Voici comment le sang de limule sauve des millions de vies

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Des limules en laboratoire, en train d'être saignées. | Timothy Fadek/Getty Images
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La médecine a connu de nombreuses avancées ces dernières décennies, mais s’il y a bien un incontournable dans ce domaine depuis maintenant des siècles, c’est l’importance des antibactériens efficaces. Le sang des Limulidés (regroupant les limules modernes), aussi appelés « Crabes fer à cheval » de par leur forme de fer à cheval, possède des propriétés antibactériennes remarquables, exploitées encore à ce jour en médecine moderne.

Nous, humains, ne sommes pas ici sur Terre depuis aussi longtemps que ces créatures et pourtant, nous avons appris à exploiter leurs propriétés pour nous soigner et sauver des vies. Malheureusement, cela se fait au détriment de la population de ces arthropodes.

Le fait le plus inhabituel avec le sang de limule est sa couleur : il est bleu vif, une conséquence de la présence d’hémocyanine pour transporter l’oxygène, alors que les vertébrés exploitent le fer contenu dans l’hémoglobine. L’hémocyanine est une métalloprotéine contenant du cuivre (deux cations cuivreux Cu+) permettant de lier l’oxygène. La forme oxygénée de l’hémocyanine étant bleue.

Au lieu des globules blancs pour lutter contre les infections, de nombreux invertébrés possèdent des amibocytes, et les limules Atlantique (Limulus polyphemus) ont évolué à un tel niveau de raffinement qu’elles possèdent une très grande valeur médicinale.

Les amibocytes des limules peuvent coaguler autour d’une portion très petite de contamination bactérienne. Mieux encore, la réaction ne prend que 45 minutes, et non deux jours comme pour les mammifères. La recherche sur les limules a montré que leur sang est très sensible aux endotoxines, qui sont un composant des bactéries à Gram négatif comme E. coli.

Des tests permettant de détecter les endotoxines

Dans les années 1960, Frederik Bang et Jack Levin ont mis au point un test à partir du sang de L. polyphemus permettant de détecter la présence d’endotoxines. Basé sur le fait que le sang de l’animal coagule lorsqu’il entre en contact avec une endotoxine, il portait à l’époque le nom de « Limulus amebocyte lysate » (LAL) et a été commercialisé aux États-Unis dans les années 1970. En Asie, il existe un test similaire appelé TAL, qui tire son nom d’une espèce asiatique de l’animal, Tachypleus tridentatus.

Ce test est donc utilisé pour le matériel médical et les vaccins avant utilisation, sans lequel de nombreuses personnes décèderaient d’infections.

Malheureusement, la synthèse des coagulants de L. polyphemus n’en est qu’à ses balbutiements. De ce fait, plus de 200’000 limules sont pêchées chaque année pour leur sang, comme le montre ce reportage :

(Version longue ici)

Une espèce menacée par la surpêche

La surexploitation de l’animal en Amérique du Nord conduit à un déclin des populations de L. polyphemus, avec des conséquences inquiétantes si cette pratique continue. Dans la baie du Delaware par exemple, le nombre de limules a diminué de 75% depuis les années 1980. Afin de préserver l’espèce, les pêcheurs prélèvent environ 30% du sang de chaque limule, après quoi ils les renvoient dans l’océan.

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Alors que la quantité de sang restante est censée être suffisante pour que les animaux puissent survivre, entre 10 et 30% se retrouvent trop affaiblis et meurent, selon les experts. De plus, parmi les femelles qui récupèrent bien, nombreuses sont celles qui procréent moins après une première capture. Cependant, à 14’000 € le litre, il n’est pas étonnant que de nombreuses organisations éprouvent encore un fort intérêt pour le sang de limules en bouteille.

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