Alors que les 3 et 4 juillet 2023 marquent deux records consécutifs de température mondiale, des experts avertissent que les températures de l’année 2024 pourraient passer à un tout autre niveau. On pourrait notamment s’attendre à une grande variabilité climatique interannuelle avec le retour de l’effet El Niño, sans compter les émissions de CO2 qui ne cessent d’augmenter — malgré les efforts entrepris.
Depuis les années 1970, les températures mondiales n’ont cessé d’augmenter. Les deux derniers mois ont enregistré les températures quotidiennes les plus élevées, les 3 et 4 juillet marquant les deux derniers records. Les conséquences sont nombreuses : augmentation des feux de forêt à grande échelle, hausse du niveau de la mer due à la fonte des calottes glaciaires, évènements météorologiques extrêmes (ouragans, cyclones, typhons, …).
Alors que les hausses des températures tenant compte des facteurs anthropiques sont relativement prévisibles, les variabilités naturelles accompagnant l’effet El Niño à venir pourraient bouleverser les précédentes estimations, notamment avec une augmentation accélérée des températures. Les hausses les plus importantes ont en effet tendance à être enregistrées vers la fin du phénomène. Ainsi, les vagues de chaleur dans le monde pourraient augmenter de façon exponentielle à partir de 2024.
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Cette estimation est compatible avec une précédente analyse de pointe tenant compte de plusieurs facteurs connexes et complémentaires au réchauffement climatique. Les résultats indiquaient que les points de basculement écologiques — dont l’effondrement des écosystèmes — pourraient survenir bien plus tôt que prévu.
Une augmentation de 1,4 °C par rapport au niveau préindustriel
L’effet El Niño est un phénomène climatique complexe correspondant à la phase de chaleur du phénomène d’oscillation australe, au cours duquel un courant océanique chaud naît dans le Pacifique. Survenant tous les 3 à 7 ans environ et durant entre 6 et 18 mois, l’impact écologique du phénomène s’étend non seulement à travers l’océan Pacifique, mais également vers d’autres bassins océaniques. Cette immense portée fait qu’El Niño influence considérablement les températures au niveau mondial.
El Niño débute par un affaiblissement des alizés, entraînant une accumulation des eaux équatoriales chaudes à l’ouest du Pacifique. Ces eaux, dont la température de surface dépasse les 29 °C en moyenne, se propagent vers les pôles pour remplacer les eaux de surface froides. L’effet inverse, surnommé La Niña, est induit par des alizés plus intenses repoussant les eaux équatoriales chaudes et provoquant des baisses de températures au niveau mondial.
Récemment, l’ONU a officiellement annoncé la fin du dernier évènement La Niña en détectant les prémices d’El Niño, en avril dernier. Aussi incroyable que cela puisse paraître — en vue des vagues de chaleur extrêmes —, les années précédentes étaient tempérées par l’effet La Niña.
Les émissions de CO2 ne cessant d’augmenter malgré les efforts initiés, les hausses de températures risquent de devenir toujours plus intenses avec l’arrivée d’El Niño. Ces élévations auraient tendance à culminer vers le mois de décembre et engendrent les plus forts impacts au cours des deux mois suivants. Un climatologue estime ainsi que 2024 pourrait nous faire franchir les 1,4 °C au-dessus des niveaux préindustriels.
Non seulement El Niño engendre une grande variabilité annuelle des températures, mais il est également influencé par un phénomène appelé oscillation décennale du Pacifique (ODP). Il s’agit d’une variation de la température de surface des océans, déplaçant la trajectoire des systèmes météorologiques selon un cycle allant de 20 à 30 ans.
Au cours d’une ODP positive ou chaude, plus de chaleur est séquestrée au niveau des 300 premiers mètres (de profondeur) océaniques. Lorsque la chaleur passe en dessous de ces 300 premiers mètres, l’ODP est dite négative ou froide. Si El Niño débute lors d’une ODP froide, les élévations de température au niveau mondial ont tendance à être moins intenses, mais moins prévisibles. En revanche, s’il débute en ODP chaude, elles sont plus intenses et plus prévisibles.
Les conséquences dramatiques de ces phénomènes combinés sont probablement déjà ressenties à travers le monde. Alors que ce sont les régions généralement les moins impactés par l’effet El Niño, l’Europe et le Canada enregistrent des températures caniculaires extrêmes, provoquant notamment de vastes feux de forêt. Et bien que l’hiver austral soit censé débuter au mois de juin, le Sénégal a connu un record de température de 48 °C le même mois.
Un étrange phénomène a également provoqué une élévation anormale de la température océanique de l’atlantique nord. Compte tenu de son côté inhabituel, les climatologues pensent que cette anomalie pourrait être liée à un tout autre évènement qu’El Niño ou l’ODP. Ce nouveau phénomène aurait provoqué une fonte spectaculaire de la banquise arctique.
Les prochains mois verront une hausse significative du niveau de la mer, due à la fonte des glaces, mais aussi à la hausse des précipitations dans de nombreuses régions du globe. Ces précipitations normalement accentuées par El Niño pourraient être davantage exacerbées par les phénomènes météorologiques extrêmes dus au réchauffement climatique. Cette hausse ne pourra s’atténuer qu’avec le retour de La Niña. Toutefois, il y a peu de chances que les températures reviennent à leurs niveaux précédents.