L’outil d’IA de génération vidéo Sora peut désormais utiliser des personnages Disney en toute légalité, le géant du divertissement ayant annoncé un investissement historique de 1 milliard de dollars en actions chez OpenAI. Cet accord inclut non seulement les personnages Disney, mais également ceux de Marvel, Pixar et Star Wars. L’accord intervient dans un contexte d’inquiétude grandissante à Hollywood quant aux impacts de l’IA sur l’industrie créative et la protection des droits des créateurs.
Le lancement de Sora 2, la dernière version de Sora, l’IA de génération de vidéos d’OpenAI, a suscité une vague de controverse, non seulement en raison de son hyperréalisme, mais également en raison de l’utilisation abusive d’images ou de personnages protégés par le droit d’auteur. Les utilisateurs de l’outil se sont notamment mis à générer massivement des vidéos — à titre d’exemples largement relayés en ligne — de personnages tels que Bob l’éponge ou Pikachu, en les mettant en scène dans des situations dérangeantes, comme des mises en scène en uniformes nazis ou des scènes de violence graphique.
Face à la situation, des entreprises comme Walt Disney ont ouvertement exprimé leur inquiétude quant aux violations des droits d’auteur. Des manifestations syndicales et des poursuites judiciaires contre les entreprises d’IA ont vu le jour, de la part d’acteurs, scénaristes et autres professionnels de la création. La situation est telle qu’elle a même suscité une vive réaction de la part du gouvernement japonais, ce dernier exhortant OpenAI à cesser de plagier ses personnages de manga et d’animé.
L’utilisation abusive d’images générées ne s’arrête d’ailleurs pas aux personnages de fiction, mais s’étend également aux deepfakes. Des représentations racistes de Martin Luther King Jr. ont par exemple incité OpenAI à interdire l’utilisation de son image sur la plateforme. Des vidéos similaires et irrespectueuses de l’ancien président John F. Kennedy, de la reine Elizabeth II, du physicien et cosmologiste Stephen Hawking, ou encore du regretté comédien Robin Williams ont également circulé largement.
En réponse aux critiques concernant les personnages fictifs protégés par les droits d’auteur, OpenAI se lance dans des opérations de séduction auprès des entreprises de divertissement. Sam Altman, le PDG de l’entreprise, a participé récemment au Tonight Show de Jimmy Fallon, un talk-show populaire américain, en vantant l’accord d’un milliard de dollars qu’il a conclu avec Disney. Il s’agit, selon lui, de la preuve que les entreprises d’IA peuvent nouer des partenariats mutuellement bénéfiques avec le secteur du divertissement.
« Cet accord montre comment les entreprises spécialisées en IA et les leaders créatifs peuvent collaborer de manière responsable pour promouvoir une innovation bénéfique à la société, respecter l’importance de la créativité et aider les œuvres à atteindre un vaste public nouveau », a-t-il déclaré, selon The Guardian.
Un partenariat inédit entre licences iconiques et IA
L’accord entre Disney et OpenAI permettra aux utilisateurs de Sora 2 de générer des vidéos mettant en scène plus de 200 personnages Disney, Marvel, Pixar et Star Wars. Cela inclut par exemple des personnages des films Zootopia, Moana et Encanto, ou encore Luke Skywalker, Deadpool et Captain America, ainsi que les personnages emblématiques de notre enfance comme Mickey et Minnie Mouse. Ces utilisations s’inscrivent dans le cadre d’un accord de licence de trois ans.
Exemples tirés d’un communiqué de presse d’OpenAI. © OpenAIMis à part l’utilisation des personnages dans Sora, l’accord permettra aussi à Disney d’utiliser les interfaces de programmation d’applications (API) d’OpenAI pour développer de nouveaux outils. Une sélection de vidéos générées par les utilisateurs de Sora sera également disponible en streaming sur la plateforme Disney+. Disney déploiera en outre ChatGPT pour ses employés, ont annoncé les deux entreprises. ChatGPT Images pourra transformer quelques mots saisis par l’utilisateur en images en quelques secondes, à partir de la même propriété intellectuelle, selon un communiqué conjoint des deux entreprises.
Cet accord représente l’une des initiatives les plus importantes d’OpenAI à Hollywood à ce jour. Bien sûr, il n’a pas manqué de susciter l’inquiétude du côté des créateurs et auteurs. « Tous les acteurs du secteur du divertissement, et en particulier les talents créatifs, sont extrêmement inquiets des conséquences que cela pourrait avoir », a déclaré Duncan Crabtree-Ireland, directeur exécutif du syndicat Screen Actors Guild‐American Federation of Television and Radio Artists (Sag-Aftra), à la BBC.
Le Sag-Aftra représente 170 000 professionnels des médias dans le monde. Crabtree-Ireland affirme que les deux entreprises ont contacté le syndicat afin de souligner que l’accord exclut l’utilisation de l’image, de la ressemblance ou de la voix des artistes humains. Mais cet accord reste, selon lui, une évolution inquiétante pour l’industrie du divertissement. La question demeure de savoir comment les personnages générés par IA seront dotés de voix — potentiellement via des voix synthétiques ou des banques de voix internes — alors même que l’utilisation des voix d’artistes est exclue par l’accord.