Des chercheurs découvrent un fossile d’embryon de dinosaure extrêmement bien conservé

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Reconstruction 3D de l'embryon dans son oeuf. | L. Xing et al.
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Il s’agit d’une découverte rare : un embryon d’oviraptorosaure — un clade de dinosaures théropodes bipèdes — niché dans son œuf fossilisé, datant d’il y a 72 à 66 millions d’années. Son état de conservation est tel qu’il apporte de nouveaux éléments sur le développement de ces espèces aujourd’hui éteintes. En particulier, cet œuf incroyablement bien conservé révèle que les liens évolutifs entre les dinosaures et les oiseaux modernes seraient en réalité bien plus profonds que ne le pensaient les spécialistes.

Les oviraptorosaures sont un groupe de dinosaures théropodes à plumes, étroitement liés aux oiseaux modernes, qui se sont établis en Asie et en Amérique du Nord il y a 125 millions d’années. L’œuf a été découvert dans le sud de la Chine, dans la formation Hekou du Crétacé supérieur. Ce fossile suggère qu’à l’approche de l’éclosion, ces dinosaures théropodes développaient des postures similaires à celles des oiseaux. La ressemblance avec les embryons d’oiseaux modernes est en effet frappante : l’embryon est enroulé sur lui-même, le dos contre la coquille, la tête sous le corps, les pattes fléchies de chaque côté.

Chez les oiseaux actuels, de telles postures sont liées au repliement, un comportement contrôlé par le système nerveux central, qui garantit le succès de l’éclosion. Une telle posture n’avait en revanche jamais été observée jusqu’à présent chez un dinosaure non aviaire. « Ce petit dinosaure prénatal ressemble à un oisillon recroquevillé dans son œuf, ce qui prouve une fois de plus que de nombreuses caractéristiques des oiseaux modernes ont d’abord évolué chez leurs ancêtres dinosaures », souligne dans un communiqué Stephen Brusatte, paléontologue à l’Université d’Édimbourg et co-auteur de l’étude présentant la découverte.

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Une posture très similaire à celle des embryons de poule

En réalité, cet œuf était conservé au Yingliang Stone Nature History Museum à Xiamen, dans le sud-est de la Chine depuis 2010. C’est en triant les diverses acquisitions que le personnel du musée a fait cette incroyable découverte. Ce spécimen articulé est l’un des embryons de dinosaures non aviaires les plus complets jamais découverts. Pour les paléontologues, c’est l’opportunité de réaliser une étude anatomique détaillée, qui permettra de répondre à de nombreuses questions sur la croissance et la reproduction des dinosaures.

fossile embryon dinosaure
Le fossile d’embryon découvert par L. Xing et son équipe. © L. Xing et al.

L’embryon, surnommé « Baby Yingliang », a été identifié comme oviraptorosaure de par la combinaison de plusieurs caractères typiques, notamment un crâne plutôt court muni d’un bec et l’absence de dentition. Le squelette est presque complet, « sans grande perturbation post-mortem apparente », notent les chercheurs. L’œuf mesure 16,7 cm de long sur 7,6 cm de large. Le squelette mesure environ 23,5 cm de longueur totale — de la pointe antérieure du crâne à la dernière vertèbre caudale conservée — et occupe ainsi presque tout l’espace de l’œuf, à l’exception d’une zone d’environ 2 cm située entre le dos de l’animal et la coquille, qui constitue vraisemblablement la cellule d’air — un espace généralement trouvé entre le dos de l’embryon et le pôle émoussé des œufs d’oiseaux.

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La posture adoptée par l’embryon d’oviraptorosaure présente plusieurs similitudes avec les embryons de poule, ce qui suggère que ce comportement typique des oiseaux modernes pourrait être hérité des dinosaures non aviaires. © L. Xing et al.

La posture adoptée par ce spécimen diffère de celle des sauropodomorphes — un sous-ordre de dinosaures, « cousins » des théropodes, caractérisé par un long cou — et des crocodiliens existants, mais elle est en revanche très similaire à celle des embryons de poule, quelques jours avant l’éclosion. Ainsi, après avoir examiné l’œuf et l’embryon, les chercheurs pensent qu’un tel comportement avant l’éclosion — auparavant considéré comme exclusif aux oiseaux — pourrait finalement provenir de ces dinosaures non aviaires, il y a des millions d’années.

Plusieurs caractéristiques comportementales héritées des dinosaures

Les oviraptorosaures (qui signifie « lézards voleurs d’œufs ») ont été ainsi nommés car les premiers fossiles de ce clade, découverts à proximité d’un nid, suggéraient qu’ils se nourrissaient d’œufs. Des études ont finalement montré qu’il s’agissait en réalité du propre nid de l’animal. Les habitudes alimentaires de ces animaux ne sont pas entièrement connues. Cependant, leurs formes de bec et leurs tailles corporelles très variables leur ont probablement permis d’adopter un large éventail de régimes alimentaires, tant herbivore que carnivore. Les oviraptorosaures se sont éteints à la fin du Crétacé, il y a environ 66 millions d’années, à l’instar de tous les autres dinosaures non aviaires.

La découverte de cet embryon renforce l’hypothèse selon laquelle plusieurs caractéristiques typiques des oiseaux seraient en réalité héritées des dinosaures théropodes. Plusieurs fossiles de dinosaures ont par exemple été découverts sur leur nid, en train de couver des œufs. Au début des années 2000, des chercheurs ont également rapporté la découverte d’un fossile de troodontidé — une autre famille de théropodes — préservé dans la posture stéréotypée de sommeil ou de repos observée chez les oiseaux.

comparaison embryons dinosaures
Les différences de posture observées entre trois embryons d’oviraptorosaures pourraient correspondre à différents stades de l’incubation. © L. Xing et al.

L’équipe a par ailleurs comparé le nouvel embryon à deux autres œufs d’oviraptorosaures découverts auparavant, l’un à Ganzhou, au sud-est de la Chine, l’autre en Mongolie, de taille similaire. Bien qu’assez semblables, les postures adoptées par ces deux autres embryons différaient légèrement, notamment sur la position du crâne, qui apparaissait plus ou moins proche de l’ilion ; de même, les membres postérieurs de l’animal étaient plus ou moins associés. Ces différences peuvent représenter différents degrés de courbure ou « des intervalles de changements posturaux pendant l’incubation », écrivent les chercheurs — des changements de posture observés chez les oiseaux.

L’équipe souligne que l’étude d’autres embryons fossilisés est néanmoins nécessaire pour confirmer cette hypothèse. Des embryons fossiles supplémentaires — non seulement de dinosaures théropodes, mais aussi de sauropodomorphes et d’ornithischiens, bien plus éloignés des oiseaux — ainsi que des études comparatives plus approfondies d’archosaures existants, en particulier de crocodiliens, seront menées pour mieux comprendre le comportement de pré-éclosion des dinosaures non aviaires.

Reconstruction 3D animée de l’embryon :

Source : iScience, L. Xing et al.

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