La vitamine D a beaucoup fait parler d’elle au début de la pandémie de COVID-19. Cette vitamine contribue en effet au bon fonctionnement du système immunitaire inné et les personnes infectées affichaient généralement des taux de vitamine D plus faibles que le reste de la population. Elle joue également un rôle majeur dans l’absorption du calcium et du phosphore, la minéralisation osseuse et la fonction musculaire. Une nouvelle étude suggère aujourd’hui qu’une supplémentation en vitamine D pourrait soulager les symptômes des personnes dépressives.
La vitamine D est synthétisée directement, au niveau de la peau, via l’exposition aux UVB solaires, à partir des dérivés du cholestérol naturellement présents dans l’organisme. Mais cette source est très variable selon les régions du monde, qui sont plus ou moins ensoleillées. L’alimentation permet heureusement de compléter cet apport : les poissons gras, les œufs, la viande, les champignons et les produits laitiers enrichis sont de bonnes sources de vitamine D. Pour les adultes, un apport de 15 microgrammes par jour est recommandé. Dans les faits, de nombreuses personnes ont une carence en vitamine D, surtout dans nos latitudes et notamment chez les personnes âgées — les capacités d’absorption et de synthèse de vitamine D diminuant avec l’âge.
Ces dernières années, plusieurs études ont suggéré qu’il pouvait y avoir un lien entre une carence en vitamine D et la dépression, un trouble mental courant qui touche 5% des adultes dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé. Les symptômes de la dépression (humeur morose, perte de plaisir ou d’intérêt pour les activités, difficultés de concentration, perte d’estime de soi, troubles du sommeil, pensées négatives, etc.) ont un lourd impact sur la vie quotidienne des personnes concernées et constituent une importante charge de morbidité. Les médicaments antidépresseurs peuvent s’avérer efficaces, mais sont parfois insuffisants. De ce fait, d’autres voies de traitement sont recherchées, notamment du côté de la nutrition.
Plus de 40 études passées au crible
Des études ont montré que la vitamine D biologiquement active, le récepteur nucléaire de la vitamine D et les enzymes activant et métabolisant la vitamine D sont présents dans les neurones, les cellules gliales et les macrophages cérébraux. Par conséquent, il a été suggéré qu’elle pourrait jouer un rôle dans la régulation des fonctions du système nerveux central, dont les perturbations ont été associées à la dépression. Cette hypothèse a été soutenue par plusieurs études transversales ayant mis en évidence une association entre les symptômes dépressifs et la carence en vitamine D.
Cependant, les méta-analyses réalisées jusqu’alors sur les effets de la supplémentation en vitamine D sur la santé mentale n’ont pas été concluantes — la majorité d’entre elles n’ont fourni aucune preuve d’un quelconque effet positif. Des chercheurs de l’Université de l’est de la Finlande se sont à nouveau penchés sur la question. Ils se sont livrés à une nouvelle méta-analyse des études passées, passant au crible les résultats de 41 études menées dans le monde entier. Toutes étaient des essais randomisés contrôlés par placebo, dans différentes populations d’adultes.
Les résultats de cette nouvelle méta-analyse montrent que la supplémentation en vitamine D est plus efficace qu’un placebo pour soulager les symptômes dépressifs chez les personnes souffrant de dépression. Il y avait des différences majeures dans les doses de vitamine D utilisées, mais le supplément de vitamine D était généralement de 50 à 100 microgrammes par jour. « Malgré une forte hétérogénéité, une supplémentation en vitamine D ≥ 2 000 UI/jour semble réduire les symptômes dépressifs », a conclu l’équipe. Les résultats sont toutefois à nuancer.
Une efficacité potentielle en cas de trouble dépressif majeur
Les 41 études examinées impliquaient plus de 53 000 individus, la plupart (84%) étant des femmes, souffrant ou non de dépression ; les participants étant supplémentés en vitamine D ou étaient sous placebo. La taille des échantillons variait énormément (de n = 42 à n = 36282). De même, la durée des interventions variait entre cinq jours et cinq ans et les doses uniques de vitamine D variaient de 400 à 500 000 UI (et, calculées par jour d’intervention, de 400 UI à environ 14 000 UI).
Les analyses suggèrent que la supplémentation en vitamine D semble réduire les symptômes dépressifs, en particulier chez les personnes diagnostiquées avec un trouble dépressif majeur et chez les femmes souffrant de dépression périnatale, précise l’équipe. En outre, l’effet de la supplémentation semble plus important lorsque les suppléments sont pris sur une courte durée (moins de 12 semaines). Côté dosage, les supplémentations inférieures à 4 000 UI/jour ont eu un effet faible à modéré ; au-delà, l’effet était plus important. De plus, la supplémentation n’a eu qu’un effet faible à modéré lorsque les personnes présentaient un taux sérique de vitamine D faible (≤ 50 nmol/L) à suffisant (> 50 nmol/L) au début de l’expérimentation.
« Nos résultats suggèrent que la supplémentation en vitamine D a des effets bénéfiques chez les personnes atteintes d’un trouble dépressif majeur, ainsi que chez celles présentant des symptômes dépressifs plus légers et cliniquement significatifs », résume l’équipe. Même si leur méta-analyse inclut un très grand nombre d’individus, les chercheurs demeurent prudents quant aux résultats obtenus : ils soulignent que les preuves d’une association entre vitamine D et dépression restent fragiles du fait de l’hétérogénéité des populations étudiées et du risque de biais associé à un grand nombre d’études.
Cette méta-analyse confirme néanmoins l’utilité thérapeutique potentielle de la vitamine D en psychiatrie, notamment en cas de trouble dépressif majeur et dépression périnatale. « Ces découvertes encourageront de nouveaux essais cliniques de haut niveau chez des patients souffrant de dépression afin de mieux comprendre le rôle possible de la supplémentation en vitamine D dans le traitement de la dépression », conclut Tuomas Mikola, chercheur à l’Institut de médecine clinique de l’Université de l’est de la Finlande et auteur principal de la méta-analyse.