Les dolmens sont des constructions mégalithiques préhistoriques constituées de plusieurs dalles de pierres agencées en différentes configurations. Plusieurs ont été érigés à travers le monde. Si certains sont encore visibles, d’autres ont disparu sous les eaux. C’est le cas du dolmen de Guadalperal en Espagne, qui a été immergé suite à la construction d’un réservoir artificiel. Mais sous la vague de chaleur qui a traversé l’Europe cet été, le niveau des eaux du réservoir a suffisamment baissé pour que le dolmen réapparaisse temporairement, laissant aux archéologues une chance de l’étudier en détails.
Pendant des décennies, un ancien cercle de pierres est resté invisible sous les eaux du réservoir espagnol de Valdecañas, ses plus hauts piliers brisant parfois la surface. Des mois de sécheresse intense ont provoqué la diminution des eaux du réservoir — suffisamment pour révéler la structure dans son intégralité. Étant donné qu’il est maintenant possible de relancer l’étude archéologique du cercle, il y a un débat sur la question de savoir si les pierres doivent être déplacées ou laissées à leur place.
Les 150 pierres disposées en ovale sont appelées le Dolmen de Guadalperal. Construit par des habitants de l’âge du cuivre ou du bronze sur les rives du Tage, il aurait au moins 4000 ans. Perdu dans le temps, le site antique a été redécouvert dans les années 1920 et a suscité l’intérêt de l’anthropologue allemand Hugo Obermaier, qui a analysé l’architecture et ses monticules rocheux environnants.
Dolmen de Guadalperal : un centre culturel, commercial et religieux
Les piliers verticaux — ou orthostates — ressemblent aux mégalithes grossièrement taillés du célèbre Stonehenge de Grande-Bretagne, sans oublier de nombreuses autres constructions similaires en Europe. Et cela aurait très bien pu servir des objectifs similaires.
Au fil des générations, des dalles horizontales ont été ajoutées pour former une structure ressemblant moins à un observatoire céleste qu’à une tombe ou à un abri fermé appelé dolmen. Si le site a jamais caché des reliques, les incursions habituelles des pilleurs de tombes les ont depuis longtemps détruites.
Les enquêtes d’Obermaier ont révélé une poignée d’objets personnels parmi les piles de pierres, suggérant que cela aurait pu être un lieu de sépulture. Des symboles tels qu’une forme humaine et éventuellement un serpent gravé dans une pierre horizontale à son entrée, suggèrent également un objectif sacré. Selon Angel Castaño, président de l’association culturelle locale Racines de Peraleda, le Dolmen de Guadalperal était en quelque sorte un centre commercial et culturel de la région.
Sécheresse et réapparition du dolmen
Mais malgré tous les mystères du site, au début du 20ème siècle, l’étude des pierres devait se faire rapidement. En quelques décennies à peine, le fleuve a été transformé en réservoir par l’État espagnol, engloutissant non seulement le dolmen, mais aussi un certain nombre de sites historiques importants de différentes périodes. Dans les années 1960, l’ancienne structure avait pratiquement disparu de la vue.
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Cette année a été difficile pour les agriculteurs européens. L’Espagne a souffert de son troisième mois de juin le plus sec du siècle et la sécheresse a également laissé des traces sur le réservoir de Valdecañas. La réémergence n’est pas seulement un spectacle que les habitants de la région et les touristes de passage peuvent apprécier. Deux clichés pris par le satellite Landsat de la NASA en 2013 et au début de cette année montrent toute la gravité des changements.
Déplacer les pierres ou les laisser sur place ?
« Toute ma vie, les gens m’avaient parlé du dolmen. J’en avais déjà vu certaines parties jaillir de l’eau, mais c’est la première fois que je le vois en entier. C’est spectaculaire, car vous pouvez apprécier l’ensemble du complexe pour la première fois depuis des décennies » déclare Castaño. Il soutient que les pierres devraient être déplacées dans un endroit sûr, à la fois pour des recherches plus poussées et pour renforcer l’industrie touristique locale.
Mais tous les archéologues ne sont pas aussi prompts à déplacer le dolmen. L’historienne Primitiva Bueno Ramírez, de l’Université d’Alcalá, est tout aussi désireuse d’apprendre autant que possible du site. Mais se précipiter à l’intérieur risquerait de faire des dégâts. « Nous avons besoin d’études de haute qualité utilisant les dernières technologies archéologiques. Cela peut coûter de l’argent, mais nous avons déjà l’une des choses les plus difficiles à obtenir – cet incroyable monument historique. Au final, l’argent est la partie la plus facile. Le passé ne peut pas être acheté » conclut Ramírez.