Les cryptomonnaies seront-elles un jour plus « vertes » ?

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De par la consommation massive de matériel informatique et d’énergie nécessaire à cette opération, le minage des cryptomonnaies est aujourd’hui une préoccupation écologique majeure — d’autant plus que la majorité de cette activité s’effectue en Chine, principalement alimentée par des centrales au charbon. Le Crypto Climate Accord, lancé au printemps 2021, ambitionne de rendre les cryptomonnaies durables, en s’assurant que toutes soient alimentées par des énergies renouvelables d’ici 2025. Certains experts estiment toutefois que cette approche ne pourra être mise en pratique sur l’ensemble des réseaux et croient davantage en la compensation carbone.

Pour rappel, une blockchain est un système dans lequel les enregistrements de transactions sont distribués à plusieurs utilisateurs d’un réseau sous forme de « blocs » chiffrés. Ces utilisateurs participent à l’authentification de ces enregistrements, ainsi qu’à la création de nouveaux jetons, le tout via des opérations mathématiques complexes (regroupées sous le concept de « minage ») nécessitant des ordinateurs toujours plus puissants et donc, très énergivores. Une récente étude a établi que les déchets électroniques liés au Bitcoin représentaient 30 700 tonnes métriques par an — un nombre comparable à la quantité de petits déchets d’équipements informatiques et de télécommunications produits par un pays comme les Pays-Bas.

Une autre étude a prédit que la consommation d’énergie annuelle de la blockchain Bitcoin en Chine devrait culminer en 2024 à 296,59 TWh et générer 130,5 millions de tonnes métriques d’émissions de carbone — c’est plus que la production annuelle totale d’émissions de gaz à effet de serre de la République tchèque et du Qatar. Aujourd’hui, chaque transaction Bitcoin nécessite le double de la quantité d’énergie moyenne consommée par un foyer américain en un mois, soit environ 2200 kWh. Face à cette situation, plusieurs approches visant à rendre les cryptomonnaies plus respectueuses de l’environnement sont étudiées.

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Une transition vers des protocoles moins énergivores

Ces approches se classent en deux catégories : la première englobe les solutions qui consistent à réduire directement les émissions de carbone liées à l’exploitation des cryptomonnaies ; elles incluent une transition vers des sources d’énergies renouvelables et l’usage d’algorithmes moins énergivores. La seconde comprend les approches qui visent à compenser les émissions. Étant donné qu’une décarbonisation du secteur des monnaies virtuelles est peu envisageable en pratique, c’est la voie de la compensation carbone qui semble la plus à même de réduire leur impact climatique.

Akash Lamba, chercheur au Centre for Nature-based Climate Solutions de Singapour, s’est intéressé de près à la question. Dans un article publié dans la revue PLOS Sustainability and Transformation, il s’interroge sur l’efficacité de chacune des approches envisagées pour réduire, voire éliminer, le coût environnemental des cryptomonnaies.

Selon lui, l’approche visant à améliorer l’efficacité énergétique des réseaux de chaînes de blocs est limitée : elle n’est envisageable que pour les nouveaux jetons et non pour les cryptomonnaies préexistantes, précise le chercheur. Il faut savoir que les algorithmes utilisés pour sécuriser une blockchain sont plus ou moins consommateurs d’énergie. Le protocole Proof-of-Work, sur lequel repose Bitcoin, est particulièrement énergivore, tandis que d’autres, tels que Proof-of-Stake, peuvent consommer jusqu’à 100 fois moins d’énergie. Si Ethereum est en train d’adopter ce protocole alors qu’il finalise sa mise à niveau (Ethereum 2.0 ou Eth2), passer de l’un à l’autre représente un défi technique difficile à relever pour le Bitcoin, qui domine aujourd’hui le marché (tant en termes de nombre que de valeur).

Des bénéfices climatiques qui seront à prouver

Une transition complète vers des sources d’énergie renouvelable (solaire, éolien, hydroélectricité…) semble être une solution de choix. Mais en réalité, sa mise en œuvre à l’échelle d’un réseau entièrement public comme Bitcoin — dont le traçage de la consommation d’énergie est, de ce fait, particulièrement difficile — est peu probable en pratique. Sans compter que ces sources d’énergie renouvelable ne sont pas nécessairement disponibles dans les régions où sont implantées les fermes de minage, ou fluctuent énormément selon les saisons — auquel cas elles doivent être complétées par d’autres sources d’énergie.

Reste l’approche de la compensation carbone, qui pour Akash Lamba, apparaît aujourd’hui comme la plus viable. « Le volume total de crédits carbone en tonnes d’équivalent CO2 échangés sur le marché volontaire en 2021 (jusqu’en août 2021) est actuellement plus de deux fois plus élevé que les émissions de carbone annuelles estimées du réseau Bitcoin (239,3 MtCO2e contre 90,1 MtCO2e) », précise le chercheur. Le Bitcoin Zero (BZX) repose directement sur cette approche : pour chaque unité frappée, 10 jetons UPCO2 sont brûlés en compensation — sachant que chaque jeton UPCO2 représente une tonne de pollution par le CO2 qui a été évitée (ces jetons sont générés par des projets certifiés REDD+, reducing emissions from deforestation and forest degradation). Une fois retiré, un crédit carbone ne peut plus être échangé, ce qui réduit la quantité totale de carbone disponible en circulation sur le marché des compensations.

Le lancement du Bitcoin Zero montre que les investisseurs pourraient être prêts à payer une prime pour compenser les dommages environnementaux inhérents à l’usage des cryptomonnaies, et il est souhaitable que d’autres produits similaires investissent le marché. Mais comme le souligne l’auteur de l’étude, il est essentiel de s’assurer en parallèle que les crédits carbone apportent les bénéfices climatiques qu’ils promettent pour compenser efficacement les impacts environnementaux des cryptomonnaies — le risque étant que certains projets REDD+ surestiment leur effet compensatoire.

Source : A. Lamba, PLOS Sustainability and Transformation

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