L’espace semble s’étendre infiniment dans toutes les directions, mais ce n’est qu’un modèle mental que nous avons de l’Univers, qui n’est pas nécessairement correct. Récemment, une nouvelle étude portant sur la forme de l’univers établit une théorie visant à changer notre perception de ce dernier. Les chercheurs y suggèrent que l’univers n’est pas plat, mais qu’il a peut-être la forme d’un beignet. Connaître la forme de l’Univers nous renseignera en quelques sortes sur son avenir : expansion infinie ou effondrement sur lui-même ?
La cosmologie standard combine la relativité générale et la mécanique quantique pour produire un modèle simple représentant la distribution de la matière sur l’histoire et le volume de l’univers observable. Les scientifiques tentent alors de déterminer la forme précise de l’Univers, infini, plat, en forme de donut, comme mentionné dans une étude de 2021.
Selon l’Université de l’Oregon, il existe trois formes possibles pour l’Univers : plat (également appelé univers euclidien ou à courbure nulle), en hyperbole, sphérique. Ces possibilités reposent toutes sur le comportement possible de lignes parallèles imaginaires tissant l’univers et les contours de ce dernier. Dans le premier cas, elles restent parallèles, ne se rencontrant donc jamais — l’Univers est alors infini et plat. Dans le deuxième cas, elles se rejoignent à certains points (comme aux pôles de la Terre, les lignes perpendiculaires à l’équateur s’y rejoignent), imposant alors un univers courbe. Dans le troisième cas, les lignes parallèles divergent et forment un univers hyperbolique.
Cependant, la plupart des observations jusqu’à présent aboutissent à un cosmos plat, ce qui implique géométriquement que les lignes parallèles imaginaires restent indéfiniment parallèles. Mais la forme ne se limite pas à la géométrie. Il y a aussi la topologie, qui est la façon dont les formes peuvent changer tout en conservant les mêmes règles géométriques. De plus, la relativité générale ne concerne que la géométrie locale de la variété de l’espace-temps, pas sa topologie. Les processus quantiques de l’Univers très ancien peuvent induire une topologie « non triviale » de l’espace-temps, avec de faibles fluctuations qui renfermeraient des indices sur le fait que l’Univers n’est pas plat.
Récemment, des chercheurs ont simulé et analysé informatiquement les possibilités d’un univers en forme de beignet et non plat, en se basant sur les données issues du fond diffus cosmologique (CMB), la « lueur naturelle du cosmos ». Le rayonnement du CMB aurait été émis environ 380 000 ans après le Big Bang. Leurs résultats sont présentés dans un article disponible sur la plateforme de préimpression arXiv.
Les prémices d’une étude topologique majeure
Connaître la forme de notre univers nous permettrait en quelques sortes de connaître son avenir. En effet, un univers plat et ouvert continuerait à s’étendre à l’infini. En revanche, un univers fermé finirait par s’effondrer sur lui-même en raison de sa propre gravité — un phénomène connu sous le nom de « Big Crunch ».
Comme mentionné précédemment, la géométrie est étroitement liée à la topologie dans le contexte du cosmos, car un objet peut être géométriquement plat, mais avoir une forme 3D, ce qui pourrait être le cas du cosmos. Pour pouvoir appréhender cette notion, prenons un morceau de papier plat, où les lignes parallèles restent parallèles, puis prenons ses deux bords et enroulons-le en un cylindre, ces lignes parallèles restent les mêmes, ce qui signifie que le cylindre est géométriquement plat.
De plus, si nous prenons les extrémités opposées du papier cylindrique et les connectons, nous nous retrouvons avec un tore (ou beignet). Ces deux éléments sont géométriquement plats. Un autre exemple de forme étrangement plate pourrait être une boucle de Möbius. Ce cylindre torsadé tourne sur lui-même sur 180° alors que ses lignes parallèles d’origine ne se croisent toujours pas.
Il faut savoir que les mathématiciens ont découvert 18 topologies tridimensionnelles possibles dans lesquelles au moins une dimension s’enroule sur elle-même. Certains peuvent être retournés comme une bande de Möbius ou peuvent effectuer des rotations partielles tout en restant géométriquement plats.
Dans un univers ayant la forme d’un « beignet », chaque objet pourrait avoir plusieurs copies, avec des emplacements relatifs déterminés par les détails de la topologie, impliquant une révision de nos certitudes concernant le fonctionnement, le contenu et l’architecture de l’Univers…
Une forme d’univers à réévaluer
De précédents travaux avaient démontré les hypothèses d’un univers plat ou en forme de beignet. Mais les chercheurs de la présente étude suggèrent que les mesures précédentes étaient limitées. Plus particulièrement, les observations ont supposé que l’univers s’enroule autour de lui-même dans une seule dimension et que la topologie ne serait donc pas plus complexe que cela — en ignorant les déviations à petite échelle des galaxies et des trous noirs.
Les fluctuations observées du CMB encodent des informations sur la topologie. Or, les observations du CMB ont révélé des anomalies étranges et inexpliquées, comme de grands motifs apparaissant là où ils ne devraient pas, si l’univers était plat. En fait, un univers avec une topologie complexe pourrait expliquer au moins certaines des anomalies du CMB. Cette nouvelle étude encourage donc une exploration plus approfondie de la topologie de l’Univers, avec des études de suivi du CMB.