Adultes surdoués : et si vous l’étiez aussi ? Comment éviter d’en souffrir ?

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Le terme « surdoué » fait référence à une aptitude intellectuelle supérieure à la normale. Il a été employé pour la première fois en 1946 par un neuropsychiatre, pour qualifier un enfant qui possédait des aptitudes nettement supérieures aux capacités des autres enfants du même âge. On parle également de « haut potentiel ». Si la surdouance est souvent évoquée en contexte scolaire, cette caractéristique ne touche pas que les enfants. Beaucoup d’adultes sont des surdoués qui n’ont jamais été diagnostiqués comme tels. Quels sont les signes évocateurs d’une éventuelle surdouance ? (2e parag.) Et si vous aussi vous l’étiez, comment faire de cette particularité une force ? (3e parag.)

La surdouance peut revêtir différentes formes. Contrairement aux idées reçues, être surdoué ne signifie pas nécessairement avoir été le premier de la classe pendant toute sa scolarité. En réalité, cette intelligence hors norme se traduit davantage par un mode de raisonnement différent de celui adopté par la plupart des gens. En aucun cas elle ne garantit la réussite ; au contraire, de nombreuses personnes surdouées souffrent de cette différence et peinent à vivre avec (1).

Un mode de pensée différent

Les gens surdoués montrent une curiosité insatiable pour tout ce qui les entoure. Ils sont également hyperactifs et hypersensibles. Leur façon de raisonner repose sur des associations d’idées (on parle de raisonnement en arborescence). On distingue plusieurs formes de surdouance, la plus connue étant sans doute le « haut potentiel intellectuel » (HPI) ou « très haut potentiel intellectuel » (THPI). Un consensus scientifique a fixé la valeur du quotient intellectuel d’une personne à HPI à 130 — un seuil qui correspond à deux écarts-types au-dessus de la moyenne.

Mais ce n’est qu’un chiffre, et un test de QI ne suffit pas à poser un diagnostic de HPI : un bilan psychologique complet doit également être mené par un professionnel. Encore une fois, il est important de comprendre qu’une personne à HPI n’est pas forcément un petit génie ; elle se différencie surtout par son approche cognitive et sa créativité. Sa relation au monde et ses liens sociaux sont eux aussi très différents de ceux d’une personne lambda.

Pour de nombreux praticiens, la surdouance se limite au HPI. Pourtant, il existe une autre forme de surdouance : le haut potentiel émotionnel (HPE) ou très haut potentiel émotionnel (THPE). Elle correspond à des aptitudes émotionnelles particulièrement développées, à une forme d’intelligence émotionnelle. À noter que les personnes à HPE n’ont pas forcément un QI très élevé ; en revanche, elles ont un quotient émotionnel très élevé. Cela se traduit notamment par une hypersensibilité (émotionnelle et sensorielle) et une empathie très développée : ces personnes ont ainsi la capacité de comprendre aisément ce que les autres ressentent. Elles sont également particulièrement sensibles à toute forme d’injustice.

Attention à ne pas confondre hypersensibilité et HPE ! Certes, c’est une caractéristique que l’on retrouve chez de nombreuses personnes à HPE, mais il est très fréquent d’être hypersensible sans pour autant être HPE. Enfin, tout comme les HPI, les HPE adoptent un mode de réflexion en arborescence et font preuve de perfectionnisme dans tout ce qu’ils entreprennent. Ils ont en outre l’impression d’être en permanence en décalage avec les autres, de ne pas être à leur place, ce qui peut susciter une grande souffrance. « Un décalage dans les centres d’intérêt ou parce qu’on a l’impression d’aller toujours plus vite que les autres », précise Blandine Berthet, psychologue clinicienne. Un cerveau constamment « en ébullition », des questions restées sans réponse, des injustices contre lesquelles on est impuissant, peuvent par ailleurs engendrer stress et anxiété, voire des troubles obsessionnels compulsifs (TOC).

À noter que certaines recherches évoquent également un « haut potentiel créatif » (2). Les individus appartenant à cette catégorie présenteraient une exceptionnelle capacité à générer de nouvelles idées, adaptées aux éventuelles contraintes contextuelles.

Surdoué(e) ou pas ?

Les psychologues ont établi une liste des principales caractéristiques propres aux personnes à haut potentiel. Outre les signes déjà évoqués plus haut, les personnes HP peuvent faire preuve d’une imagination débordante et d’un sens aigu de l’observation.

Elles présentent une grande facilité d’apprentissage et préfèrent souvent apprendre les choses par elles-mêmes que par la voie traditionnelle. Leur vocabulaire est particulièrement développé et elles possèdent un grand sens de l’humour. La surdouance peut se révéler par tout ou partie de ces signes. « Il n’y a pas de honte à se demander si on est haut potentiel intellectuel et ce, même si l’hypothèse devait être infirmée. Souvent, on a de bonnes raisons de se poser des questions », souligne Blandine Berthet.

échelle wechsler intelligence
Un consensus scientifique a fixé la valeur du quotient intellectuel d’une personne HPI à au moins 130. © Suivezlezebre.com

Afficher plusieurs ou l’ensemble de ces caractéristiques spécifiques peut d’ores et déjà vous mettre sur la voie. « Certains indices peuvent mettre la puce à l’oreille, mais cela ne vaut pas une évaluation par un spécialiste », prévient Nathalie Clobert, psychologue spécialisée dans le haut potentiel. Ainsi, pour savoir si vous êtes surdoué(e) (HPI ou HPE), il est essentiel de réaliser un bilan psychologique complet. Autrement dit, il est conseillé de consulter un spécialiste, qui vous orientera vers un test dédié — plusieurs tests payants sont proposés sur le Web, mais seule la consultation préalable d’un praticien vous assurera un diagnostic fiable.

Pour évaluer l’intelligence des adultes, les spécialistes utilisent généralement la Wechsler Adult Intelligence Scale ou WAIS, du nom du psychologue américain David Wechsler, qui en proposa une première version en 1955. Depuis, elle a connu plusieurs révisions. La dernière en date, la WAIS-IV a d’ailleurs fait l’objet d’une évaluation indépendante dans la revue Psychological Assessment. Cette échelle se compose de plusieurs items relativement concis, de difficulté croissante ; il s’agit de petits tests verbaux et non verbaux (dits aussi tests de performance, tels que les puzzles). Chaque item correspond à un certain nombre de points. Le score global obtenu indique si la performance du participant est oui ou non supérieure à la moyenne.

Daisy Lorenzi est auteure et journaliste indépendante. Il y a deux ans, elle publie un ouvrage sur le sujet (Singuliers et ordinaires : Parcours d’adultes à haut potentiel intellectuel, Enrick B. Editions). C’est en réalisant le portrait de son cousin, âgé de 12 ans, diagnostiqué HP, ainsi qu’en prenant connaissance du témoignage de nombreuses personnes à haut potentiel, qu’elle a réalisé, à l’âge de 30 ans, qu’elle-même appartenait à cette catégorie. « En me lançant dans l’écriture de ce livre, mes premières lectures m’ont fait un choc, car je me suis vraiment reconnue, sans m’y attendre. Quelques mois plus tard, je passais un test pour avoir une « confirmation » que je trouvais nécessaire pour accepter cette idée », confie-t-elle dans une interview.

En effet, l’annonce du diagnostic est bien souvent un soulagement pour les personnes à HP. Les adultes tardivement diagnostiqués surdoués trouvent enfin une explication au mal-être qu’ils ressentent depuis l’enfance. « Je ne me suis jamais sentie à l’aise au sein d’une équipe. Cela m’irrite de constater que l’on n’évolue pas au même niveau », témoigne Geneviève, 60 ans. Diagnostiquée surdouée après des années de psychothérapie, elle a reçu cette révélation comme « une reconnaissance ». Pour beaucoup, le diagnostic permet de rétablir la confiance en soi et marque le début d’une nouvelle vie, d’un redémarrage, explique la psychanalyste Monique de Kermadec. « Le diagnostic m’a permis de me comprendre […] et à partir de là, de pouvoir enfin changer certains comportements auxquels je pensais être condamnée », confirme Daisy Lorenzi.

HP : faire de cette particularité une force

Même si cela est bien souvent source de mal-être, être diagnostiqué à haut potentiel ne doit pas être considéré comme une tare. Au contraire, c’est simplement une autre façon d’être, exceptionnelle, qui bien exploitée, peut devenir une véritable source d’épanouissement. Pour commencer, il est conseillé de se rapprocher d’autres personnes diagnostiquées HP, afin de pouvoir échanger sans ressentir une forme de « décalage » ; de nombreuses associations et forums dédiés existent sur le Web.

Ensuite, il est essentiel de recenser — seul(e) ou avec l’aide d’un spécialiste — les particularités qui composent sa personnalité, afin d’identifier ses atouts, mais aussi les aspects sur lesquels il est possible d’agir pour mieux vivre avec sa différence. Certaines caractéristiques propres aux HP peuvent pleinement s’exprimer dans le cadre professionnel si celui-ci s’y prête ; une personne HPE, très empathique, pourra par exemple s’épanouir dans des métiers qui contribuent au bien-être des autres. Être diagnostiqué HP peut ainsi être l’occasion d’une reconversion professionnelle, plus en accord avec soi-même.

L’une des principales difficultés communes aux personnes HP est de communiquer avec leur entourage. La tentation est parfois grande de donner sans cesse son avis, de souligner les erreurs des autres, de les contredire ; dans ce cas, il faut simplement apprendre à écouter, à contrôler son impulsivité et travailler sa répartie pour éviter toute mauvaise interprétation. L’ennui et la routine sont d’autres ennemis redoutés des personnes HP. La frustration engendrée par ces sensations peut d’ailleurs largement impacter la relation aux autres. Pour y remédier, il est conseillé de trouver diverses activités (sportives, culturelles ou artistiques) qui vous permettront d’assouvir votre curiosité. Par la même occasion, ces activités permettront d’évacuer les angoisses suscitées par les situations difficiles et/ou conflictuelles. Enfin, s’il ne fallait retenir qu’une seule recommandation pour assumer son HP de la meilleure façon, ce serait sans aucun doute le lâcher-prise. En d’autres termes, ne pas chercher à être parfait, ni à tout contrôler en permanence. Mettre son cerveau en pause ne serait-ce que quelques minutes.

Les spécialistes soulignent par ailleurs qu’il ne faut pas se sentir investi d’une mission ou accomplir forcément des choses exceptionnelles parce que l’on est HP. « Ce n’est pas parce qu’on est surdoué que l’on n’a pas le droit d’échouer […]. Ce n’est pas parce qu’on est, à priori plus performant, qu’on doit toujours l’être », insiste Blandine Berthet. Quelques adultes diagnostiqués sur le tard regrettent en effet de ne pas avoir vécu des choses à la hauteur de leur potentiel, se donnant l’impression d’avoir raté leur vie. Mais l’important, rappellent les psychologues, est de réussir à écouter ses envies. L’intelligence n’est pas la seule chose qui définit un individu. « Il faut rester ouvert à ce qu’on est d’autre et notamment écouter d’autres besoins », ajoute Nathalie Clobert.

Sources : 1, 2

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