Des astronomes détectent un objet inconnu émettant de la poussière autour d’une étoile

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| Pixabay
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À l’aide du Transiting Exoplanet Survey Satellite (TESS), dédié à la recherche d’exoplanètes, une équipe d’astronomes a découvert un mystérieux objet en orbite autour de l’étoile binaire TIC 400799224. Cet objet bloque la lumière de son étoile hôte de manière très erratique : les baisses de luminosité sont détectées dans environ un transit sur trois à cinq, ce qui suggère que ce corps de nature encore indéterminée émet de la poussière de manière épisodique.

Le satellite TESS a été lancé en avril 2018. Depuis sa mise en service, il a permis de découvrir 172 exoplanètes confirmées et a compilé une liste de 4703 exoplanètes candidates ; le TESS Input Catalog (TIC) comporte par ailleurs plus d’un milliard d’objets. La source TIC 400799224 se situe à environ 2 300 années-lumière. Elle a été repérée par hasard parmi les données de TESS, en raison de sa chute rapide de luminosité en quelques heures seulement, suivie de plusieurs brusques variations de luminosité qui pourraient chacune être interprétées comme une éclipse.

L’objet mystérieux peut bloquer jusqu’à 37% ou 75% de la lumière de son étoile hôte — selon qu’il s’agisse de l’une ou l’autre des étoiles composant le système binaire TIC 400799224. Il s’agit très probablement d’un astéroïde en désintégration ou d’une planète mineure, selon les astronomes rapportant cette découverte. Des observations supplémentaires sont néanmoins nécessaires pour glaner plus de détails sur l’origine et la composition de cet objet.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Un corps qui émet de la poussière périodiquement

Au vu des variations atypiques de lumière, les scientifiques postulent que l’objet inconnu émet de la poussière dense de manière épisodique. C’est du moins ce qui a déjà été observé auparavant dans d’autres systèmes stellaires, tels que Kepler 1520 (initialement publié sous le numéro KIC 12557548) — une naine orange autour de laquelle orbite une planète en désintégration, présentant une queue de poussière — ou WD 1145+017, une naine blanche entourée de plusieurs corps poussiéreux.

Les astronomes considèrent que TIC 400799224, bien qu’assez inhabituel, est analogue à ces systèmes, car le corps en orbite montre des signes de désintégration, les transits résultants sont variables en profondeur, forme et durée, et enfin, les transits sont relativement aléatoires — une occultation n’étant optiquement mesurable que dans un transit sur trois à cinq. Cependant, TIC 400799224 affiche quelques spécificités qui le classent dans une catégorie à part.

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Image optique/proche infrarouge du ciel autour de TIC 400799224 (le réticule marque son emplacement et la largeur du champ de vision est donnée en minutes d’arc). Les astronomes ont conclu que les mystérieuses variations périodiques de la lumière sont causées par un corps en orbite émettant périodiquement des nuages de poussière. © B. Powell et al.

L’analyse des données a tout d’abord révélé qu’il s’agissait d’un système binaire, dont l’une des étoiles pulse avec une période de 19,77 jours. En outre, la quantité de poussière émise par l’objet occultant est relativement importante, équivalente à celle d’un astéroïde de 10 km de rayon. Or, s’il s’agissait d’un astéroïde, considérant la vitesse à laquelle la poussière doit être produite pour obtenir l’occultation observée, il ne survivrait qu’environ huit mille ans avant de disparaître, précise un communiqué du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics. Pourtant, au cours des six années d’observations de suivi de cet objet (avec TESS et d’autres instruments), la périodicité est restée identique et l’objet occultant semble être demeuré intact à chacun de ses passages.

Le fruit de multiples collisions ?

Quelle peut bien être la nature de cet objet et comment de telles quantités de poussière (la masse du nuage est d’environ 1019 g !) peuvent être produites dans le système TIC 400799224 ? Dans le cas des planètes en désintégration, la production de poussière a été attribuée à un vent thermique généré par l’irradiation et l’évaporation de surface (la surface de la planète passe alors directement d’un état solide à un état gazeux). Mais cette interprétation n’est pas viable pour l’objet de TIC 400799224, soulignent les chercheurs. Sa température d’équilibre (1525 K) est telle que la pression de vapeur des silicates est trop faible pour entraîner le taux de perte de masse attendu.

courbe luminosité étoile
TESS a observé TIC 400799224 dans les secteurs 10 (26 mars 2019 au 22 avril), 11 (22 avril 2019 au 21 mai), 37 (du 2 au 28 avril 2021) et 38 (du 28 avril 2021 au 26 mai). Cette figure montre la courbe de lumière des secteurs 10 et 11, qui affiche une nette et soudaine diminution. On note trois baisses distinctes au cours de l’événement, indiquant un corps occultant très irrégulier, atteignant une profondeur d’environ 25%. © B. Powell et al.

La poussière pourrait également provenir de collisions avec des corps mineurs produisant des nuages de poussière sporadiques, ou du transport de poussière par une planète enfouie dans le disque stellaire. Au vu des contraintes de masse, de la périodicité persistante de l’objet sur six années et des profondeurs d’occultation très variables, c’est le scénario des collisions qui paraît le plus probable selon l’équipe. La même explication a d’ailleurs été proposée pour la naine blanche ZTF J0328-1219, occultée elle aussi périodiquement par des amas de débris de collisions.

L’objet étudié ici subit des collisions avec des corps mineurs, trop petits pour l’endommager ou modifier sa période orbitale. Ces collisions sont vraisemblablement assez régulières et se produisent à chaque même phase orbitale de l’objet ; chaque collision génère un nuage de poussière et de petites particules, occultant un temps l’étoile avant de se dissiper… jusqu’à ce qu’une nouvelle collision reforme un nuage.

Pour lever les incertitudes, les astronomes prévoient de continuer à surveiller cet objet mystérieux et d’incorporer à leurs analyses des observations historiques du ciel pour tenter de déterminer ses variations sur plusieurs décennies. Ils précisent que l’objet est suffisamment brillant pour être observé depuis des télescopes de taille modeste, qui pourraient détecter les futurs transits — les astronomes amateurs peuvent donc en théorie apporter leur pierre à l’édifice.

Source : The Astronomical Journal, B. Powell et al.

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