Découverte d’un crâne vieux de 300 000 ans qui pourrait appartenir à une lignée humaine inconnue

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Le crâne de Hualongdong reconstitué. | Xiujie Wu et al.
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Des restes d’un homininé vieux de 300 000 ans, découverts à Hualongdong en Chine et ne correspondant à aucun taxon connu, pourraient appartenir à une troisième lignée humaine. Véritable casse-tête pour les scientifiques, le fossile présente une mosaïque de caractéristiques appartenant à la fois aux homininés anciens et modernes et suggère l’existence d’une branche non identifiée dans notre arbre généalogique.

Au cours des 50 dernières années, de nombreux fossiles mystérieux d’homininés (une sous-famille d’hominidés incluant les chimpanzés, les bonobos et le genre Homo) datant du Pléistocène moyen à tardif (il y a environ 300 000 ans) ont été découverts en Chine. En effet, ces restes ne s’intègrent pas facilement aux lignées connues et certains pensent donc qu’ils appartiennent à une espèce à mi-chemin entre Homo erectus et les premiers humains modernes. Ils ont alors été classés de manière linéaire en tant qu’Homo sapiens « archaïques » et « précoces ».

Cependant, cette catégorisation relativement simpliste est largement controversée. Notamment, les dernières études des fossiles datant de cette période bouleversent le modèle évolutif traditionnel des homininés, en mettant évidence de grandes variations morphologiques par rapport aux taxons connus. Alors que Homo erectus était présent en Indonésie jusqu’à il y a environ 100 000 ans, les homininés d’Asie du Pléistocène moyen à tardif semblent être de véritables anachronismes en présentant des caractéristiques plus modernes.

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La nouvelle étude de l’Académie chinoise des sciences rapporte de nouveaux indices sur l’identité de ces mystérieux homininés. La recherche se concentre sur les restes fossilisés de 16 individus découverts dans la région de Hualongdong, datant de la même période géologique. Parmi ces échantillons, HLD6, un crâne presque complet (un crâne partiel avec une mandibule presque complète) avec quelques os des membres inférieurs, a particulièrement retenu l’attention des chercheurs, d’après le rapport paru dans le Journal of Human Evolution.

Des traits proches de l’Homo sapiens

Les dernières analyses morphologiques des homininés du Pléistocène moyen à tardif de Chine ont révélé une importante diversité. Les variations suggèrent notamment que ces taxons n’ont pas forcément tous contribué à l’apparition de l’homme moderne. Il est probable qu’au cours de cette période, plusieurs taxons différents aient coexisté, mais que seuls certains peuvent être considérés comme étant des ancêtres d’Homo sapiens. De ce fait, les chercheurs de la nouvelle étude ont estimé pertinent d’identifier ceux plus susceptibles de correspondre à cette branche évolutive. Le groupe HLD engloberait ainsi les meilleurs candidats à cette identification.

Le crâne HLD6 — appartenant à un enfant âgé de 12 à 13 ans — a été partiellement mis au jour en 2019, puis a été récemment complété par un quatrième morceau de mandibule. Après une série d’analyses morphologiques et géométriques, les experts de l’étude ont découvert que la mâchoire possède des caractéristiques uniques. Son bord inférieur triangulaire et sa courbure unique rappellent celle des humains modernes et des homininés du Pléistocène supérieur. Si l’on estime qu’Homo sapiens n’est apparu en Chine qu’il y a environ 120 000 ans, ces résultats suggèrent que nos traits modernes sont apparus il y a bien plus longtemps, il y a 300 000 ans.

reconstruction crane hualongdong
Le crâne HLD 6 reconstruit en 3D : (A) vue antérieure, (B) vue latérale gauche, (C) vue postérieure, (D) vue isométrique (latérale droite), (E) vue supérieure et (F) vue inférieure. Les parties remplies d’images miroirs sont affichées en gris. © Xiu-Jie Wu et al./PNAS 2019

Cependant, l’absence de menton et la forme de membres suggèrent une appartenance aux espèces plus anciennes. D’autres caractéristiques communes à Homo erectus ont également été relevées. Un fossile de 160 000 ans découvert dans la même région présente des caractéristiques similaires et l’analyse de protéines extraites de sa dentine indique d’étroites affinités avec les Dénisoviens — une lignée qui s’est différenciée des Néandartaliens il y a plus de 400 000 ans.

Il est important de savoir que la forme de la mandibule des hominidés est une caractéristique évolutive clé dans la « modernisation » de leur morphologie. Une mandibule est catégorisée moderne quand elle s’affine et devient plus petite par rapport à celle d’ancêtres identifiés. Cependant, malgré des changements distincts relevés dans chaque groupe étudié, les largeurs bicondylienne et bigoniale représentent des contraintes structurelles importantes pour l’identification de la plupart des mandibules d’hominidés du Pléistocène moyen à tardif.

Les chercheurs ont constaté que la mosaïque de caractéristiques observée chez HLD6 n’a jamais été observée auparavant chez les hominidés d’Asie de l’Est appartenant à la même époque géologique. Ce qui exclut les Dénisoviens et suggère davantage un hybride d’hominidé ancien et moderne. Il y aurait ainsi de fortes chances qu’il s’agisse d’une troisième lignée fondamentalement différente des Dénisoviens et d’Homo erectus, qui serait plus proche d’Homo sapiens. Si tel est le cas, l’ajout d’une troisième branche parallèle à ces deux lignées est nécessaire pour compléter notre arbre évolutif.

Source : Journal of Human Evolution

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