des cordes et ne sont pas encore déroulées. En gravité quantique à boucles, la mousse de spins commence tout juste à émerger.
Concernant le temps, celui-ci perd son caractère réel et devient potentiellement imaginaire ; les adjectifs « réel » et « imaginaire » sont ici à prendre au sens mathématique du terme. En effet, en mathématiques, les nombres imaginaires peuvent être représentés perpendiculairement aux nombres réels dans le plan complexe ; il est possible de représenter le temps réel et imaginaire de la même manière. Un temps imaginaire n’est pas un temps causal suivant la flèche thermodynamique du passé vers le futur, mais un temps où passé/présent/futur sont mélangés, sans direction privilégiée.
Cette période est également caractérisée par son énergie, égale à l’énergie de Planck, soit 1.956×109 J ou 1019 GeV. Bien que la topologie de l’espace-temps ne soit pas encore déterminée, l’ère de Planck peut être assimilée à une membrane de pure énergie d’environ 20 microgrammes et de longueur égale à longueur de Planck, soit 1.62 10-35 m. La température qui règne à l’intérieur de cette membrane est de l’ordre de la température de Planck, soit 1.417×1032 °C. Là aussi, la structure de la membrane dépend de la théorie considérée. Elle n’est abordée qu’en théorie des supercordes, où elle est constituée d’un condensat de cordes vibrantes.
Au regard de ces valeurs démesurées, les théories physiques actuelles sont incapables de décrire la situation de l’univers au cours de cette période, comme si elles se heurtaient à une barrière théorique. C’est pourquoi la combinaison de l’énergie, la longueur, la durée et la température de Planck forment ce que l’on appelle le « mur de Planck », qui constitue un mur conceptuel aux observations et aux modèles théoriques.
Puisque lors de l’ère de Planck la structure topologique de l’univers est en construction, certaines symétries du vide peuvent se briser au cours de violentes transitions de phases. Ces brisures de symétrie peuvent faire émerger des défauts topologiques. Ainsi, certains modèles prédisent par exemple l’existence de monopôles magnétiques.
Les monopôles magnétiques sont théorisés par Paul Dirac en 1931 dans le cadre de la mécanique quantique et correspondent à des particules portant une charge magnétique ponctuelle, c’est-à-dire possédant un unique pôle magnétique. Il est également possible que des instantons aient été présents à cette période. Introduits par Gérard ‘t Hooft en 1975, les instantons sont des configurations euclidiennes des champs correspondant à des effets de tunnel quantique entre les vides.
Il est également possible que, sous l’extrême densité énergétique, des trous noirs virtuels se soient formés. En mécanique quantique, un trou noir virtuel est un trou noir né des fluctuations quantiques du vide possédant une masse de l’ordre de la masse de Planck, et une durée de vie de l’ordre du temps de Planck.